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Le Journal d'Abou Naddara = Abū Naẓẓāra = The Man with the Glasses = garīdat abī naẓẓāra = The Journal of the Man with the Glasses = Journal Oriental Illustré — Paris, 1889

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Issue 11 (18.11.1889)
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https://doi.org/10.11588/diglit.56660#0044
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LE PRINCE DE GALLES EN ÉGYPTE
Les nouvelles de source autorisée qui nous parviennent du Caire et d’Alexandrie nous inspirent ces dessins et légendes.
LÉGENDE DU DESSIN N° 1

Baring, vice-roy d’Egypte : Voyons, milord Tyoufik, qui a per-
mis à ce sale peuple de s’introduire dans notre présence? Est-ce vous ?
Tewfik, Khédive anglais : Par la tète de Sa Majesté britannique,
qu’Allah nous conserve, je jure que ce n'est pas moi, Monseigneur. Je
n’aime pas cet ignoble peuple qui m'appelle Al-Ouad-El-Ahbal (l'Enfant
stupide). Ça doit être Riaz.
Baring : Riaz ! Riaz ! Vous abusez de notre bienveillance. Sous le
ministère Nubar ces choses n’arrivaient jamais. Goddem ! Nous ne
les souffrirons pas. Entendez-vous ?
Riaz, premier ministre de l’inutile Tewfik : Par la vénérable
barbe de Lard Salisbury, je jure à votre Altesse sérénissime, ô Mon-
seigneur Baring, que ce n’est pas votre très humble serviteur qui a
autorisé cet immonde peuple égyptien de dégoûter Votre Seigneurie
par sa présence.
Baring : Qui donc les a fait entrer ici ?
Le malheureux peuple égyptien : Nous avons ouvert les portes
de ce palais que nos tyrans ont bâti avec l’argent qu’ils nous ont volé.
Baring (àpart) : Montrons-nous doux, autrement ces sauvages
fanatiques... (au peuplé) : Voyons! Vous savez que les Anglais vous
aiment.
Le peuple : Ils nous ont donné et nous donnent encore des preuves
de leur amour pour tout ce qui nous appartient.
Riaz (àpart) : Attrape ça, Baring.
Tewfik (à part) : Je voudrais que ces gens-là sortent. Tant qu’ils
sont là, je ne suis pas en sûreté.
Baring (au peuple) : Que demandez-vous ? Parlez. On fera droit à
vos réclamations.
Riaz (à part): Notre vice-roy britannique a peur.
Le peuple : Nous demandons l’amnistie des exilés nilotiques;
Tewfik : Précisez, (àpart) : Ma sorcière abyssinienne m'a dit hier
que Satan allait noircir par son souffle infernal la brillante blancheur
de mon étoile, (au peuple) : O mon peuple chéri ! Demandez-vous l’am-
nistie de mon grand oncle, le princeHalim?
Le peuple : Notre Prince Clément n’a pas besoin de ton amnistie,
ô Tewfik; c’est à Allah et au Commandeur de ses fidèles croyants que
nous demandons ce Prince clément qui peut rendre à la Vallée du Nil
la gloire et la prospérité que ton p'èrë et toi lui avez fait perdre.

Baring : Voyons , brave peuple égyptien, je suis sûr que vous nous
demandez le retour d’Ismaïl.
Le peuple : Qu’Allah nous garde de cette peste. Le Sultan qui nous
aime nenous enverra jamais ce monstre, cause principale de nos maux.
Riaz (au peuplé) : Vous demandez à notre seigneur et maître Baring-
Pacha l’aministiedu perfide Abou-Naddara, du fanatique Gemal-Ed-Din
et de John Ninet qui nous embête avec ses écrits. Son dernier livre :
Au Pays des Khédives, est un ouvrage infâme qu’on devrait brûler. Cet
animal-là ne mourra donc jamais ? Sont ces trois imbéciles pour les-
quels vous demandez l’amnistie ?
Le Peuple : Non, ô Riaz, car nous avons besoin d’avoir quelqu’un
â l’étranger qui fasse connaître à nos frères d’Europe combien vous
nous faites souffrir. Nous vous demandons l’amnistie des exilés poli-
tiques internés à Ceylan, et leur prompt retour en Egypte.
Tewfik et Riaz (àpart): Il a donc juré notre perte, ce peuple
maudit?
Baring (à part) : O lord! inspire-moi. (Il réfléchit un instant et
puis dit au peuple) : Eh bien! osez donc douter de notre amour pour
vous. Sachez que nous avons sollicité cette amnistie , depuis un mois,
au Grand-Visir de notre auguste sultane Victoria, lord Salisbury, et sa
Seigneurie nous a répondu que sa Gracieuse Majesté la Reine, heu-
reuse de témoigner aux populations égyptiennes l’affection maternelle
qu’Elle leur porte, a délégué son fils et héritier, S. A. R. le prince de
Galles , chargé de répondre en personne à leurs justes demandes. Etes-
vous satisfaits?
Le Peuple : Nous vous le dirons lorsque vous nous aurez rendu nos
frères exilés. (Ils sortent.)
Tewfik : Il faudrait les arrêter tout de suite!
Riaz : J’attends les ordres de monseigneur Baring pour le faire!
Baring : Goddem ! Ce serait un acte impolitique, et les indigènes
feraient un triste accueil au Prince qui arrive ici dans trois jours.
Tewfik et Riaz : Vous avec parfaitement raison.
Baring (d part) : On a, enfin, écouté mes conseils à Downing-Street.
Que les puissances européennes crient tant qu’elles voudront. Eh bien !
oui. Le prince de Galles venant ici et passant en revue l’armée anglo-
égyptienne , fait un acte de prise de possession du pays. Il n’y a que la
France et la Russie qui pourraient nous nuire.

LEGENDE DU DESSIN N° 2

Tewfik (àpart, à Riaz) : Lés deux mille guinées que nous avons
fait distribuer au peuple pour faire une manifestation enthousiaste au
prince de Galles n’ont servi à rien.
Riaz (àpart, à Tewfik) : J’en étais sûr et certain. Baring a beau
leur promettre les trésors de Karoûn , lés Egyptiens n’aimeront jamais
les Anglais. Voici leurs délégués; ils entrent la tête levée et l’aspect
plein de résolution.
Tewfik (à Riaz) : Ce sont les mêmes à qui Baring a promis l’am-
nistie de nos pires ennemis, Arabi et ses collègues.
Riaz (à Tewfik) : Il a bienfait, et ils sont capables d’être aima-
bles avec le Prince,
Le Peuple (au prince de Galles) : Si tu adhères à notre désir,
Allah te conservera à ta mère, et ton règne sera paisible, heureux et
glorieux. Que tu sois le bienvenu dans notre pays, ô notre hôte
royal !
Le Prince de Galles (au peuple Egyptien) : Nous sommes très
sensibles à votre accueil cordial, et nous vous en remercions au nom
des’ trois cents millions de nos sujets Anglais, Ecossais, Irlandais,
Indiens, Chinois, Américains, Africains et Asiatiques qui, comme vous,
ont pour nous de l’amour et du dévouement.
Tewfik et Riaz (à part, au peuple) : Voyons! battez des mains et
criez : Très bien ! très bien !
Le Peuple (àpart, à Tewfik et Riaz) : Nous ferons cela lorsque le
Prince aura exaucé nos vœux.
Le Prince (à part) : Employons leur langage oriental. (Au peuplé) :
Dignes enfants du Nil doré !
Riaz (àpart) : Il les caresse avant de les étouffer.
Tewfik (à part) : J’en suis jaloux. Le Prince est plus aimable
avec eux qu’avec moi. 11 m’a écrasé les doigts en me serrant la
main.
Le Prince (après une courte pause) : Mes amis.
Riaz ( criant, en extase) : Ecoutez ! écoutez !
Tewfik (avec emphase) : Quelle éloquence !

Le Prince (àpart) : Vils flatteurs! (au peuplé) : Sa Majesté
Impériale et Royale la Reine Victoria, mon Auguste Mère, et le noble
marquis de Salisbury, son premier ministre, persuadés, d’une part,
que le temps était venu de passer une éponge sur le passé, et convaincus,
d’autre part, de la légitimité de vos vœux, avaient depuis longtemps,
à maintes reprises, proposé à Arabi Pacha ainsi qu’à ses illustres
compagnons d’exil de rentrer en Egypte.
Le Peuple (au Prince) : Ta mère et son grand visir ne sont donc
pas aussi anglais que ceux qu’ils nous envoient. La sultane Victoria
est donc une bonne femme et lord Salibouré est un brave homme.
Le Prince (riant) : Oui, mes amis. Je vois que vous connaissez les
femmes et les hommes. Je disais donc qu’ils leur avaient proposé de
rentrer en Egypte. Et, dans ce but, le Gdüvernement anglais s’était
procuré l’assentiment de S. A. le Khédive Tewfik Ier le Grand, et un
décret d’amnistie générale.
Tewfik (à part, à Riaz) : Ce n’ést pas vrai ; je n’ai pas donné mon
assentiment. Ést-ee que je suis fou ? Amnistier mes ennemis acharnés?
Riaz (à part, à Tewfik) : Laissez-Ie finir, mon bien-aimé khédive ; le
Prince dit des blagues politiques.
Le Prince : Eh bien, le croirez-vous, ô mon bon peuple nilotique ?
Cette offre à été refusée.
Riaz (à part, à Tewfik) : Quel blagueur ! Ne vous le disais-je pas,
Monseigneur?
Le Prince : Nous sommes si heureux et si bien traités dans ce
pays béni par Allah, répondirent les patriotes; notre santé y est si par-
faite, la liberté dont nous jouissons est si réjouissante; enfin, grâce à
la munificence de S. A. le Khédive et grâce aussi à la splendide géné-
rosité de la nation britannique, notre bien-être et celui de nos familles
y ést accru dans une telle proportion que nous désirons tous finir nos
jours dans le giron de S. M. Impériale et Royale la Reine Victoria.
Le Peuple (à part) : Cet infidèle se moque de nous, mais ne l’in-
terrompons pas ; laissons-le achever son discours de renard.
Le Prince : Mais, vous ne l’ignorez pas, tues bons amis, chaque
 
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