HISTOIRE DE LA NATION ÉGYPTIENNE
temps de préparer une nouvelle armée. Les forces de Mazacès n'étaient pas un
danger ; elles suÆsaient à peine aux Perses pour maintenir un pays hostile ; mais
les descendants des anciennes dynasties nationales avaient sans doute une puis-
sante inûuence dans le Delta et les Grecs (Agis, le roi de Sparte, l'irréductible ennemi,
était encore en Crète au commencement de 332) n'allaient-iis pas chercher de ce
côté une alliance qui leur eût permis, en s'emparant de Chypre et de la côte phé-
nicienne, de reconquérir l'hégémonie de la mer ? En outre la mainmise sur l'Égypte
devait rendre Alexandre, qui tenait déjà le passage de l'Hellespont, maître des deux
grands greniers où la Grèce se ravitaillait en blé, en sorte qu'il l'aurait presque à sa
merci. 11 n'en est pas moins vrai que l'élan qui porte le Macédonien jusqu'à l'oasis
libyenne paraît merveilleusement aventuré. Aussi est-on allé jusqu'à attribuer à
Alexandre une politique proprement égyptienne, qui aurait fait d'Aiexandrie le
centre d'un Empire méditerranéen. Séduit par le prestige de cette grande civilisation
orientale, la première qu'il rencontrât après la civilisation phénicienne de Tyr, il
lui aurait emprunté l'idée d'une monarchie de droit divin, seul pouvoir capable de
rassembler sous ses lois les Orientaux, les Macédoniens et les Hellènes. La mer
Egée aurait uni les pièces diverses de ce vaste Etat, où les peuples auraient mis en
commun leurs trésors et leur passé. Alexandrie, qui adorait les dieux grecs et
l'Isis égyptienne, était désignée pour en être la capitale cosmopolite. Le culte de
Zeus-Ammon, proclamé père du roi, en fut devenu la religion ofhcielle, et en
légitimant la dynastie aurait cimenté l'édifice.
On est presque toujours justihé de prêter à Alexandre des vues constructives ;
mais il est certain que, même à Memphis, il n'a jamais songé à limiter son Empire
à l'Egypte et aux pays égéens. Le combat décisif entre les rois n'est qu'ajourné et
la partie qu'il veut jouer doit lui donner la maîtrise ; ce qui sera en jen, c'est la
possession de l'Asie et même du monde. Aussi a-t-on tenu pour assuré que si
Alexandre entraîné par son goût de l'aventure, l'attirance des régions lointaines et
des sanctuaires fameux, a conçu le désir soudain et comme inspiré d'entreprendre le
voyage de l'Oasis, ce ne fut certainement pas pour faire consacrer sa puissance aux
yeux des indigènes par leur dieu national, car cette consécration eût été plus efhcace
dans le sanctuaire traditionnel de Thèbes, ni simplement pour consulter le dieu sur
le succès de son entreprise, ce qu'il eût pu faire avec moins de danger et de temps,
par l'entremise de (( Théores )), mais pour obtenir de l'oracle, devant l'opinion hellé-
nique et internationale, une justihcation de ses projets de domination universelle.
Quelques historiens ont pensé, d'autre part, qu'il était aussi préoccupé d'éclaircir le
mystère de sa naissance, que lui-même considérait déjà comme divine. Depuis, en
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temps de préparer une nouvelle armée. Les forces de Mazacès n'étaient pas un
danger ; elles suÆsaient à peine aux Perses pour maintenir un pays hostile ; mais
les descendants des anciennes dynasties nationales avaient sans doute une puis-
sante inûuence dans le Delta et les Grecs (Agis, le roi de Sparte, l'irréductible ennemi,
était encore en Crète au commencement de 332) n'allaient-iis pas chercher de ce
côté une alliance qui leur eût permis, en s'emparant de Chypre et de la côte phé-
nicienne, de reconquérir l'hégémonie de la mer ? En outre la mainmise sur l'Égypte
devait rendre Alexandre, qui tenait déjà le passage de l'Hellespont, maître des deux
grands greniers où la Grèce se ravitaillait en blé, en sorte qu'il l'aurait presque à sa
merci. 11 n'en est pas moins vrai que l'élan qui porte le Macédonien jusqu'à l'oasis
libyenne paraît merveilleusement aventuré. Aussi est-on allé jusqu'à attribuer à
Alexandre une politique proprement égyptienne, qui aurait fait d'Aiexandrie le
centre d'un Empire méditerranéen. Séduit par le prestige de cette grande civilisation
orientale, la première qu'il rencontrât après la civilisation phénicienne de Tyr, il
lui aurait emprunté l'idée d'une monarchie de droit divin, seul pouvoir capable de
rassembler sous ses lois les Orientaux, les Macédoniens et les Hellènes. La mer
Egée aurait uni les pièces diverses de ce vaste Etat, où les peuples auraient mis en
commun leurs trésors et leur passé. Alexandrie, qui adorait les dieux grecs et
l'Isis égyptienne, était désignée pour en être la capitale cosmopolite. Le culte de
Zeus-Ammon, proclamé père du roi, en fut devenu la religion ofhcielle, et en
légitimant la dynastie aurait cimenté l'édifice.
On est presque toujours justihé de prêter à Alexandre des vues constructives ;
mais il est certain que, même à Memphis, il n'a jamais songé à limiter son Empire
à l'Egypte et aux pays égéens. Le combat décisif entre les rois n'est qu'ajourné et
la partie qu'il veut jouer doit lui donner la maîtrise ; ce qui sera en jen, c'est la
possession de l'Asie et même du monde. Aussi a-t-on tenu pour assuré que si
Alexandre entraîné par son goût de l'aventure, l'attirance des régions lointaines et
des sanctuaires fameux, a conçu le désir soudain et comme inspiré d'entreprendre le
voyage de l'Oasis, ce ne fut certainement pas pour faire consacrer sa puissance aux
yeux des indigènes par leur dieu national, car cette consécration eût été plus efhcace
dans le sanctuaire traditionnel de Thèbes, ni simplement pour consulter le dieu sur
le succès de son entreprise, ce qu'il eût pu faire avec moins de danger et de temps,
par l'entremise de (( Théores )), mais pour obtenir de l'oracle, devant l'opinion hellé-
nique et internationale, une justihcation de ses projets de domination universelle.
Quelques historiens ont pensé, d'autre part, qu'il était aussi préoccupé d'éclaircir le
mystère de sa naissance, que lui-même considérait déjà comme divine. Depuis, en
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