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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 15.1896

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Nr. 6
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Paris, Pierre: La vache de Myron
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https://doi.org/10.11588/diglit.24681#0516

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LA VACHE DE MYRON

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et parles exemples tout proches, nous ne voulons diminuer en rien
l’originalité de Myron. Il est certain qu’il l’emporta sur tous ses
prédécesseurs par une exécution géniale, que par malheur nous ne
pouvons pas juger, et aussi par le choix du sujet.

On l'a plusieurs fois remarqué, et la remarque est aussi fine que
juste, si nous savons que les anciens ont mainte et mainte lois repré-
senté des taureaux, la Vache de Myron est peut-être la seule, dont la
mémoire soit venue jusqu’à nous. C’est, probablement un souvenir
de l’époque lointaine où la race était encore à l’état barbare sur le
solde l’antique Hcllas. Le paysan égyptien, sur les murailles des
temples ou des chambres funéraires, aimait surtout à voir sculpter ou
peindre l’image de la vache nourricière, dont le labeur patient et doux
fécondait l'immense vallée limoneuse ; il se plaisait, dans les scènes
agrestes que représentaient les artistes, à retrouver cette placide
compagne de sa vie rustique. Mais les vieux Hellènes, belliqueux et
chasseurs, acharnés à la mort des bêtes sauvages qui semaient la
terreur dans les champs ravagés, les Hellènes, que la dure nécessité
contraignait à dompter les monstres des bois et des montagnes, les
cerfs farouches, les lions de Némée, les sangliers d’Erymanthe ou de
Calydon, les taureaux de Crète ou de Marathon, tous ces émules
mortels des Héraclès et des Thésée laissaient paître et pulluler en
paix les vaches moins redoutables, que protégeait, du reste, leur
vague divinité. Leurs ennemis et leurs victimes, c’étaient les mâles,
les taureaux aux cornes acérées et redoutables, et ce sont aussi les
taureaux, révoltés ou conquis, massacrés ou domptés, que les artistes
représentent sur les vases d’or ou d’argile qu’ils décorent, ou sur les
murailles des palais royaux, et dont ils gravent les formes puissantes
dans l’or ou la pierre précieuse des bijoux. Plus tard, lorsqu’à la
civilisation dite mycénienne a succédé la civilisation moins dure et
moins âpre aux luttes des vrais Grecs, la tradition n’est cependant
pas rompue ; les taureaux paraissent encore, souvenir précis d’un
passé proche, animaux de combat, dans les zones des vases peints, sur
les frises sculptées des temples, avec toute la faune légendaire des
lions, des sangliers et des cerfs farouches. Rarement un ouvrier
songe à faire à côté d eux une place à leurs femelles, aux vaches, dès
longtemps réduites à l’humble et productive domesticité.

D’ailleurs, si les formes noblement robustes du mâle, la
carrure de son front cl de son mufle court, la vigueur de son cou,
la solidité de ses jambes trapues, si le brillant bronzé de sou poil
fauve si l’éclat rude de ses yeux méchants et les brusques élans,
 
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