LE “SPOSALIZIO” DU MUSÉE DE CAEN
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on examinant la façon dont les draperies sont disposées et en compa-
rant, à cet égard, le Sposalizio de Caen avec les œuvres du Spagna
d’une part et, de l’autre, avec celles du Pérugin. L’arrangement des
draperies, chez ce dernier, est plus souple, plus naturel, plus gracieux.
Chez le Spagna, elles semblent, suivant l'expression de Cavalcasclle,
arrangées avec la main ; sur le torse de la Vierge est une sorte de sac
informe, sous lequel on devine à peine le corps qu’elle recouvre.
Le vêtement de saint Joseph a également cette apparence de sac. On
pourrait en dire autant de la plupart des ligures du même tableau ;
quant à celle du grand-prêtre, je défie qu’on trouve l'indice d’un
corps sous la vague draperie qui le couvre et qui semble quelque
décalcomanie. Que le lecteur compare ces draperies avec celles qu’il
peut voir dans les meilleures œuvres du Spagna : la Madone du
Louvre, le tableau d’autel d'Assise, le Couronnement de Todi, et il y
trouvera les mêmes particularités, les mêmes faiblesses, les mêmes
gribouillages sans signification, la même inaptitude à faire sentir le
nu sous la draperie. Chez le Spagna, les plis ont rarement la netteté
anguleuse que leur donne le Pérugin ; généralement, ils finissent en
rond. Leur caractéristique, ainsi que l’on pourra s’en rendre compte
par l’examen, même superficiel, des œuvres précitées, est une ligne
tire-bouchonnée, serpentant, comme dans un elfort désespéré, pour
remplir son rôle. Cette ligne, nous la rencontrons à chaque pas dans
le Sposalizio de Caen, notamment sur le corsage de la Vierge et sur
celui de la femme qui est auprès d'elle, ou bien encore sur le bras
droit de saint Joseph. Un autre pli, parfaitement conforme au système
de draperie de l’artiste, est celui qui est formé par le manteau à
1 endroit où, tombant sur l’épaule, il rejoint le bras. Il forme à cet
endroit un pli concave, continué par une courbe convexe qui se
trouve en lace d’un autre pli absolument semblable. Que le lecteur
cherche lui-même ce pli dans le Sposalizio, il le trouvera sans
peine.
III
Nous venons d’établir que le Sposalizio de Caen, par cela même
qu’il montre plus de caractères empruntés à Pinturicchio et à
Haphaël qu’au Pérugin, n’a pu être exécuté ni même dessiné par ce
dernier. Nous avons vu également que les traits distinctifs de cette
œuvre sont en parfaite concordance avec le talent du Spagna. Un
parlant du tableau d’autel de Pérouse, M. Cavalcasclle dit qu’il montre
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on examinant la façon dont les draperies sont disposées et en compa-
rant, à cet égard, le Sposalizio de Caen avec les œuvres du Spagna
d’une part et, de l’autre, avec celles du Pérugin. L’arrangement des
draperies, chez ce dernier, est plus souple, plus naturel, plus gracieux.
Chez le Spagna, elles semblent, suivant l'expression de Cavalcasclle,
arrangées avec la main ; sur le torse de la Vierge est une sorte de sac
informe, sous lequel on devine à peine le corps qu’elle recouvre.
Le vêtement de saint Joseph a également cette apparence de sac. On
pourrait en dire autant de la plupart des ligures du même tableau ;
quant à celle du grand-prêtre, je défie qu’on trouve l'indice d’un
corps sous la vague draperie qui le couvre et qui semble quelque
décalcomanie. Que le lecteur compare ces draperies avec celles qu’il
peut voir dans les meilleures œuvres du Spagna : la Madone du
Louvre, le tableau d’autel d'Assise, le Couronnement de Todi, et il y
trouvera les mêmes particularités, les mêmes faiblesses, les mêmes
gribouillages sans signification, la même inaptitude à faire sentir le
nu sous la draperie. Chez le Spagna, les plis ont rarement la netteté
anguleuse que leur donne le Pérugin ; généralement, ils finissent en
rond. Leur caractéristique, ainsi que l’on pourra s’en rendre compte
par l’examen, même superficiel, des œuvres précitées, est une ligne
tire-bouchonnée, serpentant, comme dans un elfort désespéré, pour
remplir son rôle. Cette ligne, nous la rencontrons à chaque pas dans
le Sposalizio de Caen, notamment sur le corsage de la Vierge et sur
celui de la femme qui est auprès d'elle, ou bien encore sur le bras
droit de saint Joseph. Un autre pli, parfaitement conforme au système
de draperie de l’artiste, est celui qui est formé par le manteau à
1 endroit où, tombant sur l’épaule, il rejoint le bras. Il forme à cet
endroit un pli concave, continué par une courbe convexe qui se
trouve en lace d’un autre pli absolument semblable. Que le lecteur
cherche lui-même ce pli dans le Sposalizio, il le trouvera sans
peine.
III
Nous venons d’établir que le Sposalizio de Caen, par cela même
qu’il montre plus de caractères empruntés à Pinturicchio et à
Haphaël qu’au Pérugin, n’a pu être exécuté ni même dessiné par ce
dernier. Nous avons vu également que les traits distinctifs de cette
œuvre sont en parfaite concordance avec le talent du Spagna. Un
parlant du tableau d’autel de Pérouse, M. Cavalcasclle dit qu’il montre