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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 21.1880

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Nr. 2
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Chantelou, Paul Fréart de; Lalanne, Ludovic [Hrsg.]: Journal du voyage du cavalier Bernin en France, [11]
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https://doi.org/10.11588/diglit.22841#0201
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190

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

ments; que si l’on les élevait davantage, on pourrait faire des voûtes au second
étage comme au premier, pour ce que les murs, pour la charge que donne
cette élévation, seraient capables de résister à la poussée des voûtes.

Le dernier (31), nous sommes allés, mon frère et moi, voir le Cavalier. 11
a dit à mon frère qu’il y avait déjà du temps que Mathie était allé au Louvre
pour commencer l’alignement des fondations; ce que mon frère ayant entendu,
il s’y en est allé aussitôt. A quelque temps de là, Vigarani est venu, le Cava-
lier, le voyant avec moi, s’est approché sans le regarder, et m’a dit
que j’avertisse le signor Vigarani, quand je le verrais; qu’il était jeune,
qu’il fallait qu’il travaillât et préparât les choses toutes prêtes pour les occa-
sions, pour n’être pas accablé par après ; et cela toujours ne le regardant
point; puis tout à coup s’est tourné de son côté, et, ayant paru surpris de le
voir, il l’a salué. Vigarani lui a dit qu’il était venu le prier de dire son avis
d’un tableau que M. Nocret1 allait lui faire apporter, que Lebrun disait être
de Michel-Ange, et Errard de Raphaël. Le Cavalier a dit qu’il le verrait volon-
tiers; que, pourvu qu’il fût de l’un ou de l’autre ou des sept ou huit grands
maîtres, il espérait pouvoir dire de qui il est ; qu’il y avait une quantité de
Lombards peu signalés, dont peut-être ne connaîtrait-il. pas la manière. Il a,
à ce propos, conté un trait d'une de ses comédies, et a dit qu’une fille s’étant
déguisée en garçon, et ayant trouvé quelqu’un de sa connaissance, elle eut
peur d’en être reconnue; et quelqu’un lui demanda si conosce, et que la fille,
sans s’étonner, lui repartit : Si la ‘più difficile cosa è conoscersi, non mi
conosco1 2.

L’après-dîner, il a travaillé à son buste, en attendant le Roi, mais Sa
Majesté n’est point venue. Nocret est venu avec son tableau, qu’il a dit avoir
apporté de Portugal, quand il y fut avec M. de Cominges3. C’est un Saint
Jean au désert. On l’a placé dans l’autre salle à la meilleure lumière qu’on
a pu. Avant que de le faire voir au Cavalier, j’ai voulu en dire mon sentiment;
et l’ayant pour cela examiné, et ayant vu qu’il n’avait rien ni du dessin ni du
peindre de Raphaël, qu’au contraire il tenait davantage de la manière de
Michel-Ange, j’ai dit, le voyant assez bien peint, qu’il pouvait être de frà
Sebastiano del Piombo. Après cela, ayant appelé le Cavalier et lui ayant dit
mon avis, le sien a été de même ; mais il m’a dit à l’oreille que Michel-Ange
n’aurait jamais dessiné une cuisse raccourcie, comme celle qu’il voyait là. 11 a
beaucoup loué le reste, et a fait beaucoup d’accueil à Nocret.

Le soir, il n’a point voulu sortir et m’a prié d’aller au Louvre voir ce qui
avait été fait. Je m’y en suis allé avec mon frère, et là le signor Mathie nous
a montré que l’alignement que Levau avait pris pour le Louvre était faux en
deux divers endroits, à la face de devant : l’angle rentrant, qui est du côté
des PP. de l’Oratoire, n’étant pas égal et ne répondant pas aux deux autres,
savoir à celui du côté de l’eau et à celui vers où est le logement de M. le

1. Jean Nocret, peintre et valet de chambre du Roi, membre de l’Académie (1663), né à
Nancy en 1012, mort à Paris le 12 novembre 1072.

2. w Comme se connaître soi-méme est la chose la plus difficile, je ne me connais pas. »

3. Gaston-Jean-Baptiste de Cominges, capitaine des gardes du corps de la Reine mère, avait
été envoyé en ambassade extraordinaire en Portugal, en 1057.
 
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