DES ARTS DÉCORATIFS ET INDUSTRIELS
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FIG. 3. - N° 2844. VOLTAIRE, PAR HOUDON. FIG. 4. _ u° 2843. MOLIÈRE, PAR HOUDON.
(Paris, Comédie Française. ■—• Marbre.)
en 1842 dans l’église Notre-Dame, au Sablon. LTn
moulage du buste de Caffieri remplacerait avanta-
geusement l’œuvre de Du Mortier qui orne son
mausolée et que l’abbé De Bruyn, sévère dans ses
appréciations mais non injuste, appelle « le plus
mou et le plus insignifiant buste qu’il soit possible
de produire 1 ».
Ces deux bustes, celui de Rotrou et celui de Rous-
seau, ne sont point des portraits : le premier date de
1783, et Jean de Rotrou mourut en 1650; le second
fut modelé en 1789, près d’un demi-siècle après la
mort du poète. Caffieri, né en 1725, n’avait certaine-
ment jamais connu Rotrou; peut-être avait-il, à
peine adolescent, pu voir Jean-Baptiste Rousseau;
mais il est tout à fait invraisemblable qu’il en ait gardé
un souvenir suffisant pour lui permettre de repro-
duire ses traits au bout de tant d’années; il n’eût
d’ailleurs conservé de la rencontre que l’impression
d’un vieillard malade et morose, et le Rousseau qu’il
nous montre est plein de vigueur et d’ardeur au com-
i. Notice sur Véglise de Notre-Dame au Sablon, à Bru-
xelles (Bull, des Commissions royales d’ajrt et d’archéol.
1872, p. 199).
bat. Cependant, les physionomies de ces deux écrivains
s’accordent à merveille avec ce que l’on sait de leur
caractère; preuve que Caffieri, ne voulant pas faire
œuvre banale et quelconque, s’est appliqué à se péné-
trer de la psychologie des personnages afin de sup-
pléer, par une ressemblance morale certaine, à l’in-
certitude d’une ressemblance physique qu'il n’était
pas à même de contrôler. Disons toutefois qu’il put
s’aider, pour le buste de Rotrou, d’un portrait d’après
nature qui appartenait à un arrière-petit-neveu de
l’écrivain, et, pour celui de Rousseau, d’un autre
portrait original, peint par M. Aved, peintre du Roi.
Deux autres bustes bien caractéristiques — dont
l’un est un admirable portrait, étudié sur le vif —
sont ceux de Voltaire (n° 2844) et de Molière
(n° 2843), par Jean-Antoine Hoddon 2. Elève de
J.-B. Pigalle et de René-Michel (dit Michel-Ange)
Slodtz (fils d’un Anversois dont Paris et Versailles
possèdent les chefs-d’œuvre), Houdon fut peut-être le
meilleur des sculpteurs portraitistes modernes ; comme
Jean Warin, il fut un observateur sagace, pénétrant
2. Né à Versailles en 1741, mort à Paris en 1828.
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FIG. 3. - N° 2844. VOLTAIRE, PAR HOUDON. FIG. 4. _ u° 2843. MOLIÈRE, PAR HOUDON.
(Paris, Comédie Française. ■—• Marbre.)
en 1842 dans l’église Notre-Dame, au Sablon. LTn
moulage du buste de Caffieri remplacerait avanta-
geusement l’œuvre de Du Mortier qui orne son
mausolée et que l’abbé De Bruyn, sévère dans ses
appréciations mais non injuste, appelle « le plus
mou et le plus insignifiant buste qu’il soit possible
de produire 1 ».
Ces deux bustes, celui de Rotrou et celui de Rous-
seau, ne sont point des portraits : le premier date de
1783, et Jean de Rotrou mourut en 1650; le second
fut modelé en 1789, près d’un demi-siècle après la
mort du poète. Caffieri, né en 1725, n’avait certaine-
ment jamais connu Rotrou; peut-être avait-il, à
peine adolescent, pu voir Jean-Baptiste Rousseau;
mais il est tout à fait invraisemblable qu’il en ait gardé
un souvenir suffisant pour lui permettre de repro-
duire ses traits au bout de tant d’années; il n’eût
d’ailleurs conservé de la rencontre que l’impression
d’un vieillard malade et morose, et le Rousseau qu’il
nous montre est plein de vigueur et d’ardeur au com-
i. Notice sur Véglise de Notre-Dame au Sablon, à Bru-
xelles (Bull, des Commissions royales d’ajrt et d’archéol.
1872, p. 199).
bat. Cependant, les physionomies de ces deux écrivains
s’accordent à merveille avec ce que l’on sait de leur
caractère; preuve que Caffieri, ne voulant pas faire
œuvre banale et quelconque, s’est appliqué à se péné-
trer de la psychologie des personnages afin de sup-
pléer, par une ressemblance morale certaine, à l’in-
certitude d’une ressemblance physique qu'il n’était
pas à même de contrôler. Disons toutefois qu’il put
s’aider, pour le buste de Rotrou, d’un portrait d’après
nature qui appartenait à un arrière-petit-neveu de
l’écrivain, et, pour celui de Rousseau, d’un autre
portrait original, peint par M. Aved, peintre du Roi.
Deux autres bustes bien caractéristiques — dont
l’un est un admirable portrait, étudié sur le vif —
sont ceux de Voltaire (n° 2844) et de Molière
(n° 2843), par Jean-Antoine Hoddon 2. Elève de
J.-B. Pigalle et de René-Michel (dit Michel-Ange)
Slodtz (fils d’un Anversois dont Paris et Versailles
possèdent les chefs-d’œuvre), Houdon fut peut-être le
meilleur des sculpteurs portraitistes modernes ; comme
Jean Warin, il fut un observateur sagace, pénétrant
2. Né à Versailles en 1741, mort à Paris en 1828.