INTERCALATION
RELATIVE A UNE CURIOSITÉ MONUMENTALE
QUI PREND SA SOURCE DANS LES ÉVANGILES APOCRYPHES.
Comme j'aurai à citer les évangiles apocryphes à quelques endroits du mémoire suivant,
disons-en tout de suite un mot à l'occasion d'un fait qui a déjà reparu quatre ou cinq fois
dans ces ÆrAmyay, et que le sacramentaire de Drogon mettait encore sous nos yeux tout-à-
l'heure (p. 119, sv.; peut-être même aussi p. 121).
D'abord, qu'est-ce dans l'Eglise que des livres apocryphes ? Ce sont écrits acceptés quel-
que temps par plusieurs populations chrétiennes, comme dus à l'inspiration divine, et que
l'autorité du Saint-Siège a relégués dans l'ombre après cet instant de faveur usurpée. Le
pape saint Gëlase, sur la fin du v° siècle, ht ce (/épar? entre les auteurs acceptés respectueu-
sement chez tous catholiques et ceux qu'une crédulité de mauvais aloi aurait voulu faire
entrer dans le Canon (catalogue officiel) des saintes Ecritures'. Tout titre ainsi classé parmi
les apocryphes, doit-il par là-même être considéré comme désignant un livre interdit aux
fidèles ? Pas précisément °. On l'écarte surtout des lectures publiques dans les assemblées
des chrétiens, qui risqueraient de s'accoutumer à y voir une doctrine parfaitement sûre ;
puis, mais sans aucune condamnation précise, on laisse planer le soupçon d'hétérodoxie
sur l'auteur. C'était bien assez pour les catholiques jaloux de garder leur foi, et pour s'opposer
aux résultats fâcheux d'une popularité trop tard donnée publiquement comme dangereuse.
Saint Augustin disait déjà que la grande tare de ces récits (car beaucoup d'apocryphes se
prétendent historiens) est de n'avoir pour appui aucun maître de l'enseignement primitif
qui doit nous être point fondamental de repère et j'oserai dire que ce grand esprit me
paraît bien sévère quand il croit découvrir du manichéisme là où nous pouvons nous con-
tenter devoir la virginité préférée au mariage''. Généralement les rédacteurs quelconques
de ces livres paraissent avoir la prétention de compléter l'Évangile ou les Actes des Apôtres %
et d'autres ont visé au même travail pour l'Ancien Testament. Des deux côtés, leur
succès ne m'aura point pour avocat ; mais, à mettre les choses presque au pis, quelqu'un
d'eux peut nous avoir gardé de vieux souvenirs plus ou moins authentiques.
Il est vrai que des enfantillages s'y mêlent évidemment çà et là. Mais prenons même ces
curiosités comme de simples légendes du n" siècle ou du m° (et plus d'une est au moins de
cette époque) ", cela ne vaut-il pas la peine d'être lu attentivement? ne fut-ce qu'à la façon
U Cf. Nëtawges, 1^ série, t. H, p. 88, sv.
2. Cf. Sapm, IM" série, 1.1, p. 266, notes 4 et 8.
3. De civit. Dci, xv, 23 (Opp. t. VU, p. 408).
4. Cf. VffmMas de BoMryes, § 74 (p. 133).
3. Hieronym. Prolog. commewfarw fw ÆTaM/tÆMW.
On avait un prétexte à ces continuations, dans tes paroles
de saint Jean (xxi, 23; xx, 30, sq.) qui déclare que tes écri-
vains inspirés ne se piquaient point de dire, même sur te Fits
de Dieu, tout ce qu'its avaient vu ou entendu.
6. tt a été dit avant moi que Ctément d'Atexandrie, sailli
Jérôme, saint Épiptianc, Origène, etc., partent à plusieurs
reprises de ces prétendus évangites. Saint Justin lui-même
RELATIVE A UNE CURIOSITÉ MONUMENTALE
QUI PREND SA SOURCE DANS LES ÉVANGILES APOCRYPHES.
Comme j'aurai à citer les évangiles apocryphes à quelques endroits du mémoire suivant,
disons-en tout de suite un mot à l'occasion d'un fait qui a déjà reparu quatre ou cinq fois
dans ces ÆrAmyay, et que le sacramentaire de Drogon mettait encore sous nos yeux tout-à-
l'heure (p. 119, sv.; peut-être même aussi p. 121).
D'abord, qu'est-ce dans l'Eglise que des livres apocryphes ? Ce sont écrits acceptés quel-
que temps par plusieurs populations chrétiennes, comme dus à l'inspiration divine, et que
l'autorité du Saint-Siège a relégués dans l'ombre après cet instant de faveur usurpée. Le
pape saint Gëlase, sur la fin du v° siècle, ht ce (/épar? entre les auteurs acceptés respectueu-
sement chez tous catholiques et ceux qu'une crédulité de mauvais aloi aurait voulu faire
entrer dans le Canon (catalogue officiel) des saintes Ecritures'. Tout titre ainsi classé parmi
les apocryphes, doit-il par là-même être considéré comme désignant un livre interdit aux
fidèles ? Pas précisément °. On l'écarte surtout des lectures publiques dans les assemblées
des chrétiens, qui risqueraient de s'accoutumer à y voir une doctrine parfaitement sûre ;
puis, mais sans aucune condamnation précise, on laisse planer le soupçon d'hétérodoxie
sur l'auteur. C'était bien assez pour les catholiques jaloux de garder leur foi, et pour s'opposer
aux résultats fâcheux d'une popularité trop tard donnée publiquement comme dangereuse.
Saint Augustin disait déjà que la grande tare de ces récits (car beaucoup d'apocryphes se
prétendent historiens) est de n'avoir pour appui aucun maître de l'enseignement primitif
qui doit nous être point fondamental de repère et j'oserai dire que ce grand esprit me
paraît bien sévère quand il croit découvrir du manichéisme là où nous pouvons nous con-
tenter devoir la virginité préférée au mariage''. Généralement les rédacteurs quelconques
de ces livres paraissent avoir la prétention de compléter l'Évangile ou les Actes des Apôtres %
et d'autres ont visé au même travail pour l'Ancien Testament. Des deux côtés, leur
succès ne m'aura point pour avocat ; mais, à mettre les choses presque au pis, quelqu'un
d'eux peut nous avoir gardé de vieux souvenirs plus ou moins authentiques.
Il est vrai que des enfantillages s'y mêlent évidemment çà et là. Mais prenons même ces
curiosités comme de simples légendes du n" siècle ou du m° (et plus d'une est au moins de
cette époque) ", cela ne vaut-il pas la peine d'être lu attentivement? ne fut-ce qu'à la façon
U Cf. Nëtawges, 1^ série, t. H, p. 88, sv.
2. Cf. Sapm, IM" série, 1.1, p. 266, notes 4 et 8.
3. De civit. Dci, xv, 23 (Opp. t. VU, p. 408).
4. Cf. VffmMas de BoMryes, § 74 (p. 133).
3. Hieronym. Prolog. commewfarw fw ÆTaM/tÆMW.
On avait un prétexte à ces continuations, dans tes paroles
de saint Jean (xxi, 23; xx, 30, sq.) qui déclare que tes écri-
vains inspirés ne se piquaient point de dire, même sur te Fits
de Dieu, tout ce qu'its avaient vu ou entendu.
6. tt a été dit avant moi que Ctément d'Atexandrie, sailli
Jérôme, saint Épiptianc, Origène, etc., partent à plusieurs
reprises de ces prétendus évangites. Saint Justin lui-même