Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Overview
Facsimile
0.5
1 cm
facsimile
Scroll
OCR fulltext
IiK CIÏAWIVAKÏ.

Mais en poursuivant sa lecture, il a remarqué que
le juge, lorsqu'il prononçait cet arrêt, avait les yeux
pleins de larmes, qu'il a parlé avec respect du noble
caractère et de l'admirable talent du libérateur, et
qu'ensuite il a laissé aux condamnés le choix de la
prison où ils devraient subir leur peine.; on les y a
installés dans des appartemens spacieux et aérés où
ils auront la jouissance de deux beaux jardins dont
l'un a plus de sept hectares de superficie. — Enlisant
ces détails le Vingt-Neuf-Octobre a froncé le sourcil,
a mis un crêpe à l'entente cordiale et a poussé un
soupir à faire tourner M. Pasquier ou trois girouet'
tes.

C'est que les justiciables français ne sont pas ha-
bitués à un pareil régime. Les hideuses tortures du
Mont-Saint-Michel contrastent singulièrement avec
les-douceurs du pénitencier de Richmond ; il y a loin
des appartemens spacieux à la cellule de là dernière
loi, et du jardin de sept hectares au préau de quatre
mètres carrés où cette loi philanthropique ménage à
chaque prisonnier une heure de promenade par jour.
Quant à nos magistrats, ils ne versent pas d'abon-
dantes larmes en prononçant leurs arrêts; ces mes-
sieurs se contentent de faire verser d'abondantes a-
mendes.

*%Lesprovincia uxq
séjournent à Paris, en
si grand nombre, n'ont
pas pour unique dis-
traction, comme nous
l'avons dit avant-hier,
de manger du bœuf.
Du moins, si les ma-
ris s'adonnent à la dé-
gustation variée de ce
quadrupède trop rare
clans les boucheries dé-
partementales, les da-
mes choisissent des
passetempsmoinsgros-
sièrement matériels et
où l'utile est joint à
l'agréable. Presque tou-
tes ont profité de leur séjour dans la capitale des
arts etdeM.Cellariuspour apprendre la polka dans sa
plus élégante quintessence. Les progrès ont été rapi-
des, et, il faut le dire, la province polke aujourd'hui
beaucoup mieux que Paris. Il est bien heureux pour
la capitale qu'il n'y ait plus de salons ouverts ; elle
aurait l'humiliation de s'y voir vaincue au champ
de polka par les départemens.

A défaut de salons, le Ranelagh a été choisi pour
le théâtre des défis entre le siège du gouvernement et
les chefs-lieux de préfecture. Cet établissement na-
tional est devenu le Pré-aux-Clercs des duels polkistes.

Au dernier jeudi, Paris avait pour champions plu-
sieurs couples fort habiles ; mais il a dû céder le pas
à la province,représentée par de jolies exposantes de
caoutchouc venues du Nord, plus élastiques et plus
rebondissantes que leur marchandise, et par des fa-
bricantes d'aiguilles de Laigle, fines et piquantes au
delà de tout ce que l'on peut imaginer.

Ces joutes polkantes entre Paris et les départemens
sont devenues si vives et si animées que le ministère,
alarmé de tout ce qui peut porter atteinte à la paix
quand même, voulait prendre des mesures de sûreté.
Mais l'énergique propriétaire du Ranelagh a réclamé
au nom du principe de non-intervention, et le Cabi-
net a dû admettre la libre concurrence.

Cen'est pas, du reste, la première fois que la polka
avait maille à partir avec les ordonnances de police.
M. Delessert s'était senti naguère la velléité de la pro-
hiber dans les bals publics, et même les journaux a-
vaient annoncé la chose comme faite. Mais de hautes
influences se sont mises en travers, et ont pénétré
jusque dans le conseil. La polka est étrangère, et le
ministère a cédé.

^ M. de Rambuteau ne tw*

'CE;

Nous avons reçu hier soir Ja lettre suivante, que
nous publions sous la garantie du signataire.

Monsieur le rédacteur*
Je suis étudiant en médecine, et personne, je crois, ne
peut trouver mauvais que je me permette la pipe; c'est
un moyen, comme ori sait, de dissiper les mauvaises o-
deurs des amphithéâtres et aussi d'assoupir un peu les
accès d'humeur et de colère qui parfois s'emparent de
nous au spectacle des hautes œuvres de nos gouver-
nans.

Hier donc, 1er juin, vers les dix heures et demie du
soir,je me promenais aux alentours de l'Odéon, fumant
paisiblement ma pipe, lorsquë j'a'perçus lin cercle se for-
mer autour d'une voiture de la cour stationnant devant
notre théâtre royal. Ja m'approchai, et j'appris qu'on
voulait voir tout simplement, par passe-temps, monter
en voiture une Altesse Royale. C'est un goût que je ne
blâme pas chez les autres, mais à condition qu'il me sera
permis de ne pas le partager.

J'allais donc m'éloigner, lorsqu'un individu, ne portant
aucun signe de sa dignité (pardon du mot), mais que je
reconnus tout de suite pour ce qu'il était, m'enjoignit
d'un ton brusque de cesser de fumer, et en même temps
se rua sur moi de la manière la plus brutale. A ce mo-
ment parut le duc de Nemours, et, je ne sais comment,
je fus séparé de mon agresseur. Le groupe dissipé, je
commençai à me remettre en marche, me demandant
toutefois s'il n'était plus permis à un paisible citoyen de
brûler la moindre petite cigarette dès qu'un prince pa-
raissait dans la rue,—s'il y avait quelque loi de police ou
quelque récente ordonnance qui nous enjoignît de met-
tre bas la pipe à la vue des Altesses Royales ; —si enfin
lorsqu'on nous a retranché tant de libertés, on ne vou-
lait plus même nous laisser celle de fumer.

Tout en me faisant ces questions, je me trouvai en
face de mon surveillant, et je lui demandai de quel droit
il m'avait défendu de fumer, et pour quel motif il m'a-
vait repoussé si brutalement. A ma grande surprise mon
individu me saisit au collet, avec l'assistance d'un mu-
nicipal, et aussitôt je me vis entouré par trois ou quatre
personnages à figures plus ou moins rassurantes; puis
arriva un monsieur c*eiîoré, que je pris pour un commis-
saire de police. « Quoi ! s'écria-l-il avec la plus profonde
indignation, vous avez l'audace, l'insolence de fumer de-
vant monseigneur le prince de Nemours ! Mais d'où sor-
tez-vous? où donc avez-vousété élevé? j> Et le monsieur
décoré, dans un accès d'une colère sublime, saisit ma
pipe et la brisa à ses pieds.

Interdit de tant de courroux, retenu entre les mains
des gardes et me croyant presque sous le poids d'une
accusation de lèse-majesté ou tout au moins de lèse-al-
tesse, j'allais cependant essayer de me défendre ; mais
pour couper court à mes argumens, on ordonna au fac-
tionnaire de me conduire au poste... où du moins j'ai
pu fumer tout à mon aise.

Voilà, monsieur le rédacteur, un fait qui peut paraître
exagéré ; mais j'offre de prouver au besoin la vérité de
tout ce que j'avance, et j'invoquerai le témoignage des
nombreux spectateurs qui assistaient à cette scène d'une
burlesque brutalité.

Veuillez, etc. J. Dauban, .

étudiant en médecine.

Paris, ce 2 juin 18M.

p-e représentation : le Mari à la Campagne, ou Rien
de trop, comédie en 3 actes, par MM. Rayard et
Jules de Wailly.

Nous allons commencer comme on finit ordinaire-
ment. Cettepièce a réussi; elle a été.très bien jouéepar
les comédiens français. C'est là une partie de son mé-
rite.

Provost a parfaitement grimé son rôle; Régnier a
joué le sien avec beaucoup de verve et d'entrain ;
Brindeau a valu Mégnier; et les Femmes ont valu
mieux encore. Mme Desmousseaux s'est montrée ce
qu'elle est toujours, une actrice de grand style, l'on
n'ose plus dire de haute comédie; M'nes Volnys et
Doze, qui faisaient leur rentrée au Théâtre-Français,
pas lî'demandait", ces jours ' ensemble de talent et de beauté; et les ber-

j;, Anber pourqu parterre étaient fort embarrassés du choix.

tofse^Kdemûsique s'appelle a.:. ^ £U . parfait contraste de l'autre; l'une avec sa

vous ne comprenez pas ? lui dit le maestro. — Tiens,
c'est vrai, répondit le spirituel préfet: je n'y songeais
pas. On l'appelle Conservatoire parce qu'on y donne
des concerts. »

jeu^cose^e rose, l'autre avec la maturité d'un beau
fruit; celle-ci couronnée de ses blonds cheveux com-
me la Gérés ] es champs, celle-là à la chevelure d'ébène
comme Proserjyine aux enfers ; Mlk' Doze naïve, fine

et fraîche comme une fleur éclose sous la rosée du ■
tin, M™ Volnys mûrie, brunie, dorée par un ravi
du soleil de midi; la première-enfin, jouant son3
avec tout le charme de l'ingénuité, la seconde av7
tout l'art de l'expérience ; la jeune plus naturelle m
née plus savante ; toutes deux égales en succès.'

Cela dit pour l'acquit de notre conscience et pour
la part à faire à chacun dans le triomphe qu'a obtenu
le Théâtre-Français, parlons maintenant delà m

M. Ferdinand Colombet, viveur émérite, s'est ma
riéà une jeune femme qui a le malheur d'être trou
dévote et d'avoir une mère qui l'est encore plus. Cette
mère, qui dirige sa fille,est dirigée elle-même pat-
monsieur Mathieu, abonné de Y.Unwers, c'est-à-c
ennemi né de l'Université. Il en irésulte que le i
nage de Colombet ressemble à une sacristie. Il n'y est
question que de serinons, de quêtes, de fabrique
d'offices, et seulement, de temps à autre, pour se dis!
traire, pour rire un peu, d'une partie de reversi.

Cependant arrive dans la maison un ancien ami
de Colombet, M. César de Poligny, officier de marine
donc viveur aussi,resté célibataire bien qu'amoureus
d'une certaine dame deNohent qui jouera son rôle en
temps et lieu. M. César scandalise fort,par ses allures
et ses conversations, M. Mathieu, par conséquent
la belle-mère et sa fille; et on le prie poliment de
quitter la maison. Colombet n'en peut mais ; sei
ment, avant de laisser partir son ami César, il
donne tout bas, pour le soir même, rendez-vous
Palais-Royal.

Colombet doit être mis à l'écart, loin d'un mauvais
sujet comme M. César. Soit précaution, soit punition,
sa belle-mère l'envoie le soir même à la campagne,
Dès que Colombet pèche ou pourrait pécher jon l'en-
voie à la campagne ; c'est sa manière d'être en péni-
tence. Colombet aime beaucoup à être en pénitence:
car voici ce que c'est que la campagne de Colombet.

Au second acte la scène s'ouvre chez une CélmÙM
de la rue Notre-Dame-de-Lorette, où l'on dîne 8t l'on
danse, où Colombet oublie la fabrique et le prône en-
tre le vin et l'amour. Le mari d'une dévole est l'a-
mant d'une lorette ; le mari à la campagne est lega-
lant en partie. Ce changement est adroit et sent la
comédie. Sur ces entrefaites la femme et la belle-
mère viennent chez Mme de Nohent quêter en fa-
veur des pauvres, vous devinez le reste : reconnais-
sance, péripétie et coup de théâtre. Vous devinez,
n'est-ce pas? mais ce que vous ne pouvez deviner,
c'est que M. César de Poligny est l'amant sérieux et
pour le bon motif de cette Mme de Nohent que Co-
lombet n'aime que pour rire, pour se distraire, com-
me il dit.

Donc, César, au troisième acte, qui. est le plus dé-
licat et le meilleur des trois, se ligue avec M™ Co-
lombet pour retenir M. Colombet dans sa maison,
pour le détourner de Mme de Nohent, pour '"j
procurer des distractions à domicile; et en bon ami
un peu égoïste, qui dénonce l'époux pour écarter la*
mant, il persuade à Mme Colombet de changer son
intérieur, de laisser là sa vie puritaine, de donner
des fêtes, des plaisirs à son mari chez elle, et de com-
mencer le soir même par un bal qui empêchera Colom-
bet d'aller polker chez Mme de Nohent. Ce qui se m
comme il le .dit au grand chagrin de M. Mathieu e
de la belle-mère, qui s'en vont furieux et maugréai1
comme Tartufe et M™ Pernelle, et au grand plais
de M. et M™ Colombet, de leur ami César et de»
autres jeunes amoureux dont la petite intrigue s m
tant bien que mal à la grande.

Vous comprenez tout ce qu'il y a d'ingénieux e
d'amusant, mais aussi d'impossible et d'inconvanan
dans cette pièce, qui eût été un chef-d'œuvre a
Gymnase. Le mari est un peu trop facile au prem^
acte. La comédie commence là parla charge. M
Nohent est une coquette qui est trop pure pour :
roué comme Colombet, et qui ne l'est pas assez P
un amant véritable comme M. de Poligny. «tte^
gureindécise est le plus grand vice de lap««**j
auteurs, MM. Bayard et de Wailly, ont ete mm
d'en faire presque une lorette pour poser la vie
sipée de Colombet, et presque "ne honnf6 et le
me pour amener la visite des deux dévotes j
mariage de Poligny. Us étaient là dans une im
(La suite à la ¥
Image description
There is no information available here for this page.

Temporarily hide column
 
Annotationen