DU CINQUANTENAIRE
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2° Triptyque Mayer van denBergh (i) (Fig.4) :
jfffi La Vierge à l’œillet, avec l’Enfant, entre sainte
Catherine et sainte Barbe. La Vierge, couronnée
par deux petits anges aux ailes multicolores, est
habillée d’une robe brun-rouge, décolletée, et
d’un manteau gros-bleu liseré d’or. Sainte Barbe
en costume rouge laque, aux plis droits ; sainte
Catherine revêt un corsage de brocart rouge col-
lant. Le sujet principal de ces deux triptyques
(le second d’une exécution raffinée et d’un coloris
séduisant peut être
qualifié de chef-d’œu-
vre) « la Madone à
la Heur, » mérite de
nous retenir. La
Vierge, pressant la
mince tige du bout de
ses doigts fuselés, in-
cline son visage dou-
cereux et attendri vers
l’Enfant au petit bras
levé comme pour
bénir, — qui s’efforce,
dirait-on, d’atteindre
la fleur éclatante. Il
faut définir cette com-
position, d’une sub-
tile émotion : le reflet
légèrement italianisé
d’une création perdue
de l’un des maîtres les
plus représentatifs du
xve siècle flamand, de
Roger Van der Wey-
den, selon M. Fried-
laender (2). En même
temps que le maître
de la légende de
Marie-Madeleine,
notre peintre aurait droit de s’intituler le maître
des Madones à la fleur (« mit der Blume »)
et c’est aussi un bien joli nom !
Le critique allemand énumère les exemplaires
connus de ce genre de Madones dont le proto-
type se révèle dans une estampe du maître aux
banderoles (seule épreuve conservée, au musée
grand-ducal de Darmstadt. On suppose que ce
maître n’a plus travaillé après 1470, — « terminus
ante quem » pour fixer la date de la composition
originale). La Madone à la fleur figure dans une
(1) N° 22 ; catalogue igo5, p. 53 avec reproduction.
(2) Bernaert Van Orley, dans le Jahrbnch der kôniglich
preuss. Kunstsammlungen, 1909.
série de tableaux néerlandais du commencement
du xvie siècle : collection Beurnonville (1).
(Paris 1S83 ; école de Van Eyck) ; vente Rine-
cker (2) (Cologne 1888; Gérard David); dans le
commerce à Munich, provenant de la collection
Brenken. Et, ce qui nous intéresse davantage,
la Madone à la fleur apparaît encore en trois pan-
neaux procédant directement du centre des reta-
bles Durazzo et Mayer Van den Bergh : à la
Wallace collection de Londres (3); chez Bôhler
à Munich, et au Lou-
vre (4) (donné par
Maciet : Ecole alle-
mande). Je joins à ces
lignes consacrées au
cycle du maître de la
légende de Marie-
Madeleine, la photo-
graphie (Fig. 5) du
petit tableau du Lou-
vre, quasi ignoré aux
parois de l'intermina-
ble galerie du bord de
l’eau. M. Friedlaender
déclare que Bernard
Van Orley jeune, vul-
garisateur probable de
ces Madones, d’une
grâce flexible et déli-
cate, a puisé aux
mêmes sources que le
maître de la légende
de Marie-Madeleine.
Et pour finir notre
récapitulation, arrê-
tons-nous un instant
devant un tableau de
la galerie Colonna à
Rome, qui présente
en sens opposé la Madone à la fleur entourée des
médaillons des Sept joies de la Vierge (5) (Fig. 6).
[Attribution à M abuse, ainsi que le pendant,
les Sept douleurs de la Vierge (6)]. Le mignon
panneau évoque discrètement là-bas, dans la
splendeur un peu lourde du palais romain, la
piété fervente de nos Primitifs néerlandais.
(1) Reprod. cat. p. 5y.
(2) Reprod. cat. p. 8.
(3) N° 548, eat. 1911.
(4) N° 2736 a.
(5) N° 123. Dénommé : Jean van Eyck !
(6) D’après M. Friedlaender, œuvres de la jeunesse de
Van Orley (Jahrbuch prussien 1909).
FIG. 5. — « LA MADONE A LA FLEUR ».
(Musée du Louvre).
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2° Triptyque Mayer van denBergh (i) (Fig.4) :
jfffi La Vierge à l’œillet, avec l’Enfant, entre sainte
Catherine et sainte Barbe. La Vierge, couronnée
par deux petits anges aux ailes multicolores, est
habillée d’une robe brun-rouge, décolletée, et
d’un manteau gros-bleu liseré d’or. Sainte Barbe
en costume rouge laque, aux plis droits ; sainte
Catherine revêt un corsage de brocart rouge col-
lant. Le sujet principal de ces deux triptyques
(le second d’une exécution raffinée et d’un coloris
séduisant peut être
qualifié de chef-d’œu-
vre) « la Madone à
la Heur, » mérite de
nous retenir. La
Vierge, pressant la
mince tige du bout de
ses doigts fuselés, in-
cline son visage dou-
cereux et attendri vers
l’Enfant au petit bras
levé comme pour
bénir, — qui s’efforce,
dirait-on, d’atteindre
la fleur éclatante. Il
faut définir cette com-
position, d’une sub-
tile émotion : le reflet
légèrement italianisé
d’une création perdue
de l’un des maîtres les
plus représentatifs du
xve siècle flamand, de
Roger Van der Wey-
den, selon M. Fried-
laender (2). En même
temps que le maître
de la légende de
Marie-Madeleine,
notre peintre aurait droit de s’intituler le maître
des Madones à la fleur (« mit der Blume »)
et c’est aussi un bien joli nom !
Le critique allemand énumère les exemplaires
connus de ce genre de Madones dont le proto-
type se révèle dans une estampe du maître aux
banderoles (seule épreuve conservée, au musée
grand-ducal de Darmstadt. On suppose que ce
maître n’a plus travaillé après 1470, — « terminus
ante quem » pour fixer la date de la composition
originale). La Madone à la fleur figure dans une
(1) N° 22 ; catalogue igo5, p. 53 avec reproduction.
(2) Bernaert Van Orley, dans le Jahrbnch der kôniglich
preuss. Kunstsammlungen, 1909.
série de tableaux néerlandais du commencement
du xvie siècle : collection Beurnonville (1).
(Paris 1S83 ; école de Van Eyck) ; vente Rine-
cker (2) (Cologne 1888; Gérard David); dans le
commerce à Munich, provenant de la collection
Brenken. Et, ce qui nous intéresse davantage,
la Madone à la fleur apparaît encore en trois pan-
neaux procédant directement du centre des reta-
bles Durazzo et Mayer Van den Bergh : à la
Wallace collection de Londres (3); chez Bôhler
à Munich, et au Lou-
vre (4) (donné par
Maciet : Ecole alle-
mande). Je joins à ces
lignes consacrées au
cycle du maître de la
légende de Marie-
Madeleine, la photo-
graphie (Fig. 5) du
petit tableau du Lou-
vre, quasi ignoré aux
parois de l'intermina-
ble galerie du bord de
l’eau. M. Friedlaender
déclare que Bernard
Van Orley jeune, vul-
garisateur probable de
ces Madones, d’une
grâce flexible et déli-
cate, a puisé aux
mêmes sources que le
maître de la légende
de Marie-Madeleine.
Et pour finir notre
récapitulation, arrê-
tons-nous un instant
devant un tableau de
la galerie Colonna à
Rome, qui présente
en sens opposé la Madone à la fleur entourée des
médaillons des Sept joies de la Vierge (5) (Fig. 6).
[Attribution à M abuse, ainsi que le pendant,
les Sept douleurs de la Vierge (6)]. Le mignon
panneau évoque discrètement là-bas, dans la
splendeur un peu lourde du palais romain, la
piété fervente de nos Primitifs néerlandais.
(1) Reprod. cat. p. 5y.
(2) Reprod. cat. p. 8.
(3) N° 548, eat. 1911.
(4) N° 2736 a.
(5) N° 123. Dénommé : Jean van Eyck !
(6) D’après M. Friedlaender, œuvres de la jeunesse de
Van Orley (Jahrbuch prussien 1909).
FIG. 5. — « LA MADONE A LA FLEUR ».
(Musée du Louvre).