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BULLETIN DES MUSÉES ROYAUX
moulages; le roi Louis XIII (n° 2787) et le cardinal
de Richelieu(n° 2788). Les originaux sont en bronze;
le premier appartient au Musée du Louvre; l’autre, à
la Bibliothèque Maza-
rine.
La physionomie du
roi corrobore en tous
points ce que l’histoire
nous- apprend du fils
d’Henri IV. Le regard
ne brille pas d’une intel-
ligence réellement supé-
rieure; il ne montre pas
l’homme capable de ces
énergiques initiatives
qui entraînent unpeuple
militaire à la conquête
du monde ; au contraire,
on remarque dans les
yeux une certaine timi-
dité, voire un peu de
mélancolie; mais la fer-
meté des traits décèle
le courage ; et l’on sent
que, si cet homme ne
fut pas un stratège de
premier ordre, il dut être
un vaillant soldat, capa-
ble de se battre en héros;
il dut aussi, étant mo-
deste, savoir apprécier
les esprits supérieurs ;
incapable de gouverner
lui-même avec la haute
habileté politique du
cardinal, il sut appré-
cier toute la valeur de
celui-ci pour son gouver-
nement; et le sentiment exact du degré de ses propres
forces, de la supériorité de son ministre, lui donna
l’énergie de maintenir ce dernier au pouvoir, en dépit
de Marie de Médicis, d’Anne d’Autriche et de toute
la noblesse courtisane, inquiète et jalouse de l’auto-
rité croissante laissée à Richelieu par le souverain.
Au demeurant, les traits du roi, sans être préci-
sément fins, ne manquent point de noblesse. Le
visage est d’un ovale pur, un peu long; le nez est fort;
la lèvre inférieure épaisse, légèrement débordantè,
lui donne une expression débonnaire. La moustache
se relève en pointes arrondies; une barbiche cache le
menton. La chevelure, largement traitée, encadre la
face de grosses boucles, sans nulle symétrie, et tombe
en ondulations épaisses sur l’épaule gauche. Une
fraise à triple rang de plis enserre le cou; les épaules
sont couvertes d’une pèlerine d’hermine sur laquelle
est jeté le manteau royal.
Près du buste de Louis XIII est celui de son
ministre, Armand-Jean du Plessis, duc de Richelieu.
Ce buste reproduit bien les trait? popularisés par
les tableaux de Philippe de Champaigne ; il leur donne
une intense apparence
de vie. C’est bien là le
politicien prudent, mais
ferme et décidé, dont
l’aide était indispensable
au modeste Louis XIII.
Le front révèle une
intelligence puissante;
les yeux, bien ouverts,
ont le regard clair,
attentif et profond de
l’homme qui réfléchit
tout en écoutant; la
bouche, petite et droite,
est empreinte de vo-
lonté ; une moustache
élégamment relevée et
à peine ondulée l’om-
brage ; une barbiche dis-
simule le menton. Les
cheveux s’échappent de
la calotte entrois touffes
•abondantes ; deux
cachent en partie les
oreilles, l’autre se relève
au-dessus du front,
découvrant la pure
noblesse de ses lignes.
Sur un manteau de
fourrure jeté sur les
épaules se détache, sus-
pendue au large ruban
de l’ordre, la croix du
Saint-Esprit.
En rapprochant le
portrait de Louis XIII de celui de Richelieu, on sent
qu’à un tel roi, il fallait un tel ministre, et que la
plus grande preuve de bon sens donnée par le sou-
verain fut d’employer tout ce qui était en lui de
puissance et de volonté à maintenir le cardinal à la
tête des affaires de son pays.
Un autre buste de Jean Warin, dont nous ne possé-
dons pas encore la reproduction, rend de façon non
moins caractéristique les traits de Louis XIV à l’âge
de 28 ans; c’est un marbre merveilleux conservé en
bonne place dans ce château de Versailles— pavillon
de chasse fondé par Louis XIII et transformé par
l’orgueilleuse fantaisie de son fils en un palais digne
du souverain du monde.
Ici, le regard est net, incisif, dominateur; le nez,
légèrement arqué, est souligné d’une ombre de mous-
tache; la bouche, aux lèvres serrées, est volontaire et
dédaigneuse.
Le cou est long; la tête, tournée vers l’épaule
par jean warin. Paris, Bibliothèque Mazarine. Bronze.
BULLETIN DES MUSÉES ROYAUX
moulages; le roi Louis XIII (n° 2787) et le cardinal
de Richelieu(n° 2788). Les originaux sont en bronze;
le premier appartient au Musée du Louvre; l’autre, à
la Bibliothèque Maza-
rine.
La physionomie du
roi corrobore en tous
points ce que l’histoire
nous- apprend du fils
d’Henri IV. Le regard
ne brille pas d’une intel-
ligence réellement supé-
rieure; il ne montre pas
l’homme capable de ces
énergiques initiatives
qui entraînent unpeuple
militaire à la conquête
du monde ; au contraire,
on remarque dans les
yeux une certaine timi-
dité, voire un peu de
mélancolie; mais la fer-
meté des traits décèle
le courage ; et l’on sent
que, si cet homme ne
fut pas un stratège de
premier ordre, il dut être
un vaillant soldat, capa-
ble de se battre en héros;
il dut aussi, étant mo-
deste, savoir apprécier
les esprits supérieurs ;
incapable de gouverner
lui-même avec la haute
habileté politique du
cardinal, il sut appré-
cier toute la valeur de
celui-ci pour son gouver-
nement; et le sentiment exact du degré de ses propres
forces, de la supériorité de son ministre, lui donna
l’énergie de maintenir ce dernier au pouvoir, en dépit
de Marie de Médicis, d’Anne d’Autriche et de toute
la noblesse courtisane, inquiète et jalouse de l’auto-
rité croissante laissée à Richelieu par le souverain.
Au demeurant, les traits du roi, sans être préci-
sément fins, ne manquent point de noblesse. Le
visage est d’un ovale pur, un peu long; le nez est fort;
la lèvre inférieure épaisse, légèrement débordantè,
lui donne une expression débonnaire. La moustache
se relève en pointes arrondies; une barbiche cache le
menton. La chevelure, largement traitée, encadre la
face de grosses boucles, sans nulle symétrie, et tombe
en ondulations épaisses sur l’épaule gauche. Une
fraise à triple rang de plis enserre le cou; les épaules
sont couvertes d’une pèlerine d’hermine sur laquelle
est jeté le manteau royal.
Près du buste de Louis XIII est celui de son
ministre, Armand-Jean du Plessis, duc de Richelieu.
Ce buste reproduit bien les trait? popularisés par
les tableaux de Philippe de Champaigne ; il leur donne
une intense apparence
de vie. C’est bien là le
politicien prudent, mais
ferme et décidé, dont
l’aide était indispensable
au modeste Louis XIII.
Le front révèle une
intelligence puissante;
les yeux, bien ouverts,
ont le regard clair,
attentif et profond de
l’homme qui réfléchit
tout en écoutant; la
bouche, petite et droite,
est empreinte de vo-
lonté ; une moustache
élégamment relevée et
à peine ondulée l’om-
brage ; une barbiche dis-
simule le menton. Les
cheveux s’échappent de
la calotte entrois touffes
•abondantes ; deux
cachent en partie les
oreilles, l’autre se relève
au-dessus du front,
découvrant la pure
noblesse de ses lignes.
Sur un manteau de
fourrure jeté sur les
épaules se détache, sus-
pendue au large ruban
de l’ordre, la croix du
Saint-Esprit.
En rapprochant le
portrait de Louis XIII de celui de Richelieu, on sent
qu’à un tel roi, il fallait un tel ministre, et que la
plus grande preuve de bon sens donnée par le sou-
verain fut d’employer tout ce qui était en lui de
puissance et de volonté à maintenir le cardinal à la
tête des affaires de son pays.
Un autre buste de Jean Warin, dont nous ne possé-
dons pas encore la reproduction, rend de façon non
moins caractéristique les traits de Louis XIV à l’âge
de 28 ans; c’est un marbre merveilleux conservé en
bonne place dans ce château de Versailles— pavillon
de chasse fondé par Louis XIII et transformé par
l’orgueilleuse fantaisie de son fils en un palais digne
du souverain du monde.
Ici, le regard est net, incisif, dominateur; le nez,
légèrement arqué, est souligné d’une ombre de mous-
tache; la bouche, aux lèvres serrées, est volontaire et
dédaigneuse.
Le cou est long; la tête, tournée vers l’épaule
par jean warin. Paris, Bibliothèque Mazarine. Bronze.