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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
d’orfèvrerie. Comme ce personnage dont parle le Glossaire, il « ne fut
oncques de mestier, mais estoit tant subtil et imaginatif que il fai soit
orfèvrerie d’or et d’argent, esmailleries et autres choses se comme il eust
esté maistre. »
La fabrication, le commerce, l’usage des étoffes forment une des par-
ties les plus neuves et les plus attrayantes du livre. L’auteur, qui recher-
che depuis longtemps les échantillons
les plus rares pour les observer à loi-
sir, nous explique par le menu ce qu’on
entendait par Yarrnoisin, seul taffetas
permis aux femmes du peuple, Yal-
tobas, velours ciselé à relief, Yatabi de
soie, la biffe, le bofu, la bombasine
dont on fabriquait les voiles des ga-
lères, le baudequin ou drap d’outre-
mer, le camelot que saint Louis portait
en été, le cendal rouge qui servait à
confectionner les capes des cardinaux
et l’oriflamme de Saint-Denis. Puis
vient la broderie et ses innombrables variétés, broderie billetèe, velue,
collée, couchée, hachée, nattée, nuée, plate, pourfilée, récamée, refendue
au point de poil, broderie cordelière, de nonnains, de lihodes, de
Chypre, de Chio, de Venise, de Cologne, d’A ngleterre, à.’Espagne, etc.
A ce chapitre se rattache l’histoire du vêtement. Comme on le pense
bien, les détails piquants ne manquent pas sur la toilette et la parure des
élégantes; en 1Aô7, dans la ville d’Arras, « Jehanne Lenglesse, attour-
neresse et achemeresse (femme d’atour, coiffeuse) des dames de noce »,
était si renommée dans son art, qu’elle fut « mise sur un char et menée
par tous les carrefours de la ville ». Je n’ai pas entendu dire que Ton ait
encore porté en triomphe nos coiffeurs et nos couturiers à la mode, mais
cela viendra, n’en doutez pas. Le Glossaire donne un premier acompte
d’informations sur le costume et ses accessoires, Yaumonière, la chaîne,
la ceinture, la boucle d’oreille, le bracelet ■ le reste viendra plus tard.
Comme le vêtement, le mobilier est une des expressions les plus signi-
ficatives de la vie privée. Je l’ai dit ailleurs : « Nous façonnons nos meubles
à notre image, ils gardent nos plis; leurs variétés, leurs destinations mul-
tiples correspondent à tous les incidents de la vie usuelle, les expliquent,
les commentent. L’inventaire d’un mobilier est le tableau de l’intimité
prise sur le vif. » Le glossaire nous fait visiter tour à tour la chambre de
Catherine de Bourgogne, tendue de satin bleu brodé; celle de Louise de
FIN DU xve siècle. — (Collection V. Gay.)
GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
d’orfèvrerie. Comme ce personnage dont parle le Glossaire, il « ne fut
oncques de mestier, mais estoit tant subtil et imaginatif que il fai soit
orfèvrerie d’or et d’argent, esmailleries et autres choses se comme il eust
esté maistre. »
La fabrication, le commerce, l’usage des étoffes forment une des par-
ties les plus neuves et les plus attrayantes du livre. L’auteur, qui recher-
che depuis longtemps les échantillons
les plus rares pour les observer à loi-
sir, nous explique par le menu ce qu’on
entendait par Yarrnoisin, seul taffetas
permis aux femmes du peuple, Yal-
tobas, velours ciselé à relief, Yatabi de
soie, la biffe, le bofu, la bombasine
dont on fabriquait les voiles des ga-
lères, le baudequin ou drap d’outre-
mer, le camelot que saint Louis portait
en été, le cendal rouge qui servait à
confectionner les capes des cardinaux
et l’oriflamme de Saint-Denis. Puis
vient la broderie et ses innombrables variétés, broderie billetèe, velue,
collée, couchée, hachée, nattée, nuée, plate, pourfilée, récamée, refendue
au point de poil, broderie cordelière, de nonnains, de lihodes, de
Chypre, de Chio, de Venise, de Cologne, d’A ngleterre, à.’Espagne, etc.
A ce chapitre se rattache l’histoire du vêtement. Comme on le pense
bien, les détails piquants ne manquent pas sur la toilette et la parure des
élégantes; en 1Aô7, dans la ville d’Arras, « Jehanne Lenglesse, attour-
neresse et achemeresse (femme d’atour, coiffeuse) des dames de noce »,
était si renommée dans son art, qu’elle fut « mise sur un char et menée
par tous les carrefours de la ville ». Je n’ai pas entendu dire que Ton ait
encore porté en triomphe nos coiffeurs et nos couturiers à la mode, mais
cela viendra, n’en doutez pas. Le Glossaire donne un premier acompte
d’informations sur le costume et ses accessoires, Yaumonière, la chaîne,
la ceinture, la boucle d’oreille, le bracelet ■ le reste viendra plus tard.
Comme le vêtement, le mobilier est une des expressions les plus signi-
ficatives de la vie privée. Je l’ai dit ailleurs : « Nous façonnons nos meubles
à notre image, ils gardent nos plis; leurs variétés, leurs destinations mul-
tiples correspondent à tous les incidents de la vie usuelle, les expliquent,
les commentent. L’inventaire d’un mobilier est le tableau de l’intimité
prise sur le vif. » Le glossaire nous fait visiter tour à tour la chambre de
Catherine de Bourgogne, tendue de satin bleu brodé; celle de Louise de
FIN DU xve siècle. — (Collection V. Gay.)