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Galerie contemporaine, littéraire, artistique — 3. Année, 2 Semestre.1878

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Mgr Dupanloup
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https://doi.org/10.11588/diglit.55262#0061
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AUTOGRAPHE DE M. COULLIÉ






MGR DUPANLOUP

onseigneur Dupanloup avait sa place marquée
d’avance dans cette galerie. Voici que la Mort s’est
chargée de donner comme une navrante actua-
lité à cette imposante figure. Même éclairée par
cette lumière dernière, cette individualité est
difficile à peindre. Mêlée de très près aux évé-
nements contemporains, cette personnalité reste encore comme
flottante au milieu de la fumée du champ de bataille. Sans doute,
d’unanimes respects ont escorté jusqu’à la tombe ce prélat intré-
pide dont ses ennemis même n’ont jamais attaqué l’austérité;
mais le jugement sur le rôle de l’homme public diffère, et, par
ces différences, indique l’anarchie présente des esprits, accentue
bien le caractère particulier des luttes actuelles qui sont, les trois
quarts du temps, des luttes d’aveugles, tapant comme des sourds
et se battant à tâtons dans l’obscurité.
Avant nous, bien des écrivains, se sont essayés au portrait
que nous entreprenons et nous ont retracé quelques traits du
grand évêque d’Orléans. Jamais, dirions-nous volontiers, on
n’a saisi dans son ensemble cette nature, qui n’était, à coup
sûr, ni ondoyante, ni diverse, mais qui était multiple ou plutôt
triple, qui s’était vouée à trois apostolats et qui a déployé
pour chaque apostolat les qualités particulières qu’il fallait
pour cette tâche spéciale. Il y avait trois hommes, encore une
fois, dans Mgr Dupanloup : un maître d’école incomparable,
un évêque infatigable, un lettré accompli. Ces trois fonctions
distinctes avaient évidemment un foyer commun : l’amour du
Vrai, du Bien et du Beau; elles concouraient au même but:
le triomphe de la Vérité immuable, et néanmoins, dans cet
esprit merveilleusement équilibré, elles ne se confondaient point
entre elles. Le maître était toujours le même, c’était Dieu.
Mais il avait dans Mgr Dupanloup trois serviteurs différents...
Dire de Mgr Dupanloup qu’il était un maître d’école sans
égal n’est certes point le rabaisser, c’est lui donner peut-être la

louange à laquelle il tenait le plus. L’expression d’élever la jeunesse
avait, pour celui qui a si éloquemment parlé du sens véritable des
mots, son acception exacte et réelle. Les élever, pour lui, c’était
les faire monter, c’était rapprocher des esprits en formation de
l’éternel idéal, c’était prendre des êtres faibles par la main et les
emporter vers les sommets par la force de son amour. Nul n’a in-
diqué dans un style plus splendide un plus magnifique programme
d’éducation que l’auteur de tant de livres, de tant de brochures,
de tant de lettres, destinées à définir toujours la mission de
l’enseignement, cette mission, en quelque sorte infinie, comme
l’horizon qu’elle entr’ouvre devant l’âme humaine. Nul sur ce
point ne s’est moins perdu dans les théories creuses, dans le
vague des périodes brillantes, dans les conceptions séduisantes
et irréalisables. Derrière l’écrivain apparaissait un organisateur
d’une étonnante habileté, un homme très-pratique, très-prudent
et très-ferme, qui voyait tout, parce qu’il regardait tout de haut.
C’est à La Chapelle-Saint-Mesmin, au milieu de ses enfants,
c’est-à-dire de son petit séminaire, qu’il était intéressant d’étudier
Mgr Dupanloup. Ilavait appliqué là le résultat de méditations pour-
suivies pendant de longues années; il changeait en un éden cette
école dont tant d’autres font une prison; il s’était ingénié de mille
façons à prouver à tous ces jeunes gens qui naissent à la vie, que le
bonheur est dans la discipline et dans l’ordre. On imaginait, en
franchissant ce seuil, Fénelon mettant lui-même en pratique ses
théories; et, en réalité, c’étaient autant de petits ducs de Bour-
gogne que ces enfants, les uns riches et les autres pauvres; on
n’aurait pas veillé avec une plus attentive sollicitude sur leur déve-
loppement intellectuel et moral s’ils avaient dû occuper un
trône. En vrai socialiste chrétien, Mgr Dupanloup ne distinguait
point entre des âmes que Dieu a toutes créées pour le servir et
pour l’aimer.
Un modeste pavillon, presque en ruines, qui assista au dix-hui-
tième siècle à de galants rendez-vous, est attenant au petit sémi-
 
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