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GAZETTE DES BEAUX-ARTS
sentiel — d’origine thébaine. Elle porte, à cet égard, les certificats les
plus authentiques, comme nous l’allons voir.
Nous ne nous attarderons pas à en faire une minutieuse descrip-
tion, la planche ci-jointe nous permettant de montrer la figure sous
ses deux principaux aspects. La reine est représentée dans l’attitude
d’Isis-Hathor agitant les sistres. Elle est revêtue du riche costume
allégorique attribué à l'une ou l’autre de ces deux déesses. Sur sa
courte et ronde perruque frisée au 'petit fer, comme on dirait aujour-
d'hui, reposait l’un des nombreux diadèmes usités en pareil cas; il a
disparu, ne laissant d’autres traces qu’une sorte de modias assez bas,
sur lequel il venait s’emboîter. La robe collante, un peu courte, est
recouverte d'un superbe plumage, se composant d’un corselet im-
briqué de petites plumes en forme d’écailles et de deux longues
ailes qui prennent naissance à hauteur des reins et s’entrecroisent
symétriquement le long des jambes, le tout épousant très exacte-
ment les formes. Du corselet, qui ne fait qu’effleurer les seins,
s’échappe le haut de la robe, vêtement plissé à larges emmanchures
laissant les bras dégagés au-dessus du coude. Ce costume mi-femme
mi-oiseau, est assurément l’une des plus jolies trouvailles qu’ait
consacrées la tradition hiératique. Il associe, de la façon la plus
harmonieuse, à la forme humaine un élément très pittoresque
emprunté au vautour, l’un des grands oiseaux de l’Egypte, l'oiseau-
déesse par excellence dans la symbolique, comme l’épervicr était
l’oiseau-dieu.
Cette heureuse combinaison, il faut bien le dire, n’apparaît pas
sur les monuments avant le second empire thébain. Elle est peut-
être d’origine plus ancienne (nous connaissons si peu la mythologie
figurée de l'ancien et du moyen empire); toujours est-il qu’il faut la
considérer, ancienne ou récente, comme la dernière étape d’un pro-
cédé idéographique qui avait débuté par la représentation pure et
simple de l’animal, incarnation primitive de la divinité. On avait
ensuite fondu la bête et l’homme en un type hybride (corps humain
avec tête, d’animal ou l’inverse) puis, l’anthropomorphisme l’empor-
tant d’une façon tout à fait décisive, on avait, dans le, cas spécial des
oiseaux-déesses qui nous occupe, adapté au corps humain, intégrale-
ment conservé, les ailes, non pas rattachées d’une manière anormale
au milieu du dos, comme l'ont fait les Grecs et leurs imitateurs, mais
longeant les bras, de l’épaule au poignet, conformément à la struc-
ture mécanique du vol chez les oiseaux. On comprit enfin qu’il
s'agissait moins de représenter un monstre humain ailé que de com-
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sentiel — d’origine thébaine. Elle porte, à cet égard, les certificats les
plus authentiques, comme nous l’allons voir.
Nous ne nous attarderons pas à en faire une minutieuse descrip-
tion, la planche ci-jointe nous permettant de montrer la figure sous
ses deux principaux aspects. La reine est représentée dans l’attitude
d’Isis-Hathor agitant les sistres. Elle est revêtue du riche costume
allégorique attribué à l'une ou l’autre de ces deux déesses. Sur sa
courte et ronde perruque frisée au 'petit fer, comme on dirait aujour-
d'hui, reposait l’un des nombreux diadèmes usités en pareil cas; il a
disparu, ne laissant d’autres traces qu’une sorte de modias assez bas,
sur lequel il venait s’emboîter. La robe collante, un peu courte, est
recouverte d'un superbe plumage, se composant d’un corselet im-
briqué de petites plumes en forme d’écailles et de deux longues
ailes qui prennent naissance à hauteur des reins et s’entrecroisent
symétriquement le long des jambes, le tout épousant très exacte-
ment les formes. Du corselet, qui ne fait qu’effleurer les seins,
s’échappe le haut de la robe, vêtement plissé à larges emmanchures
laissant les bras dégagés au-dessus du coude. Ce costume mi-femme
mi-oiseau, est assurément l’une des plus jolies trouvailles qu’ait
consacrées la tradition hiératique. Il associe, de la façon la plus
harmonieuse, à la forme humaine un élément très pittoresque
emprunté au vautour, l’un des grands oiseaux de l’Egypte, l'oiseau-
déesse par excellence dans la symbolique, comme l’épervicr était
l’oiseau-dieu.
Cette heureuse combinaison, il faut bien le dire, n’apparaît pas
sur les monuments avant le second empire thébain. Elle est peut-
être d’origine plus ancienne (nous connaissons si peu la mythologie
figurée de l'ancien et du moyen empire); toujours est-il qu’il faut la
considérer, ancienne ou récente, comme la dernière étape d’un pro-
cédé idéographique qui avait débuté par la représentation pure et
simple de l’animal, incarnation primitive de la divinité. On avait
ensuite fondu la bête et l’homme en un type hybride (corps humain
avec tête, d’animal ou l’inverse) puis, l’anthropomorphisme l’empor-
tant d’une façon tout à fait décisive, on avait, dans le, cas spécial des
oiseaux-déesses qui nous occupe, adapté au corps humain, intégrale-
ment conservé, les ailes, non pas rattachées d’une manière anormale
au milieu du dos, comme l'ont fait les Grecs et leurs imitateurs, mais
longeant les bras, de l’épaule au poignet, conformément à la struc-
ture mécanique du vol chez les oiseaux. On comprit enfin qu’il
s'agissait moins de représenter un monstre humain ailé que de com-