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GAZETTE DES BEAUX-ARTS
triple indication du poids de la phiale avec Yemblema, de la phiale
seule et de Yemblema seul U Détacher Yemblema pour le placer
sur une autre coupe faite à la mode du jour, était une habitude
fréquente chez les Romains, et tout amateur de marque avait à ses
gages un ou plusieurs orfèvres chargés de ce travail. Ces artistes
faisaient aussi la restauration des pièces anciennes détériorées;
car on donnait au repoussé une saillie si prononcée et, par suite,
l'enveloppe métallique était tellement amincie, que le frottement
résultant du nettoyage suffisait à la longue pour bossuer ou enta-
mer les surfaces. Ces reliefs extraordinaires, qui font déborder outre
mesure le motif,
Argentum vêtus, et stantem extra pocula caprum,
dit Juvénal1 2, attestent, ce que nous savons déjà, une prodigieuse
habileté de main; mais, si je ne me trompe, les spécimens de ce
genre sont plutôt l’œuvre d’artistes romains ou d’artistes grecs tra-
vaillant à Rome. Les vases d’origine grecque sans mélange ont
des reliefs plus discrets.
L’orfèvre restaurateur se chargeait encore de fabriquer pour son
maître la vaisselle neuve. « 0 mes petits Lares, s’écrie un person-
nage de Juvénal3, vingt mille sesterces de rente sur bonne hypo-
thèque, nn peu d’argenterie tout unie. voilà tout ce que je vous
demande. Joigncz-y un ciseleur bien intelligent et un modeleur
pour lui tailler la besogne, c’en est assez pour un homme qui doit
toujours rester pauvre. »
Naturellement, la vieille argenterie était la plus recherchée,
surtout quand elle portait la signature de Boethus, de Mentor,
d’Acragas, de Mys, ou de Praxitèle, non pas le grand sculpteur, mais
un homonyme, contemporain de Pompée. Parmi les modernes, on
comptait des orfèvres renommés, romains ou grecs, installés à
Rome et dans la Grande Grèce. Les ateliers alexandrins n’étaient
pas moins célèbres, et la phiale de Bosco Rcale, qui représente la
1. Gazette, t. XIII, p. 94. Nolice de M. de Villefosse.
2. Sat. I. Voir aussi la description que fait Martial, vin, 51, d’une phiale que
lui a donnée son ami Instantius Rufus.
3. IX. Juvénal, comme Martial, Pétrone et Pline, est un contemporain
de l’amateur de Bosco Reale. Martial, 43-102; Juvénal, 42-120 ; Pline, 23-79.
GAZETTE DES BEAUX-ARTS
triple indication du poids de la phiale avec Yemblema, de la phiale
seule et de Yemblema seul U Détacher Yemblema pour le placer
sur une autre coupe faite à la mode du jour, était une habitude
fréquente chez les Romains, et tout amateur de marque avait à ses
gages un ou plusieurs orfèvres chargés de ce travail. Ces artistes
faisaient aussi la restauration des pièces anciennes détériorées;
car on donnait au repoussé une saillie si prononcée et, par suite,
l'enveloppe métallique était tellement amincie, que le frottement
résultant du nettoyage suffisait à la longue pour bossuer ou enta-
mer les surfaces. Ces reliefs extraordinaires, qui font déborder outre
mesure le motif,
Argentum vêtus, et stantem extra pocula caprum,
dit Juvénal1 2, attestent, ce que nous savons déjà, une prodigieuse
habileté de main; mais, si je ne me trompe, les spécimens de ce
genre sont plutôt l’œuvre d’artistes romains ou d’artistes grecs tra-
vaillant à Rome. Les vases d’origine grecque sans mélange ont
des reliefs plus discrets.
L’orfèvre restaurateur se chargeait encore de fabriquer pour son
maître la vaisselle neuve. « 0 mes petits Lares, s’écrie un person-
nage de Juvénal3, vingt mille sesterces de rente sur bonne hypo-
thèque, nn peu d’argenterie tout unie. voilà tout ce que je vous
demande. Joigncz-y un ciseleur bien intelligent et un modeleur
pour lui tailler la besogne, c’en est assez pour un homme qui doit
toujours rester pauvre. »
Naturellement, la vieille argenterie était la plus recherchée,
surtout quand elle portait la signature de Boethus, de Mentor,
d’Acragas, de Mys, ou de Praxitèle, non pas le grand sculpteur, mais
un homonyme, contemporain de Pompée. Parmi les modernes, on
comptait des orfèvres renommés, romains ou grecs, installés à
Rome et dans la Grande Grèce. Les ateliers alexandrins n’étaient
pas moins célèbres, et la phiale de Bosco Rcale, qui représente la
1. Gazette, t. XIII, p. 94. Nolice de M. de Villefosse.
2. Sat. I. Voir aussi la description que fait Martial, vin, 51, d’une phiale que
lui a donnée son ami Instantius Rufus.
3. IX. Juvénal, comme Martial, Pétrone et Pline, est un contemporain
de l’amateur de Bosco Reale. Martial, 43-102; Juvénal, 42-120 ; Pline, 23-79.