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Conradin, fils de l’Empereur d’Allemagne Conrad IV et dernier rejeton de la
famille de Hohenstaufen, né en 1252, n’avait que trois ans lorsqu’il perdit son
père. Il héritait alors de la triple couronne des Etats de Germanie, de Naples et
de Sicile. Mais, à cause de son jeune âge, dépouillé de ses états par son tuteur,
Mainfroi, il vit ce prince, fils naturel de Frédéric II, profiter de la mort de son
frère Conrad pour monter sur le trône de Naples et de Sicile. Mais alors le Pape
Urbain IV, ayant excommunié Mainfroi, prêcha une croisade contre lui et donna
ses états à Charles d’Anjou, frère de notre Louis IX; et enfin Mainfroi étant mort
en combattant contre Charles, dans la plaine de Grandella, près deBénévent, en
1266, Conradin, devenu grand, prit les armes et disputa la possession du Royaume
de Naples à Charles d’Anjou. Hélas! notre jeune héros, qui comptait à peine seize
ans, fut vaincu par le prince français, à Tagliacozzo , en 1268, et, conduit à
Naples dans les prisons del Carminé, après un simulacre de jugement, il fut ame-
né un jour sur ce Largo del Mercato qu’entourent les demeures des lazzaroni,
et cruellement décapité sur ce tronçon de piperne, à l’endroit même où un simple
corroyeur du quartier fit ériger cette chapelle. Jadis les fresques représentaient
les horribles scènes de cette affreuse tragédie.
‘Conradin ne mourut pas seul dans ce jour fatal. Son cousin Frédéric de Bade,
dernier rejeton de la famille d’Hapsbourg, qui avait suivi son parti, laissa sa tête
au bourreau, après lui, et sur le même billot.
Charles I d’Anjou fit dresser une colonne de porphyre surmontée d’une croix
sur le lieu de leur supplice. Ceci était un hommage; mais ce qui devint une in-
jure fut le distique suivant que le prince fit graver sur la croix :
Asturis ungue, Léo pullum rapiens Aquilinura ,
Hic deplumavit acephalum que dédit. (1)
Voici la colonne de porphyre, la croix et l’insolent distique. Puisse le Sei-
gneur pardonner à ceux qui se servent de l’épée ! Mais pour avoir souillé sa vic-
(I) Le Lion, saisissant le petit de l’Aigle dans ses serres de vautour, ici-même, l’a déplumé et lui a
brisé la tête.
Conradin, fils de l’Empereur d’Allemagne Conrad IV et dernier rejeton de la
famille de Hohenstaufen, né en 1252, n’avait que trois ans lorsqu’il perdit son
père. Il héritait alors de la triple couronne des Etats de Germanie, de Naples et
de Sicile. Mais, à cause de son jeune âge, dépouillé de ses états par son tuteur,
Mainfroi, il vit ce prince, fils naturel de Frédéric II, profiter de la mort de son
frère Conrad pour monter sur le trône de Naples et de Sicile. Mais alors le Pape
Urbain IV, ayant excommunié Mainfroi, prêcha une croisade contre lui et donna
ses états à Charles d’Anjou, frère de notre Louis IX; et enfin Mainfroi étant mort
en combattant contre Charles, dans la plaine de Grandella, près deBénévent, en
1266, Conradin, devenu grand, prit les armes et disputa la possession du Royaume
de Naples à Charles d’Anjou. Hélas! notre jeune héros, qui comptait à peine seize
ans, fut vaincu par le prince français, à Tagliacozzo , en 1268, et, conduit à
Naples dans les prisons del Carminé, après un simulacre de jugement, il fut ame-
né un jour sur ce Largo del Mercato qu’entourent les demeures des lazzaroni,
et cruellement décapité sur ce tronçon de piperne, à l’endroit même où un simple
corroyeur du quartier fit ériger cette chapelle. Jadis les fresques représentaient
les horribles scènes de cette affreuse tragédie.
‘Conradin ne mourut pas seul dans ce jour fatal. Son cousin Frédéric de Bade,
dernier rejeton de la famille d’Hapsbourg, qui avait suivi son parti, laissa sa tête
au bourreau, après lui, et sur le même billot.
Charles I d’Anjou fit dresser une colonne de porphyre surmontée d’une croix
sur le lieu de leur supplice. Ceci était un hommage; mais ce qui devint une in-
jure fut le distique suivant que le prince fit graver sur la croix :
Asturis ungue, Léo pullum rapiens Aquilinura ,
Hic deplumavit acephalum que dédit. (1)
Voici la colonne de porphyre, la croix et l’insolent distique. Puisse le Sei-
gneur pardonner à ceux qui se servent de l’épée ! Mais pour avoir souillé sa vic-
(I) Le Lion, saisissant le petit de l’Aigle dans ses serres de vautour, ici-même, l’a déplumé et lui a
brisé la tête.