DOI issue:
Nr. 1
DOI article:Bonnaffé, Edmond: Gay, Victor, Le glossaire archéologique du Moyen Âge et de la Renaissance: [Rezension]
DOI Page / Citation link:https://doi.org/10.11588/diglit.24585#0090
LE GLOSSAIRE ARCHÉOLOGIQUE.
83
Savoie, tendue de velours vert « à entretaillures de toile d’or et d’argent
filé ; » celle de l’archiduchesse d’Autriche, au château de Blois, de drap
d’or frisé rouge et noir. Voici le lit avec sa garniture, la toilette avec
tous ses accessoires, et le reste ; car ces vieux
inventaires sont d’une indiscrétion !
« Avant le xvne siècle, dit M. Gav, le mo-
bilier proprement dit est très sommaire ; les ten-
tures et la literie composent à peu près seules
le parement des demeures privées. » Mon savant
confrère me permettra de n’être pas tout à fait
de son avis et j’en appelle au Glossaire lui-même,
qui consacre des notices détaillées au banc, à
la chaise, au buffet, au coffre, à l’armoire,
meubles qui, de tout temps et sous différents
noms, ont composé le mobilier essentiel du plus
mince bourgeois. Je conviens que nous possé-
dons peu de spécimens antérieurs au xvr siècle;
les vers et le feu se sont chargés de les faire
disparaître. Mais il en reste encore au Louvre, à
Cluny et ailleurs ; les vieilles miniatures montrent
des intérieurs très suffisamment garnis; j’ajou-
terai que la plupart des sièges, qui tiennent une
si grande place dans l’ameublement moderne,
étaient remplacés jadis par des carreaux ou
coussins posés sur le sol et destinés aux jeunes
femmes, « carreaux pour asseoir les femmes qui
surviennent; » or ces coussins n’existent plus. Entre la prétendue pénu-
rie des meubles et les restitutions luxueuses imaginées par M. Viollet-
le-Duc, il y a un juste milieu. Ces bourgeois du moyen âge entendaient
fort bien leurs aises; toutes les variétés de la chaire indiquées par le Glos-
saire, la chaire brisée, la cacquetoire ou causeuse, la chaire de Flandre,
la chaire roulante, les chaires à laver, à pigner (peigner), à atourner
supposent la notion d’un confort très avancé et fort bien entendu.
Je trouve même dans le Glossaire le mot canapé; il est vrai que l’au-
teur le fait naître au milieu du xvne siècle et n’en connaît pas, dit-il,
l’étymologie. En effet, le mot, dans sa forme actuelle, est moderne, mais
on le rencontre bien antérieurement dans sa forme primitive de cono-
pée-, il signifie alors le dais honorifique, xwvwtïsiov et conopœum, recou-
vrant le siège à deux places. Rabelais dit quelque part : « Entre les pré-
cieux conopées, entre les courtines dorées »; Cotgrave donne également
CHATRE D’ENFANT,
XVe SIÈCLE.
(Appartient à M. Em. Peyre.
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Savoie, tendue de velours vert « à entretaillures de toile d’or et d’argent
filé ; » celle de l’archiduchesse d’Autriche, au château de Blois, de drap
d’or frisé rouge et noir. Voici le lit avec sa garniture, la toilette avec
tous ses accessoires, et le reste ; car ces vieux
inventaires sont d’une indiscrétion !
« Avant le xvne siècle, dit M. Gav, le mo-
bilier proprement dit est très sommaire ; les ten-
tures et la literie composent à peu près seules
le parement des demeures privées. » Mon savant
confrère me permettra de n’être pas tout à fait
de son avis et j’en appelle au Glossaire lui-même,
qui consacre des notices détaillées au banc, à
la chaise, au buffet, au coffre, à l’armoire,
meubles qui, de tout temps et sous différents
noms, ont composé le mobilier essentiel du plus
mince bourgeois. Je conviens que nous possé-
dons peu de spécimens antérieurs au xvr siècle;
les vers et le feu se sont chargés de les faire
disparaître. Mais il en reste encore au Louvre, à
Cluny et ailleurs ; les vieilles miniatures montrent
des intérieurs très suffisamment garnis; j’ajou-
terai que la plupart des sièges, qui tiennent une
si grande place dans l’ameublement moderne,
étaient remplacés jadis par des carreaux ou
coussins posés sur le sol et destinés aux jeunes
femmes, « carreaux pour asseoir les femmes qui
surviennent; » or ces coussins n’existent plus. Entre la prétendue pénu-
rie des meubles et les restitutions luxueuses imaginées par M. Viollet-
le-Duc, il y a un juste milieu. Ces bourgeois du moyen âge entendaient
fort bien leurs aises; toutes les variétés de la chaire indiquées par le Glos-
saire, la chaire brisée, la cacquetoire ou causeuse, la chaire de Flandre,
la chaire roulante, les chaires à laver, à pigner (peigner), à atourner
supposent la notion d’un confort très avancé et fort bien entendu.
Je trouve même dans le Glossaire le mot canapé; il est vrai que l’au-
teur le fait naître au milieu du xvne siècle et n’en connaît pas, dit-il,
l’étymologie. En effet, le mot, dans sa forme actuelle, est moderne, mais
on le rencontre bien antérieurement dans sa forme primitive de cono-
pée-, il signifie alors le dais honorifique, xwvwtïsiov et conopœum, recou-
vrant le siège à deux places. Rabelais dit quelque part : « Entre les pré-
cieux conopées, entre les courtines dorées »; Cotgrave donne également
CHATRE D’ENFANT,
XVe SIÈCLE.
(Appartient à M. Em. Peyre.