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BULLETIN DES MUSÉES ROYAUX
FIGURE 2.
vie, stabilité, santé, richesse (?) louanges et amour
au double du royal.? du roi Ramsès-em-per-
ra ». Je ne sais trop comment traduire le titre
laissé en blanc et qui s’allie, comme nous allons
le voir dans un instant, à ceux qui sont portés
par les plus hauts dignitaires de l’entourage du
roi. On connaît, en effet, ce Ramsès-emper-
ra, grâce à un autre monument fort important,
découvert lors des fouilles de Mariette, à Aby-
dos (i). Il s’agit d'une stèle funéraire où notre
personnage étale complaisamment ses nombreux
titres : c'est lui qui lave les mains du roi, il porte
le chasse-mouche à la droite du roi, il est le pre-
mier héraut de Sa Majesté ; il a encore deux
autres titres composés avec le même signe que
dans notre inscription et que je ne puis com-
prendre. Ce qui est curieux, c’est que le père de
Ramsès-cm-pcr-ra était d’origine étrangère, il portait
un nom asiatique. Nous ne connaissons pas le nom
de sa mère. Le père semble avoir été un de ces
nombreux Syriens qui, à l’époque de la XIXe dy-
nastie, s’étaient établis en Égypte : son fils, notre
personnage, aurait commencé sa carrière sous le
règne de Ramsès II dont il dit avoir été aimé, sa
fortune se serait affermie sous le règne du succes-
seur de Ramsès II, Méneptah dont les noms sont
gravés sur la stèle d’Abydos. Ce dernier monument
offre une particularité encore qu’il faut signaler :
Ramsès-em-per-ra portait deux surnoms, l’un égyp-
(1) Mariette, Catalogue des monuments d’Abydos,
pp. 422-423; reproduit dans Abydos, II, pl. 50.
(2) C’est peut-être une allusion à son nom : « Ramsès
l’a engendré dans le temple de Ra ». « Temple de Ra »
est également le nom de la ville d’Héliopolis.
(3) Max Muller, Asien tend Europa nach altàgyp-
lischen Denltmàlern, p. 273-
tien : « Mer-An aimant Héliopolis » (2),
l’autre sémitique que Mariette transcrivait
Ben Mat’ana du pays de T’arbasana. Ce
second surnom nous indiquerait l’origine
de notre personnage si l’on savait exacte-
ment où localiser Tarbasana (3).® Ce
nom apparaît dans les documents cunéi-
formes de Tell el Amarna sous la forme
Ziribasani. On cherche à placer Ziribasam
au nord-est de la Palestine, dans la région
trans-jordanienne (4).
On voit donc l’intérêt de notre stèle,
qui est la seconde à faire connaître une
personnalité importante de la fin de la
XIXe dynastie. Un sémite, ou plutôt un
égyptien né d’un père sémite, est investi
de hautes fonctions à la cour, et il est atta-
ché,, entre autres charges, au culte de
Thoutmès III, un des rois de la dynastie précé-
dente. Rappelons que c’est sous le règne de Méncp-
iah qu’aurait eu lieu l’exode des Hébreux guidés
par Moïse (5).
Sur la figure 2 j’ai reproduit deux petits monu-
ments achetés à Thèbes en janvier 1901 (6).
Leur intérêt consiste en ce qu'ils sont tous deux
consacrés au culte populaire des animaux. M. Mas-
pero, parlant de la population ouvrière de la nécro-
pole thébaine à l’époque du second empire thébain,
s'exprime comme suit ; « L’instruction manquait
à ces pauvres gens, et leur religion était médiocre.
Ils vénéraient les dieux officiels, Amon, Moût, Isis,
Hâthôr, et les souverains tels qu’Aménothès Ier et
Nofrîtari, mais ils avaient leur Panthéon particu-
lier où les animaux dominaient, l’oie d’Amon et
son bélier Pa-rahoninofir, le bon joueur de corne,
l’hippopotame, la chatte, le poussin, l’hirondelle,
les reptiles surtout » (7). Nos deux petites stèles
appartiennent à la série des monuments qui font
connaître ces cultes populaires. Sur l’une on dis-
tingue un serpent, la tête surmontée d’une cou-
ronne ornée de deux hautes plumes ; sur deux au-
tels sont accumulées, à l’intention de la déesse, des
offrandes nombreuses. Sur l’autre stèle, un singe,
un cynocéphale, gravement assis sur une base,
reçoit imperturbablement l’hommage de l’encens
que lui offre un petit personnage debout. Malgré
leurs mutilations, ces monuments conservent donc
(4) Petrie, History of Egypt. II, p. 319.
(5) Signalons, à ce sujet, la brochure récente de Spie-
gelberg, der Aufont hait Israels in Ægypten irn Licht( der
àgyptischen Monumente. Strasbourg, 1904.
(6) Hauteur, omi55 et omi8.
(7) Maspero, Histoire ancienne des peuples de l'Orient
classique, II, pp. 536-537.
BULLETIN DES MUSÉES ROYAUX
FIGURE 2.
vie, stabilité, santé, richesse (?) louanges et amour
au double du royal.? du roi Ramsès-em-per-
ra ». Je ne sais trop comment traduire le titre
laissé en blanc et qui s’allie, comme nous allons
le voir dans un instant, à ceux qui sont portés
par les plus hauts dignitaires de l’entourage du
roi. On connaît, en effet, ce Ramsès-emper-
ra, grâce à un autre monument fort important,
découvert lors des fouilles de Mariette, à Aby-
dos (i). Il s’agit d'une stèle funéraire où notre
personnage étale complaisamment ses nombreux
titres : c'est lui qui lave les mains du roi, il porte
le chasse-mouche à la droite du roi, il est le pre-
mier héraut de Sa Majesté ; il a encore deux
autres titres composés avec le même signe que
dans notre inscription et que je ne puis com-
prendre. Ce qui est curieux, c’est que le père de
Ramsès-cm-pcr-ra était d’origine étrangère, il portait
un nom asiatique. Nous ne connaissons pas le nom
de sa mère. Le père semble avoir été un de ces
nombreux Syriens qui, à l’époque de la XIXe dy-
nastie, s’étaient établis en Égypte : son fils, notre
personnage, aurait commencé sa carrière sous le
règne de Ramsès II dont il dit avoir été aimé, sa
fortune se serait affermie sous le règne du succes-
seur de Ramsès II, Méneptah dont les noms sont
gravés sur la stèle d’Abydos. Ce dernier monument
offre une particularité encore qu’il faut signaler :
Ramsès-em-per-ra portait deux surnoms, l’un égyp-
(1) Mariette, Catalogue des monuments d’Abydos,
pp. 422-423; reproduit dans Abydos, II, pl. 50.
(2) C’est peut-être une allusion à son nom : « Ramsès
l’a engendré dans le temple de Ra ». « Temple de Ra »
est également le nom de la ville d’Héliopolis.
(3) Max Muller, Asien tend Europa nach altàgyp-
lischen Denltmàlern, p. 273-
tien : « Mer-An aimant Héliopolis » (2),
l’autre sémitique que Mariette transcrivait
Ben Mat’ana du pays de T’arbasana. Ce
second surnom nous indiquerait l’origine
de notre personnage si l’on savait exacte-
ment où localiser Tarbasana (3).® Ce
nom apparaît dans les documents cunéi-
formes de Tell el Amarna sous la forme
Ziribasani. On cherche à placer Ziribasam
au nord-est de la Palestine, dans la région
trans-jordanienne (4).
On voit donc l’intérêt de notre stèle,
qui est la seconde à faire connaître une
personnalité importante de la fin de la
XIXe dynastie. Un sémite, ou plutôt un
égyptien né d’un père sémite, est investi
de hautes fonctions à la cour, et il est atta-
ché,, entre autres charges, au culte de
Thoutmès III, un des rois de la dynastie précé-
dente. Rappelons que c’est sous le règne de Méncp-
iah qu’aurait eu lieu l’exode des Hébreux guidés
par Moïse (5).
Sur la figure 2 j’ai reproduit deux petits monu-
ments achetés à Thèbes en janvier 1901 (6).
Leur intérêt consiste en ce qu'ils sont tous deux
consacrés au culte populaire des animaux. M. Mas-
pero, parlant de la population ouvrière de la nécro-
pole thébaine à l’époque du second empire thébain,
s'exprime comme suit ; « L’instruction manquait
à ces pauvres gens, et leur religion était médiocre.
Ils vénéraient les dieux officiels, Amon, Moût, Isis,
Hâthôr, et les souverains tels qu’Aménothès Ier et
Nofrîtari, mais ils avaient leur Panthéon particu-
lier où les animaux dominaient, l’oie d’Amon et
son bélier Pa-rahoninofir, le bon joueur de corne,
l’hippopotame, la chatte, le poussin, l’hirondelle,
les reptiles surtout » (7). Nos deux petites stèles
appartiennent à la série des monuments qui font
connaître ces cultes populaires. Sur l’une on dis-
tingue un serpent, la tête surmontée d’une cou-
ronne ornée de deux hautes plumes ; sur deux au-
tels sont accumulées, à l’intention de la déesse, des
offrandes nombreuses. Sur l’autre stèle, un singe,
un cynocéphale, gravement assis sur une base,
reçoit imperturbablement l’hommage de l’encens
que lui offre un petit personnage debout. Malgré
leurs mutilations, ces monuments conservent donc
(4) Petrie, History of Egypt. II, p. 319.
(5) Signalons, à ce sujet, la brochure récente de Spie-
gelberg, der Aufont hait Israels in Ægypten irn Licht( der
àgyptischen Monumente. Strasbourg, 1904.
(6) Hauteur, omi55 et omi8.
(7) Maspero, Histoire ancienne des peuples de l'Orient
classique, II, pp. 536-537.