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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
Scènes de la vie de Dacchus de M. H. Royer, pour la Vénus et l’Amour
de M. Gervex dont la filiation artistique ne remonte pas plus haut
que le xvme siècle. En somme, c’est l’ancienne et classique « acadé-
mie » qui continue à régner paisiblement en dépit de toutes les révo-
lutions et dont le règne durera sans doute aussi longtemps que
la peinture elle-même, parce qu’elle en est la chair et le sang. Il est
seulement curieux de constater, par les titres qu’on donne à ces
figures ou par les accessoires dont on les entoure, les influences
diverses que subissent les peintres modernes. Nous venons de voir
la troupe des noms mythologiques. Voici maintenant les allégories
ou les symboles poétiques. M. Duez jette une boite d’herboriste à côté
d’une femme nue couchée dans l'herbe pour pouvoir l’appeler la
Botanique; M. Michel Lançon met un arbre en fleurs au fond de son
pastel et l’intitule Printemps; M. Point entoure un profil féminin de
fleurs pâles et y voit une Vision nocturne ; M. Ménard présente un
groupe de trois femmes nues dans une prairie et c’est Y Aube; le même
peint un robuste veilleur entretenant le feu auprès de ses compa-
gnons pittoresquement endormis au coin d’un bois, et c’est l'Har-
monie du soir. M. Fourié, mis en goût par la Femme au taureau de
M. Roll, étudie un corps nu de femme couché dans l'herbe et plaqué
de taches lumineuses par le soleil filtrant Sous les branches. Enfin
M. Picard répète le même modèle aux yeux bleus et froidement
clairs dans une série de toiles d’un style original et très étudié,
mais ce sera tantôt Stella, tantôt une Vision, tantôt le Sommeil, etc.
Au fond, c’est la grande tradition venue de l’antiquité qui domine
toutes ces œuvres et, dans ce cadre éternel, chacun met ses formes
préférées ou ses souvenirs d’école. La Bain de M. Fantin-Latour unit
au souvenir des peintures pompéiennes un esprit de romantisme
resté fidèle à Delacroix ; la Lucica de M. Carolus Duran s’ingénie à
rappeler les blondeurs vénitiennes; l’Etude de M. Doucet et le pastel
de M. Axilette nous transportent dans le monde le plus moderne.
D’apparence, ces peintres semblent aussi divers que possible'; leurs
origines artistiques sont les mêmes.
la peinture symbolique et religieuse. :— Si quelque chose atteste
la vitalité profonde de l’art contemporain, c’est assurément l’essor
inattendu, dans notre société utilitaire et mondaine, de la peinture
symbolique; phénomène que nous signalions plus haut comme une
GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
Scènes de la vie de Dacchus de M. H. Royer, pour la Vénus et l’Amour
de M. Gervex dont la filiation artistique ne remonte pas plus haut
que le xvme siècle. En somme, c’est l’ancienne et classique « acadé-
mie » qui continue à régner paisiblement en dépit de toutes les révo-
lutions et dont le règne durera sans doute aussi longtemps que
la peinture elle-même, parce qu’elle en est la chair et le sang. Il est
seulement curieux de constater, par les titres qu’on donne à ces
figures ou par les accessoires dont on les entoure, les influences
diverses que subissent les peintres modernes. Nous venons de voir
la troupe des noms mythologiques. Voici maintenant les allégories
ou les symboles poétiques. M. Duez jette une boite d’herboriste à côté
d’une femme nue couchée dans l'herbe pour pouvoir l’appeler la
Botanique; M. Michel Lançon met un arbre en fleurs au fond de son
pastel et l’intitule Printemps; M. Point entoure un profil féminin de
fleurs pâles et y voit une Vision nocturne ; M. Ménard présente un
groupe de trois femmes nues dans une prairie et c’est Y Aube; le même
peint un robuste veilleur entretenant le feu auprès de ses compa-
gnons pittoresquement endormis au coin d’un bois, et c’est l'Har-
monie du soir. M. Fourié, mis en goût par la Femme au taureau de
M. Roll, étudie un corps nu de femme couché dans l'herbe et plaqué
de taches lumineuses par le soleil filtrant Sous les branches. Enfin
M. Picard répète le même modèle aux yeux bleus et froidement
clairs dans une série de toiles d’un style original et très étudié,
mais ce sera tantôt Stella, tantôt une Vision, tantôt le Sommeil, etc.
Au fond, c’est la grande tradition venue de l’antiquité qui domine
toutes ces œuvres et, dans ce cadre éternel, chacun met ses formes
préférées ou ses souvenirs d’école. La Bain de M. Fantin-Latour unit
au souvenir des peintures pompéiennes un esprit de romantisme
resté fidèle à Delacroix ; la Lucica de M. Carolus Duran s’ingénie à
rappeler les blondeurs vénitiennes; l’Etude de M. Doucet et le pastel
de M. Axilette nous transportent dans le monde le plus moderne.
D’apparence, ces peintres semblent aussi divers que possible'; leurs
origines artistiques sont les mêmes.
la peinture symbolique et religieuse. :— Si quelque chose atteste
la vitalité profonde de l’art contemporain, c’est assurément l’essor
inattendu, dans notre société utilitaire et mondaine, de la peinture
symbolique; phénomène que nous signalions plus haut comme une