CHAPITRE VI
L'ART IMPÉRIAL. — LA TRADITION ANTIQUE
Depuis le début du ive siècle jusqu'au milieu du xve siècle, Constantinople
a été un grand centre urbain dont les ateliers ont produit une quantité considérable
d'objets d'art. Cette production intense s'explique par la présence d'une cour et
d'une classe riche qui avaient un amour effréné du luxe et de la parure. Dans ce
milieu fastueux naquit une grande école artistique. Les artisans n'étaient pas seu-
lement encouragés par les commandes de la cour et de personnages puissants et
opulents, gravitant autour du pouvoir comme des satellites ; ils pouvaient aussi
puiser à pleines mains dans les chefs-d'œuvre de l'art antique, amenés de toutes les
parties de l'empire et entassés sous leurs yeux.
Constantin le Grand ne voulut pas écarter systématiquement de sa ville épo-
nyme tous les monuments païens. Il conserva ceux qui avaient une valeur artistique
réelle et fit exposer les statues, enlevées aux temples païens, sur les places publiques,
dans les rues, à l'Hippodrome, au Grand Palais1. La nouvelle capitale chrétienne
devint ainsi une ville d'art antique où l'on ne pouvait faire un pas sans se heurter
aux images des divinités de l'Olympe. Plusieurs écrivains byzantins ont pris plaisir
à décrire les œuvres d'art qu'ils avaient sous les yeux. Le poète Christodoros, sous
le règne de l'empereur Anastase Ier (491-518), a décrit les statues qui décoraient les
thermes du Zeuxippe. Il note surtout les gestes et les attitudes, mais il n'est pas
insensible à la grâce et à la beauté classiques2. Dans la description des antiquités
de Byzance, un auteur anonyme énumère ces statues en s'efforçant d'expliquer leurs
]. Socrate, Hist. eccl., I, 16 (Migne, P. G., t. LXVIJ, p. 117); Sozomène, Hist. eccl., II, 5 (op. cit.. p. 945);
Eusèbe, Vita Constantini, III, 54 (Migne, P. G.. t. XX, p. 1117); Chronicon Paschale, p. 528; Preger, Script, orig.
Const., t. II, p. 145-146; Nicéphore Calliste, Eccl. hist-, VII, 48 (Migne, P. G., t. CXLV, p. 1325).
2. Epigrammalum Anihologia palalina, éd. Diïbner, t. I, Paris, 1864, p. 23 s.
L'ART IMPÉRIAL. — LA TRADITION ANTIQUE
Depuis le début du ive siècle jusqu'au milieu du xve siècle, Constantinople
a été un grand centre urbain dont les ateliers ont produit une quantité considérable
d'objets d'art. Cette production intense s'explique par la présence d'une cour et
d'une classe riche qui avaient un amour effréné du luxe et de la parure. Dans ce
milieu fastueux naquit une grande école artistique. Les artisans n'étaient pas seu-
lement encouragés par les commandes de la cour et de personnages puissants et
opulents, gravitant autour du pouvoir comme des satellites ; ils pouvaient aussi
puiser à pleines mains dans les chefs-d'œuvre de l'art antique, amenés de toutes les
parties de l'empire et entassés sous leurs yeux.
Constantin le Grand ne voulut pas écarter systématiquement de sa ville épo-
nyme tous les monuments païens. Il conserva ceux qui avaient une valeur artistique
réelle et fit exposer les statues, enlevées aux temples païens, sur les places publiques,
dans les rues, à l'Hippodrome, au Grand Palais1. La nouvelle capitale chrétienne
devint ainsi une ville d'art antique où l'on ne pouvait faire un pas sans se heurter
aux images des divinités de l'Olympe. Plusieurs écrivains byzantins ont pris plaisir
à décrire les œuvres d'art qu'ils avaient sous les yeux. Le poète Christodoros, sous
le règne de l'empereur Anastase Ier (491-518), a décrit les statues qui décoraient les
thermes du Zeuxippe. Il note surtout les gestes et les attitudes, mais il n'est pas
insensible à la grâce et à la beauté classiques2. Dans la description des antiquités
de Byzance, un auteur anonyme énumère ces statues en s'efforçant d'expliquer leurs
]. Socrate, Hist. eccl., I, 16 (Migne, P. G., t. LXVIJ, p. 117); Sozomène, Hist. eccl., II, 5 (op. cit.. p. 945);
Eusèbe, Vita Constantini, III, 54 (Migne, P. G.. t. XX, p. 1117); Chronicon Paschale, p. 528; Preger, Script, orig.
Const., t. II, p. 145-146; Nicéphore Calliste, Eccl. hist-, VII, 48 (Migne, P. G., t. CXLV, p. 1325).
2. Epigrammalum Anihologia palalina, éd. Diïbner, t. I, Paris, 1864, p. 23 s.