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LA CHRONIQUE DES ARTS
Des travaux de restauration entrepris à
l'église paroissiale catholique de Nideggen
(Prusse rhénane) viennent d'y faire décou-
vrir d'intéressantes peintures murales du
sac siècle qui offrent le caractère des pein-
tures monumentales de l'école de Cologne.
Ce sont dans l'abside: au centre, Jésus Christ,
dans une mandorle entouré des symboles des
quatre Kvangélistes et accompagné de saint
Jean-Bapliste et de la Vierge, puis deux che-
valiers armés tenant des boucliers et des figu-
res féminines isolées d'untrèsbeau caractère,
parentes des figures de saintes de Saint-Gé-
réon, de Cologne. Dans le chœur sont des or-
nements divers et, à l'arc d'enlrée, deux gran-
des figures d'anges. Enfin, dans la nef, se
voient aussi des restes de décoration poly-
chrome et de grandes figures peintes sur les
piliers.
Un journal allemand annonce la décou-
verte à Hagenow (Mecklembourg), d'un grand
vase de bronze muni d'anses et d'un couver-
cle, décoré d'ornements géométriques et qui
renfermait plusieurs agrafes d'argent et de
bronze, des parures diverses en or, en argent
et en bronze, etc. Le tout paraît remonter en-
viron à l'année 50 de notre ère et provenir de
la sépulture d'un prince wende.
-»08C-«--
Académie des Inscriptions
Séance du 21 avril
Le sculpteur Francisco da Laurana. — M.
Mûntz communique, de la part de M. Maxe-
Werly, conservateur du musée de Barle-Due, un
mémoire sur le célèbre sculpteur et médaillour
italien, Francesco da Laurana, un des artistes
attitrés du roi René.
Laurana, que l'on croyait avoir disparu vers
1400, vivait encore en 14v9. M. Maxe-Werly lui
attribue l'exécution du tombeau do la duchesse
Yolande d'Anjou, fille du roi René, et de son
époux le duc Ferry de Vaudemont, clans l'église
de Joinvillo (Haute-Marne).
Nous savons, d'un autre côté, qu'en 1495 maître
Laurens, le fondeur, demeurant alors à Nancy,
travaillait au tombeau en question.
On ne saurait, suivant l'auteur, être taxé de
témérité en proposant d'identifier ce Laurens,
dans lequel on a cru reconnaître un Français ou
un Flamand, au célèbre artiste italien Laurana,
le protagoniste de la Renaissance clans notre pays.
Société des Antiquaires de France
Séance du 10 avril
M. Babelon communique, de la part de M. de
Rochemonteix, un mémoire sur une statue au-
vergnate de saint Christophe, de 1505. M. S. Ber-
ger, à l'occasion de cette communication, signale
la coutume qu'il a observée dans l'église d'Aves-
nières (Mayenne) : cette coutume consiste à en-
foncer des épingles dans les talons d'une statue
en bois représentant saint Christophe.
Le baron de Baye donne des renseignements
sur les fouilles opérées par la Commission impé-
riale d'archéologie de Saint-Pétersbourg dans les
dolmens sous tumulus, découverts clans la pro-
vince de Kouban (Caucase).
Les Peintres primitifs des Pays-Bas
I
le Jugement dernier de louvain
J'ai à revenir sur cet inépuisable sujet du Juge-
ment dernier, de l'école de Louvain,dont la France
possède les deux volets.
Dans un catalogue du musée de Rotterdam,
annoté par moi, en 1*5, au début d'un voyage en
Hollande, je retrouve la trace d'une comparaison
entre le volet des Élus (Lille) et un petit panneau
de ce charmant musée Boymans. C'est un Saint
Jean en l'île de Pathmos, de la plus suggestive
imagination. Lecalalogue l'attribue à Dirk Bouts
le père ; et, de fait, c'est toute sa tradition, un
peu amplifiée, interprétée dans un esprit nouveau
qui nous rapproche du xvi° siècle. Là, le paysage
s'élargit encore, jusqu'à des fonds dont les lumi-
neuses et toutes lointaines perspectives, avec
leurs lignes de montagnes, annoncent déjàPatinir
(et même Léonard). Au premier plan, la luxu-
riante et riante flore, les cailloux brillants parmi
lesquels scintille la nacre des coquillages, les dé-
tours et circuits des sentiers, tout rappelle et le
volet du Saint Jean-Baptiste à Munich et celui
de Lille; tout respire la fraîcheur, la paix, le
délice des solitudes bercées par le murmure de la
vie universelle. Tandis que l'Apôtre inspiré,
oubliant le monde, s'abîmant tout entier clans son
rêve, prête l'oreille à la voix intérieure qui lui
dicte l'Apocalypse, le Malin profite de cette
absence pour emporter méchamment l'écritoire
du Voyant et pour en vider le contenu, pensant,
par cette pauvre perfidie, arrêter le cours do la
Révélation divine.
Ce démon est bien le frère des démons de nos
Damnés, tout comme le saint Jean l'Évangéliste
descend en droite ligne de ses prédécesseurs de
la Cène, et de la Descente de Croix au Louvre.
Le costume des deux cavaliers, engageant un
colloque dans le fond, à gauche, est encore celui
de l'époque de Bouts de Ilaarlem et des person-
nages du Roi Othon.
En ce qui concerne l'état matériel du panneau
de Lille, on constate, à son revers, les mêmes
traces de badigeonnage noirci que porte le nôtre.
L'épaisseur aussi étant la mémo pour les deux
panneaux— et plutôt minime (un centimètre) en
proportion de leur hauteur et largeur communes
— il y a lieu de se demander s'ils n'ont pas été
sciés pour détacher des peintures extérieures en
grisaille, puis revêtus au dos de cet enduit pro-
tecteur, destiné sans doute à atténuer les nouveaux
risques d'une moindre solidité et d'une perméa-
bilité plus grande. Il ne faut pas perdre de vue
que le Jugement dernier de Louvain, nous le
savons grâce à dos extraits de comptes muni-
cipaux, eut ses « aisles » ou battants ornés de
peintures décoratives et munis de ferrures ciselées
par Josse Metsys, qui eut à remettre une serrure
LA CHRONIQUE DES ARTS
Des travaux de restauration entrepris à
l'église paroissiale catholique de Nideggen
(Prusse rhénane) viennent d'y faire décou-
vrir d'intéressantes peintures murales du
sac siècle qui offrent le caractère des pein-
tures monumentales de l'école de Cologne.
Ce sont dans l'abside: au centre, Jésus Christ,
dans une mandorle entouré des symboles des
quatre Kvangélistes et accompagné de saint
Jean-Bapliste et de la Vierge, puis deux che-
valiers armés tenant des boucliers et des figu-
res féminines isolées d'untrèsbeau caractère,
parentes des figures de saintes de Saint-Gé-
réon, de Cologne. Dans le chœur sont des or-
nements divers et, à l'arc d'enlrée, deux gran-
des figures d'anges. Enfin, dans la nef, se
voient aussi des restes de décoration poly-
chrome et de grandes figures peintes sur les
piliers.
Un journal allemand annonce la décou-
verte à Hagenow (Mecklembourg), d'un grand
vase de bronze muni d'anses et d'un couver-
cle, décoré d'ornements géométriques et qui
renfermait plusieurs agrafes d'argent et de
bronze, des parures diverses en or, en argent
et en bronze, etc. Le tout paraît remonter en-
viron à l'année 50 de notre ère et provenir de
la sépulture d'un prince wende.
-»08C-«--
Académie des Inscriptions
Séance du 21 avril
Le sculpteur Francisco da Laurana. — M.
Mûntz communique, de la part de M. Maxe-
Werly, conservateur du musée de Barle-Due, un
mémoire sur le célèbre sculpteur et médaillour
italien, Francesco da Laurana, un des artistes
attitrés du roi René.
Laurana, que l'on croyait avoir disparu vers
1400, vivait encore en 14v9. M. Maxe-Werly lui
attribue l'exécution du tombeau do la duchesse
Yolande d'Anjou, fille du roi René, et de son
époux le duc Ferry de Vaudemont, clans l'église
de Joinvillo (Haute-Marne).
Nous savons, d'un autre côté, qu'en 1495 maître
Laurens, le fondeur, demeurant alors à Nancy,
travaillait au tombeau en question.
On ne saurait, suivant l'auteur, être taxé de
témérité en proposant d'identifier ce Laurens,
dans lequel on a cru reconnaître un Français ou
un Flamand, au célèbre artiste italien Laurana,
le protagoniste de la Renaissance clans notre pays.
Société des Antiquaires de France
Séance du 10 avril
M. Babelon communique, de la part de M. de
Rochemonteix, un mémoire sur une statue au-
vergnate de saint Christophe, de 1505. M. S. Ber-
ger, à l'occasion de cette communication, signale
la coutume qu'il a observée dans l'église d'Aves-
nières (Mayenne) : cette coutume consiste à en-
foncer des épingles dans les talons d'une statue
en bois représentant saint Christophe.
Le baron de Baye donne des renseignements
sur les fouilles opérées par la Commission impé-
riale d'archéologie de Saint-Pétersbourg dans les
dolmens sous tumulus, découverts clans la pro-
vince de Kouban (Caucase).
Les Peintres primitifs des Pays-Bas
I
le Jugement dernier de louvain
J'ai à revenir sur cet inépuisable sujet du Juge-
ment dernier, de l'école de Louvain,dont la France
possède les deux volets.
Dans un catalogue du musée de Rotterdam,
annoté par moi, en 1*5, au début d'un voyage en
Hollande, je retrouve la trace d'une comparaison
entre le volet des Élus (Lille) et un petit panneau
de ce charmant musée Boymans. C'est un Saint
Jean en l'île de Pathmos, de la plus suggestive
imagination. Lecalalogue l'attribue à Dirk Bouts
le père ; et, de fait, c'est toute sa tradition, un
peu amplifiée, interprétée dans un esprit nouveau
qui nous rapproche du xvi° siècle. Là, le paysage
s'élargit encore, jusqu'à des fonds dont les lumi-
neuses et toutes lointaines perspectives, avec
leurs lignes de montagnes, annoncent déjàPatinir
(et même Léonard). Au premier plan, la luxu-
riante et riante flore, les cailloux brillants parmi
lesquels scintille la nacre des coquillages, les dé-
tours et circuits des sentiers, tout rappelle et le
volet du Saint Jean-Baptiste à Munich et celui
de Lille; tout respire la fraîcheur, la paix, le
délice des solitudes bercées par le murmure de la
vie universelle. Tandis que l'Apôtre inspiré,
oubliant le monde, s'abîmant tout entier clans son
rêve, prête l'oreille à la voix intérieure qui lui
dicte l'Apocalypse, le Malin profite de cette
absence pour emporter méchamment l'écritoire
du Voyant et pour en vider le contenu, pensant,
par cette pauvre perfidie, arrêter le cours do la
Révélation divine.
Ce démon est bien le frère des démons de nos
Damnés, tout comme le saint Jean l'Évangéliste
descend en droite ligne de ses prédécesseurs de
la Cène, et de la Descente de Croix au Louvre.
Le costume des deux cavaliers, engageant un
colloque dans le fond, à gauche, est encore celui
de l'époque de Bouts de Ilaarlem et des person-
nages du Roi Othon.
En ce qui concerne l'état matériel du panneau
de Lille, on constate, à son revers, les mêmes
traces de badigeonnage noirci que porte le nôtre.
L'épaisseur aussi étant la mémo pour les deux
panneaux— et plutôt minime (un centimètre) en
proportion de leur hauteur et largeur communes
— il y a lieu de se demander s'ils n'ont pas été
sciés pour détacher des peintures extérieures en
grisaille, puis revêtus au dos de cet enduit pro-
tecteur, destiné sans doute à atténuer les nouveaux
risques d'une moindre solidité et d'une perméa-
bilité plus grande. Il ne faut pas perdre de vue
que le Jugement dernier de Louvain, nous le
savons grâce à dos extraits de comptes muni-
cipaux, eut ses « aisles » ou battants ornés de
peintures décoratives et munis de ferrures ciselées
par Josse Metsys, qui eut à remettre une serrure