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MÉLANGES D'ARCHÉOLOGIE.
Aussi les témoignages des Grecs postérieurs à Auguste sont unanimes à rapporter les cultes
dont je parle à la même Vénus-Uranie. Ils nous la montrent connue sous différents nomset par
des récits divers, mais toujours la fécondatrice de la nature, la mère des dieux et des hommes.
Conformément à ces idées, M. Uajard reconnaît une Vénus substituée à Mithras dans les
monuments où l'opinion générale supposait jusqu ici une Victoire sacrifiant un taureau devant
un autel. Si cette substitution ne s'est pas encore montrée dans les représentations de l'antre
mithriaque (bien que l'on trouve dans les planches de M. Lajard (Lxxxiv, t) une Vénus à côté
d'un Mithras), c'est que les sectes particulières avaient leurs synboles convenus. Mais sous des
symboles différents respiraient souvent des croyances à peu près les mêmes, et sous ce point de
vue je ne m'opposerais pas à ceux qui ont proposé de signaler nos trois tombeaux par un nom
commun, et de les appeler mitliriaques, en ce sens que la Vénus babylonienne du second
tombeau est la même au fond que la Mithra persane, et le Bacchus-Sabazius du premier le
même que le Mithras persan.
L'essentiel est de distinguer ici les idées spéciales qui ont inspiré nos monuments. Or, sans
remonter aux sources primitives poury trouver dans le Mithras et le Sabazius hermaphrodites
la raison de la posture donnée à la déesse, les prêtres de la secte dont il s'agit pouvaient avoir
leurs motifs particuliers pour la choisir dans l'initiation au grade de mùes. Si, en d'autres occa-
sions, ce serait une vaine curiosité de vouloir approfondir les raisons secrètes de ces honteux
sectaires, il est nécessaire de le faire ici pour comprendre le monument et ajouter à la gloire
du christianisme. Nous ne marchons en cela qu à la suite des Pères de l Eglise, et nos motifs
seront les mêmes. Ils voulaient confondre le paganisme en révélant ses infamies, et nous avons,
nous, à répondre aux auteurs modernes qui se sont faits les patrons de sa morale.
Que veut donc dire le médaillon central? On peut désormais s en douter en se rappelant la
Cyhèle phrygienne et le culte de son fils Sabazius propagé par Orphée. ïgnore-t-on quels igno-
minieux souvenirs le nom du propagateur rappelait à Ovide (Æfeô 1. x, v. 83)? Et certes, il n'y
avait pas d'invraisemblance à reprocher les vices sans nom de la civilisation païenne au per-
sonnage supposé le chantre des aventures de Junon (^ppzTronotoüca) avec Jupiter (Lobeck,
6o6seq.), etdeCérés(<xee<T^M$ cuyyevoy.ew) avec Geleus etTriptolème (iè., 8a/Q; mais je mettrai,
si l'on veut, Orphée hors de cause, pour n'accuser que les sectaires sabaziens formés à l'école
de leur Bacchus et de leur Prosymnus, dont Arnobe a parlé. Quant à la Cyhèle phrygienne,
il y aurait à dépouiller ici plus d'une page du recueil où Lobeck (p. tooy-to2o) a transcrit
avec sagacité ce qu'ont écrit les anciens sur le culte de cette immonde divinité. Qu'il suffise
de dire que Clément d'Alexandrie a pu donner au philosophe Anacharsis une épithète infa-
mante', uniquement parce quil s'était fait initier aux mystères de Cyhèle Le culte de la.
' Profrepf., 20. A:^â<7xa\ovT^07?).:f(x?vocou. o-r^pio? Tvù p.oÙKX9:7rcxpst<7t, c'est-à-dire i7T<x!pY?xoi-E?,
3 Le scholiaste d'Aristoph. dit (Æ-. 876) : 'E-, T.ùpu- &p^,oxo7^= (Cf. Suet., Occ, 68),
MÉLANGES D'ARCHÉOLOGIE.
Aussi les témoignages des Grecs postérieurs à Auguste sont unanimes à rapporter les cultes
dont je parle à la même Vénus-Uranie. Ils nous la montrent connue sous différents nomset par
des récits divers, mais toujours la fécondatrice de la nature, la mère des dieux et des hommes.
Conformément à ces idées, M. Uajard reconnaît une Vénus substituée à Mithras dans les
monuments où l'opinion générale supposait jusqu ici une Victoire sacrifiant un taureau devant
un autel. Si cette substitution ne s'est pas encore montrée dans les représentations de l'antre
mithriaque (bien que l'on trouve dans les planches de M. Lajard (Lxxxiv, t) une Vénus à côté
d'un Mithras), c'est que les sectes particulières avaient leurs synboles convenus. Mais sous des
symboles différents respiraient souvent des croyances à peu près les mêmes, et sous ce point de
vue je ne m'opposerais pas à ceux qui ont proposé de signaler nos trois tombeaux par un nom
commun, et de les appeler mitliriaques, en ce sens que la Vénus babylonienne du second
tombeau est la même au fond que la Mithra persane, et le Bacchus-Sabazius du premier le
même que le Mithras persan.
L'essentiel est de distinguer ici les idées spéciales qui ont inspiré nos monuments. Or, sans
remonter aux sources primitives poury trouver dans le Mithras et le Sabazius hermaphrodites
la raison de la posture donnée à la déesse, les prêtres de la secte dont il s'agit pouvaient avoir
leurs motifs particuliers pour la choisir dans l'initiation au grade de mùes. Si, en d'autres occa-
sions, ce serait une vaine curiosité de vouloir approfondir les raisons secrètes de ces honteux
sectaires, il est nécessaire de le faire ici pour comprendre le monument et ajouter à la gloire
du christianisme. Nous ne marchons en cela qu à la suite des Pères de l Eglise, et nos motifs
seront les mêmes. Ils voulaient confondre le paganisme en révélant ses infamies, et nous avons,
nous, à répondre aux auteurs modernes qui se sont faits les patrons de sa morale.
Que veut donc dire le médaillon central? On peut désormais s en douter en se rappelant la
Cyhèle phrygienne et le culte de son fils Sabazius propagé par Orphée. ïgnore-t-on quels igno-
minieux souvenirs le nom du propagateur rappelait à Ovide (Æfeô 1. x, v. 83)? Et certes, il n'y
avait pas d'invraisemblance à reprocher les vices sans nom de la civilisation païenne au per-
sonnage supposé le chantre des aventures de Junon (^ppzTronotoüca) avec Jupiter (Lobeck,
6o6seq.), etdeCérés(<xee<T^M$ cuyyevoy.ew) avec Geleus etTriptolème (iè., 8a/Q; mais je mettrai,
si l'on veut, Orphée hors de cause, pour n'accuser que les sectaires sabaziens formés à l'école
de leur Bacchus et de leur Prosymnus, dont Arnobe a parlé. Quant à la Cyhèle phrygienne,
il y aurait à dépouiller ici plus d'une page du recueil où Lobeck (p. tooy-to2o) a transcrit
avec sagacité ce qu'ont écrit les anciens sur le culte de cette immonde divinité. Qu'il suffise
de dire que Clément d'Alexandrie a pu donner au philosophe Anacharsis une épithète infa-
mante', uniquement parce quil s'était fait initier aux mystères de Cyhèle Le culte de la.
' Profrepf., 20. A:^â<7xa\ovT^07?).:f(x?vocou. o-r^pio? Tvù p.oÙKX9:7rcxpst<7t, c'est-à-dire i7T<x!pY?xoi-E?,
3 Le scholiaste d'Aristoph. dit (Æ-. 876) : 'E-, T.ùpu- &p^,oxo7^= (Cf. Suet., Occ, 68),