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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 24.1900

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Nr. 4
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Michel, André: L' exposition centennale - La peinture française, 4: les arts à l'exposition universelle de 1900
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https://doi.org/10.11588/diglit.24721#0310

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286

GAZETTE DES BEAUX-ARTS

mais équitable postérité. Toutefois, je veux bien qu’on sache que,
depuis longtemps, mes ouvrages ne reconnaissent d’autre discipline
que celle des anciens, des grands maîtres de ce siècle, de glorieuse
mémoire, où Raphaël posa les bornes éternelles et incontestables
du sublime de l’art... Je suis donc un conservateur des bonnes
doctrines et non un novateur. Je ne suis pas non plus, comme le
prétendent mes détracteurs, un imitateur servile des écoles du
xivc et du xve siècle, quoique je sache m'en servir avec plus de fruit
qu'ils ne savent voir... » Puis, ce cri admirable d’entêtement et de
fierté : « Je compte sur ma vieillesse ; elle me vengera ! »

A cette date, tout en protestant contre ses « détracteurs », il
consentait donc encore à reconnaître ce qu’il devait aux Primitifs.
Et, quand il ne l’aurait pas reconnu, ses œuvres sont là, témoins
irrécusables. L’homme qui, entre vingt-six et trente-quatre ans, de
1806 à 1814, avait peint les portraits de Mme Devauçay, de M'nc Pan-
ckoucke, de Mmc de Senonnes, et cette Baigneuse de 1808, — qui,
d’une prise si subtile et si forte, captait la forme vivante et avec je ne
sais quelle égoïste et froide passion la définissait d’un trait si ténu, si
impondérable et en môme temps si impérieux, qui la modelait dans
la lumière égale et immobile par d’imperceptibles écarts de clarté et,
sans tendresse véritable, sans abandon de cœur, mais non pas sans
désir, assouvissait jusqu’au paroxysme la double et intime volupté
de son œil et de sa main, — le peintre de Zélie, des Odalisques,
différait certes de ces Primitifs auxquels on le comparait injurieu-
sement sans les connaître ; mais il procédait d’eux et leur devait
beaucoup.

Plus tard, après 1824, le sentiment de sa responsabilité de chet
d’école et de défenseur de l’orthodoxie, sa combativité et son entête-
ment l’enfoncèrent en des partis pris systématiques et violents d’où
son génie instinctif ne s’évada que par d’heureuses aventures. Les
œuvres composées de la seconde partie de sa vie : Homère, Saint
Pierre, Saint Symphorien, nous racontent et nous révèlent surtout
sa doctrine et sa volonté; mais ses portraits ont gardé le meilleur de
lui-même. Certes, il y mit aussi sa volonté tenace et intransigeante,
mais en même temps cette part de spontanéité, d’inconscient aveu,
qui, derrière ou à travers la ressemblance exacte du modèle, nous
fait entrevoir celle du portraitiste. Rien de plus significatif à ce point
de vue que le portrait do Mmo de Senonnes. Un être est là, évoqué
à jamais, décrit avec une précision presque indiscrète, non seulement
dans le signalement de son ovale plein, de son menton lourd plus
 
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