Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 21.1880

DOI Heft:
Nr. 2
DOI Artikel:
Chantelou, Paul Fréart de; Lalanne, Ludovic [Hrsg.]: Journal du voyage du cavalier Bernin en France, [11]
DOI Seite / Zitierlink: 
https://doi.org/10.11588/diglit.22841#0200

DWork-Logo
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
JOURNAL DU VOYAGE DU CAVALIER BERNIN EN FRANCE. 189

afin de faire choix de la manière qui réussirait la meilleure1 2. L’on a proposé
de faire ouverture dans quelque maçonnerie ancienne et moderne pour con-
naître la force et bonté de la chaux. M. Colbert a fait ensuite appeler Mazière
et Bergeron, leur a ordonné de faire venir le lendemain des matériaux dans
la basse-cour de l’hôtel Mazarin, et de mettre au Louvre trente ou quarante
hommes à préparer les fondation®; a commandé à M. Perrault d’avertir M. du
Buisson d'apporter ses titres; a dit, quant au Petit-Bourbon, qu’il fallait le
laisser à cause des meubles du Roi, et après l’on s’est levé qu’il était près
d’une heure après midi.

L’après-dîner, le Cavalier a dit qu’il aurait bien voulu aller aux Gobelins.
Je lui ai répondu qu’il était dimanche et qu’à pareil jour l’on n’y verrait rien.
Il a dit qu’il verrait le seigneur Le Brun, qu’il me priait d’envoyer voir s’il y
était, ce que j’ai fait, et il ne s’y est pas trouvé, de sorte qu’il s’est mis à
travailler avec le signor Mathie; puis nous sommes allés aux Feuillants.

Au retour, il m’a demandé qui étaient tous ces sovraslanti-. Je lui ai dit
que l’un était mon frère, lequel n’avait pas cherché cet emploi, que son
humeur était fort éloignée d’en briguer aucun, qu’il ne demandait plus que
le repos et le divertissement qu’il trouvait dans son cabinet, étant d’un tem-
pérament fort délicat et qu’il avait encore affaibli par l’étude, l’application
aux mathématiques et une vie sédentaire. Pour M. Madiot, qu’il n’était pas
intelligent comme mon frère dans la théorie, mais qu’il l’était bien davan-
tage dans la pratique, connaissant bien tous les matériaux ; que c’était un
homme de grande fidélité et en qui M. De Noyers, qui avait été surintendant
des bâtiments, avait autrefois grande confiance; que, d’ailleurs, il était ingé-
nieur et avait été employé aux fortifications. Il m’a prié de l’envoyer quérir,
ce que j’ai fait, et lui et mon frère sont venus. Le Cavalier a discouru long-
temps avec eux de la qualité des pierres, de la chaux, du sable, des voûtes,
de la qualité de la maçonnerie. Il a demandé si l’on fait ici des voûtes au
second étage. M. Madiot lui a répondu que non. Le Cavalier a reparti que
cela venait sans doute de ce qu’on ne donnait pas assez d’élévation aux bâti-

1. « Bernin, dit Perrault, fit. venir do Rome des murateurs, c’est ainsi que l’on nomme
en cette ville ceux que nous appelons ici dos maçons, prétendant que nous n’entendions rien
à bütir. 11 voulait qu’on observât deux choses, qu’il est bon de pratiquer en Italie, où l’on se
sert de possolane au lieu de sable, mais qui ne valent rien en ce pays : la première, d’employer
le moellon dans les fondations sans le dresser un peu avec le marteau et le poser par assises,
mais tel qu’il se présente et sans aucun arrangement. <■ C’est, disait-il, qu’étant jeté à l’aven-
ture, il fait une meilleure liaison avec le mortier et un corps plus solide. « En second lieu,
il voulait qu’on mouillât le moellon en le mettant en œuvre. Nos entrepreneurs soutenaient
rigoureusement le contraire, en sorte qu’il fut résolu qu’on forait un essai des deux construc-
tions dans la place du palais Mazarin. Les murateurs bâtirent à leur manière deux murs de
cinq â six pieds de haut, sur lesquels ils firent une voûte de la même construction que les
murs, c’est-à-dire des moellons posés à l’aventure. Nos entrepreneurs élevèrent des murs de la
même hauteur et construisirent au-dessus une voûte de la môme forme et figure que celle des
Italiens avec les mêmes matériaux, mais employés à la manière qu’on le pratique en France.
L’hiver ayant passé sur ces deux édifices, la voûte italienne tomba d’elle-même au premier
dégel, et la française demeura ferme et se trouva plus forte qu’elle n’était quand ils l’ache-
vèrent. Les murateurs furent fort étonnés et s’en prirent à la gelée, qui avait tout gâté, comme
si c’était une chose fort extraordinaire qu’il gelât en hiver. » (Mémoires, liv. II, p. 82-83).

2. Surintendants.
 
Annotationen