PEINTURE, SCULPTURE, GRAVURE, ARCHITECTURE, MUSIQUE, ARCHÉOLOGIE, BIBLIOGRAPHIE, BELLES-LETTRES, ETC
PUBLIÉ SOCS LA DIRECTION DE M. A. SIRET, MEMBRE CORRESPONDANT DE L'ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE.
Paraissant deux fois par mois.
N° 10. Belgique. — 31 Mai 1864. Sixième Année.
On s'abonne : à Anvers, chez De Coninck, éditeur;
à Bruxelles, chez Decq et Muquardt; à Gand, chez
Hoste; à Liège, chez De Soer et Decq; les autres vil-
les, chez tous les libraires. Pour l'Allemagne : R.Weigel,
Leipzig. Heberle, Cologne. Pour la France : VcRenouard,
Paris. Pour la Hollande : Martinus Nyuoff, à La Haye.
Pour l'Angleterre et l'Irlande : chez Barthès et Lowell ,
14 Great Marlborough Street, à Londres. — Prix d'a-
bonnement : pour toute la Belgique, (port compris). —
Par an, 8 l'r. — Étranger (port compris). —Allemagne,
10 fr. — France, 11 l'r. — Hollande, S fl. — Angleterre
et Irlande, 8 s. 6 d. — Prix par numéro 40 c. — Tout
abonnement donne droit ù une annonce de 15 lignes,
répétée 2 fois dans Vannée. — Annonces 50 c. la ligne.
— Pour tout ce qui regarde l'administration, la rédac-
tion ou les annonces, s'adresser à J. Edom, imprimeur
à St. Nicolas , (Flandre-Orientale. Belgique) (affranchir).
Les lettres et paquets devront porter pour suscription ,
après l'adresse principale : « Pour la direction du Jour-
nal dès Beaux-Arls. » — Il pourra être rendu compte des
ouvrages dont un exemplaire sera adressé à la rédaction.
SOMMAIRE : Correspondances particulières; Paris
(Exposition). — Aix-la -Chapelle. — Cologne. ■— De la
restauration des églises, par Raymond Bordeaux.— Benoît
Coello. ■— Le peintre Griff. — Berry Patenter. — Con-
cours de chant d'ensemble. — Vente Rolas du Roscu. _
Nouvelles d'atelier. — Annonces.
CORRESPONDANCES PARTICULIÈRES.
Paris.
Exposition des Beaux-Arts.
artistes français 'et étrangers : le paysage. — les
batailles et le genre ■— quelques artistes belges.
Depuis la Renaissance il n'y a peut-être
pas eu dans l'histoire de l'art une époque où
la peinture de paysage ait été plus florissante
qu'elle ne l'est aujourd'hui. Il y a longtemps
aussi qu'une même exposition n'avait réuni
autant d'œuvres capitales de nos paysagistes
les plus justement admirés. Cela nous permet-
tra de nous étendre plus longuement sur ce
genre que sur tout autre ; car tous les maîtres,
nous l'avons déjà dit, sont présents; nous
retrouvons les grands noms de 1850, et, en
plus, ceux de leurs élèves et de leurs nom-
breux imitateurs qui marchent sur leurs tra-
ces.
Parmi les maîtres, et au premier rang, se
place M. Th. Rousseau; nous n'en voulons
d'autre preuve que les deux toiles qu'il a pein-
tes cette année. H y a longtemps que nous
connaissons et que nous admirons ces arbres
au tronc robusle, au feuillage épais, dorés à
leur cîme par le soleil et le pied baigné dans
une fraîche atmosphère d'ombre. L'air circule
à travers cette plantureuse végétation qui
découpe sur le ciel sa vigoureuse silhouet-
te. Au bas, des chaumières tranquilles et
étroites abritées sous l'épaisseur du feuillage.
Cependant le soleil glisse quelques rayons à
travers la verdure opaque et marbre l'épais
gazon de taches lumineuses. Voilà un beau
paysage, vrai, imposant, consciencieusement
étudié et solidement peint, une des meilleu-
res pages entin de M. Th. Rousseau; toute-
fois nous préférons encore ce village que l'au-
teur est allé chercher et copier sur nature
dans les environs de Paris. (Comme il l'avait
déjà fait, du reste, pour les Chaumières sous
les arbres). Une route longue et vue de face,
bordée de chaque côté d'une rangée de pau-
vres chaumières, quelques peupliers maigres
et roux, peu de verdure, un terrain couvert
de mousse, voilà tout le paysage que nous
admirons comme un des plus remarquables
tableaux de l'exposition. Si on se place à
une certaine distance, la route s'allonge, les
chaumières s'espacent, les petits personna-
ges qui tout à l'heure faisaient tache sur le
chemin, disparaissent dans l'ensemble; ces
tons jaunes et gris qui attristaient l'œil de
près rendent à s'y méprendre la mélancolie
des teintes dorées de l'automne. Ce paysage
tout entier existe, s'anime; on y marche, on
s'y promène et on s'effraye de la longueur de
la route qui s'étend à perle de vue.
M. Cabat, un des artistes vaillants qui à
l'époque du mouvement romantique luttèrent
avec succès contre les tendances du paysage
historique, reparaît sans avoir rien perdu de
ses qualités M. Cabat, aime les grands as-
pects, les sites imposants, les arbres qui s'é-
lancent noblement sur les bords d'un lac et
les eaux tranquilles garanties de la chaleur
par l'ombre du feuillage. Nous préférons ce-
pendant la Source dans les bois, une délicieuse
retraite, presque sans ciel, pleine de mys-
tère et de fraîcheur, un de ces refuges soli-
taires où l'on voudrait pouvoir aller s'étendre.
Voici encore un des vétérans de 1830, qui
n'est guère connu que de réputation par les
générations nouvelles. M. P. Huet à combattu
aux premiers rangs et l'un des premiers il est
parvenu la réputation. Que ces souvenirs
glorieux le protègent désormais des indis-
crétions de la critique et conservent à son
talent vieilli son ancien prestige.
Il est des maîtres heureusement dont la
verte vieillesse nous console des défaillances
de ceux qui ont perdu leur talent avec leur
jeunesse. Depuis trente ans que M. Corot,
, travaille et lutte, depuis trente ans qu'il étu-
|.die et qu'il expose, il n'a cessé de progresser,
! de mieux pénétrer la poésie profonde de la
nature, d'en rendre avec plus de charme l'as-
pect séduisant. Regardez ce Souvenir de
Morle-Fontaine, ce sont toujours des masses
largement assemblées, aux contours indécis,
aux formes vaporeuses, se reflétant dans une
eau argentée et limpide. Au fond, le soleil
brille de tout son éclat et fait mieux valoir
l'ombre des bosquets qui bordent le lac. Rap-
prochez de ce site pittoresque et riant le Coup
de vent, cet arbre vigoureux qu'une raffale
tord et courbe par un temps sombre et vous
reconnaîtrez que le talent gracieux de M.
Corot, s'il préfère les molles langueurs du
crépuscule, les blanches clartés du soleil,
peut aussi quand il le veut, rendre avec force
les aspects sinistres de la nature, ses tempê-
tes et ses désastres.
Que de noms fameux aussi nous aurons
encore à citer après ces maîtres incontestés
aujourd'hui. M. S. André, après un trop long-
repos, reparait enfin avec un excellent tableau,
une fontaine ombragée de chênes majestueux
aux contours nobles et élégants; ils man-
quent seulement un peu de vigueur; voici
Desjobert, un regrettable artiste, frappé au
momentoù le succès venait a lui, mais les deux
tableaux que sa mort récente a permis d'ex-
poser ne rappellent que de loin ses sympathi-
ques qualités; puis M. Lapito, qui s'arrête
dans les vertes campagnes de la Normandie et
parvient à rendre sans crudité la verdure
franche des pâturages humides. Voyons en
passant les études séduisantes de M. Lambi-
net; les paysages composés de M. Français,
un chercheur, qui n'a pas été heureux cette
PUBLIÉ SOCS LA DIRECTION DE M. A. SIRET, MEMBRE CORRESPONDANT DE L'ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE.
Paraissant deux fois par mois.
N° 10. Belgique. — 31 Mai 1864. Sixième Année.
On s'abonne : à Anvers, chez De Coninck, éditeur;
à Bruxelles, chez Decq et Muquardt; à Gand, chez
Hoste; à Liège, chez De Soer et Decq; les autres vil-
les, chez tous les libraires. Pour l'Allemagne : R.Weigel,
Leipzig. Heberle, Cologne. Pour la France : VcRenouard,
Paris. Pour la Hollande : Martinus Nyuoff, à La Haye.
Pour l'Angleterre et l'Irlande : chez Barthès et Lowell ,
14 Great Marlborough Street, à Londres. — Prix d'a-
bonnement : pour toute la Belgique, (port compris). —
Par an, 8 l'r. — Étranger (port compris). —Allemagne,
10 fr. — France, 11 l'r. — Hollande, S fl. — Angleterre
et Irlande, 8 s. 6 d. — Prix par numéro 40 c. — Tout
abonnement donne droit ù une annonce de 15 lignes,
répétée 2 fois dans Vannée. — Annonces 50 c. la ligne.
— Pour tout ce qui regarde l'administration, la rédac-
tion ou les annonces, s'adresser à J. Edom, imprimeur
à St. Nicolas , (Flandre-Orientale. Belgique) (affranchir).
Les lettres et paquets devront porter pour suscription ,
après l'adresse principale : « Pour la direction du Jour-
nal dès Beaux-Arls. » — Il pourra être rendu compte des
ouvrages dont un exemplaire sera adressé à la rédaction.
SOMMAIRE : Correspondances particulières; Paris
(Exposition). — Aix-la -Chapelle. — Cologne. ■— De la
restauration des églises, par Raymond Bordeaux.— Benoît
Coello. ■— Le peintre Griff. — Berry Patenter. — Con-
cours de chant d'ensemble. — Vente Rolas du Roscu. _
Nouvelles d'atelier. — Annonces.
CORRESPONDANCES PARTICULIÈRES.
Paris.
Exposition des Beaux-Arts.
artistes français 'et étrangers : le paysage. — les
batailles et le genre ■— quelques artistes belges.
Depuis la Renaissance il n'y a peut-être
pas eu dans l'histoire de l'art une époque où
la peinture de paysage ait été plus florissante
qu'elle ne l'est aujourd'hui. Il y a longtemps
aussi qu'une même exposition n'avait réuni
autant d'œuvres capitales de nos paysagistes
les plus justement admirés. Cela nous permet-
tra de nous étendre plus longuement sur ce
genre que sur tout autre ; car tous les maîtres,
nous l'avons déjà dit, sont présents; nous
retrouvons les grands noms de 1850, et, en
plus, ceux de leurs élèves et de leurs nom-
breux imitateurs qui marchent sur leurs tra-
ces.
Parmi les maîtres, et au premier rang, se
place M. Th. Rousseau; nous n'en voulons
d'autre preuve que les deux toiles qu'il a pein-
tes cette année. H y a longtemps que nous
connaissons et que nous admirons ces arbres
au tronc robusle, au feuillage épais, dorés à
leur cîme par le soleil et le pied baigné dans
une fraîche atmosphère d'ombre. L'air circule
à travers cette plantureuse végétation qui
découpe sur le ciel sa vigoureuse silhouet-
te. Au bas, des chaumières tranquilles et
étroites abritées sous l'épaisseur du feuillage.
Cependant le soleil glisse quelques rayons à
travers la verdure opaque et marbre l'épais
gazon de taches lumineuses. Voilà un beau
paysage, vrai, imposant, consciencieusement
étudié et solidement peint, une des meilleu-
res pages entin de M. Th. Rousseau; toute-
fois nous préférons encore ce village que l'au-
teur est allé chercher et copier sur nature
dans les environs de Paris. (Comme il l'avait
déjà fait, du reste, pour les Chaumières sous
les arbres). Une route longue et vue de face,
bordée de chaque côté d'une rangée de pau-
vres chaumières, quelques peupliers maigres
et roux, peu de verdure, un terrain couvert
de mousse, voilà tout le paysage que nous
admirons comme un des plus remarquables
tableaux de l'exposition. Si on se place à
une certaine distance, la route s'allonge, les
chaumières s'espacent, les petits personna-
ges qui tout à l'heure faisaient tache sur le
chemin, disparaissent dans l'ensemble; ces
tons jaunes et gris qui attristaient l'œil de
près rendent à s'y méprendre la mélancolie
des teintes dorées de l'automne. Ce paysage
tout entier existe, s'anime; on y marche, on
s'y promène et on s'effraye de la longueur de
la route qui s'étend à perle de vue.
M. Cabat, un des artistes vaillants qui à
l'époque du mouvement romantique luttèrent
avec succès contre les tendances du paysage
historique, reparaît sans avoir rien perdu de
ses qualités M. Cabat, aime les grands as-
pects, les sites imposants, les arbres qui s'é-
lancent noblement sur les bords d'un lac et
les eaux tranquilles garanties de la chaleur
par l'ombre du feuillage. Nous préférons ce-
pendant la Source dans les bois, une délicieuse
retraite, presque sans ciel, pleine de mys-
tère et de fraîcheur, un de ces refuges soli-
taires où l'on voudrait pouvoir aller s'étendre.
Voici encore un des vétérans de 1830, qui
n'est guère connu que de réputation par les
générations nouvelles. M. P. Huet à combattu
aux premiers rangs et l'un des premiers il est
parvenu la réputation. Que ces souvenirs
glorieux le protègent désormais des indis-
crétions de la critique et conservent à son
talent vieilli son ancien prestige.
Il est des maîtres heureusement dont la
verte vieillesse nous console des défaillances
de ceux qui ont perdu leur talent avec leur
jeunesse. Depuis trente ans que M. Corot,
, travaille et lutte, depuis trente ans qu'il étu-
|.die et qu'il expose, il n'a cessé de progresser,
! de mieux pénétrer la poésie profonde de la
nature, d'en rendre avec plus de charme l'as-
pect séduisant. Regardez ce Souvenir de
Morle-Fontaine, ce sont toujours des masses
largement assemblées, aux contours indécis,
aux formes vaporeuses, se reflétant dans une
eau argentée et limpide. Au fond, le soleil
brille de tout son éclat et fait mieux valoir
l'ombre des bosquets qui bordent le lac. Rap-
prochez de ce site pittoresque et riant le Coup
de vent, cet arbre vigoureux qu'une raffale
tord et courbe par un temps sombre et vous
reconnaîtrez que le talent gracieux de M.
Corot, s'il préfère les molles langueurs du
crépuscule, les blanches clartés du soleil,
peut aussi quand il le veut, rendre avec force
les aspects sinistres de la nature, ses tempê-
tes et ses désastres.
Que de noms fameux aussi nous aurons
encore à citer après ces maîtres incontestés
aujourd'hui. M. S. André, après un trop long-
repos, reparait enfin avec un excellent tableau,
une fontaine ombragée de chênes majestueux
aux contours nobles et élégants; ils man-
quent seulement un peu de vigueur; voici
Desjobert, un regrettable artiste, frappé au
momentoù le succès venait a lui, mais les deux
tableaux que sa mort récente a permis d'ex-
poser ne rappellent que de loin ses sympathi-
ques qualités; puis M. Lapito, qui s'arrête
dans les vertes campagnes de la Normandie et
parvient à rendre sans crudité la verdure
franche des pâturages humides. Voyons en
passant les études séduisantes de M. Lambi-
net; les paysages composés de M. Français,
un chercheur, qui n'a pas été heureux cette