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GAZETTE DES BEAUX-ARTS
me paraissent être ceux de Philippe, d’un Philippe plus jeune que ne
le montrent ses portraits les plus connus, je ne vois d’autre explica-
tion de cette différence que l’hypothèse suivante : le bronze d’Am-
sterdam aura été fait avant l’institution de l’ordre de la Toison, en
1430, et mis au rebut après cette date, pour être remplacé par un
autre qui fût plus agréable au duc. Le monument ayant été ter-
miné en 1455, on peut bien supposer un laps de temps fort consi-
dérable pour son exécution; cependant, il n’y a rien d’étonnant à
cela pour un ouvrage qui contenait, outre trois grandes statues en
bronze, avec leurs armes et armoiries, trois animaux, deux anges
gardiens, vingt-quatre statuettes de « pleurants » et quatre évan-
gélistes. La statuette de Jean de Clèves est en tout cas antérieure
à 1452, année où il reçut la Toison d'or, puisqu’il ne la porte pas
encore ; mais cette date n’est pas assez reculée pour servir de preuve.
On pourrait se fonder plutôt sur la grande jeunesse du modèle.
Restent encore à déterminer deux figures, dont l’une, l’em-
pereur, ne peut absolument être identifiée avec aucun des « pleu-
rants » de Montfaucon, et dont l’autre présente des difficultés assez
graves. Il s’agit du jeune homme au chapeau de fourrure, qui porte
un bâton de maréchal et l’ordre de Saint-Antoine (4), celui que
M. de Roever songeait à reconnaître dans le Philippe de Savoie du
monument (Montfaucon, pi. XXX, h 1). Le critique s’était évidem-
ment laissé inlluencer par le chapeau et les manches pendantes,
ainsi que par la robe courte et l’analogie de la pose; mais, outre
que la pose serait en sens inverse, il me semble fort improbable
que Philippe de Savoie, qui n’entra qn’assez tard en relations plus
intimes avec la cour de Bourgogne, puisse avoir été chevalier de
l’ordre de Saint-Antoine, même si la date de sa naissance n’en
excluait pas, ou peu s’en faut, la possibilité. En revanche, il y a
parmi la postérité mâle de Marguerite de Flandre un personnage
qui, avant tous les autres, paraît avoir eu le droit de porter cet
ordre. Jean, duc de Brabant, que l’inscription du monument dé-
signait, outre ses autres titres, comme comte de Hollande, de Zélande
et de Hainaut, titres auxquels il prétendait du droit de son mariage
avec Jacqueline de Bavière, doit certes, en qualité de comte de
Hainaut, s’être considéré comme chef de l’ordre de Saint-Antoine.
La robe et la pose de la figure qui le représente chez Montfau-
con (pi. XXX, a 1), répondent assez bien au hronze, quoique les
manches pendantes manquent et que le chapeau semble tout diffé-
rent. N’importe; l’étrange collier, avec les trois croix que montre ce
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me paraissent être ceux de Philippe, d’un Philippe plus jeune que ne
le montrent ses portraits les plus connus, je ne vois d’autre explica-
tion de cette différence que l’hypothèse suivante : le bronze d’Am-
sterdam aura été fait avant l’institution de l’ordre de la Toison, en
1430, et mis au rebut après cette date, pour être remplacé par un
autre qui fût plus agréable au duc. Le monument ayant été ter-
miné en 1455, on peut bien supposer un laps de temps fort consi-
dérable pour son exécution; cependant, il n’y a rien d’étonnant à
cela pour un ouvrage qui contenait, outre trois grandes statues en
bronze, avec leurs armes et armoiries, trois animaux, deux anges
gardiens, vingt-quatre statuettes de « pleurants » et quatre évan-
gélistes. La statuette de Jean de Clèves est en tout cas antérieure
à 1452, année où il reçut la Toison d'or, puisqu’il ne la porte pas
encore ; mais cette date n’est pas assez reculée pour servir de preuve.
On pourrait se fonder plutôt sur la grande jeunesse du modèle.
Restent encore à déterminer deux figures, dont l’une, l’em-
pereur, ne peut absolument être identifiée avec aucun des « pleu-
rants » de Montfaucon, et dont l’autre présente des difficultés assez
graves. Il s’agit du jeune homme au chapeau de fourrure, qui porte
un bâton de maréchal et l’ordre de Saint-Antoine (4), celui que
M. de Roever songeait à reconnaître dans le Philippe de Savoie du
monument (Montfaucon, pi. XXX, h 1). Le critique s’était évidem-
ment laissé inlluencer par le chapeau et les manches pendantes,
ainsi que par la robe courte et l’analogie de la pose; mais, outre
que la pose serait en sens inverse, il me semble fort improbable
que Philippe de Savoie, qui n’entra qn’assez tard en relations plus
intimes avec la cour de Bourgogne, puisse avoir été chevalier de
l’ordre de Saint-Antoine, même si la date de sa naissance n’en
excluait pas, ou peu s’en faut, la possibilité. En revanche, il y a
parmi la postérité mâle de Marguerite de Flandre un personnage
qui, avant tous les autres, paraît avoir eu le droit de porter cet
ordre. Jean, duc de Brabant, que l’inscription du monument dé-
signait, outre ses autres titres, comme comte de Hollande, de Zélande
et de Hainaut, titres auxquels il prétendait du droit de son mariage
avec Jacqueline de Bavière, doit certes, en qualité de comte de
Hainaut, s’être considéré comme chef de l’ordre de Saint-Antoine.
La robe et la pose de la figure qui le représente chez Montfau-
con (pi. XXX, a 1), répondent assez bien au hronze, quoique les
manches pendantes manquent et que le chapeau semble tout diffé-
rent. N’importe; l’étrange collier, avec les trois croix que montre ce