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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 15.1896

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Nr. 6
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Paris, Pierre: La vache de Myron
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https://doi.org/10.11588/diglit.24681#0515

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS

tensité de l’habitude, et que, sans effort, l’artiste les retrouve et les
reproduit d’instinct dans toute leur vérité.

Qu’on se rappelle, pour prendre un exemple, ces frontons
archaïques en pierre tendre, retrouvés à l’Acropole d’Athènes, et
dont quelques figures d’animaux sont déjà si familières aux archéo-
logues; que l’on compare, si l’on veut, la tète d’homme vivement
colorée et que l’on a surnommée Barbe-Bleue, et la tête de taureau
peinte des mêmes couleurs brutales et bizarrement conventionnelles:
l’avantage n’est-il pas, sans conteste, à l’animal, pour la vérité de la
forme générale, l’exactitude du détail? Rappelons-nous encore cette
statue fragmentaire, d’époque un peu plus proche, sans doute, mais
très archaïque encore, trouvée aussi à l’Acropole, et qui représente
un sacrificateur portant un veau : chacun a remarqué que l’homme
est d’une maladresse insigne. Sa figure lourde et niaise, scs gros
yeux obliques sans expression, son nez large et dur, sa bouche mal
taillée, aux lèvres minces et raides, font sourire; on cherche avec
peine, sous l’étoffe mal indiquée qui le couvre, les formes peu natu-
relles des bras, du buste et du ventre. C’est une œuvre barbare, où
l'on ne retrouve pas les figures que l’art attique a toujours aimées,
voire à ses débuts tâtonnants. Mais le veau fait un curieux contraste
avec l’homme qui le porte. Sans être de tout point excellent, sans
qu'on puisse prétendre que tout son corps soit façonné avec un égal
mérite, du moins la forme s’en rapproche-t-elle bien plus de la nature,
et la tête se montre-t-elle d’une réalité déjà bien sincère, avec tout
le caractère do stupidité morne qui est propre aux veaux naissants.

Il y a loin, sans aucun doute, de cette œuvre encore grossière,
malgré son mérite, au chef-d’œuvre de Myron. Mais il ne serait pas
bien difficile de trouver des transitions de l’une à l’autre, et, sans
aller bien loin, le vieil Hagélaïdas dut donner à son disciple de bien
précieuses leçons; car il fut déjà un animalier de grand talent, cl la
critique s’accorde à reconnaître que si quelqu’un des animaux qu’il
sculpta revenait un jour à la lumière, ce serait pour nous une source
d’étonnement et d’admiration. Les quatre chevaux attelés au char
de l’Ëpidamnien Cléosthène, les chevaux mêlés aux captives messa-
piennes, qu’il exécuta pour les Tarontins en souvenir d’une victoire,
nous auraient certainement frappés par le naturel de leurs formes,
la variété et la vie de leurs mouvements, puisque ce sont là les
qualités qui mettent en évidence le vieil argien, parmi les sculpteurs
de la dernière génération archaïque.

Mais tout bien préparé qu’il pût être par la tradition lointaine
 
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