ANDRÉ MAYNARD.
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souffrais moins de toutes nos atroces misères, de
nos défaites, lorsque je vous regardais; j’étais ras-
suré sur le sort de mon pays en songeant qu’il pos-
sède des femmes comme vous, si simplement hé-
roïques, si charmantes, si bonnes. Et moi-même je
devenais meilleur, je prenais des résolutions pour
l'avenir, je me refaisais au moral comme au phy-
sique en vous observant. Et cependant je me disais
vaguement que je prenais beaucoup de place dans
votre étroit logement, que je mangeais plus que
ma part de vos petites économies. Mais je me refu-
sais à regarder la vérité en face, je ne l’osais pas. Ma
tante, que devez-vous donc penser de moi?
— Ce que je pense, mon cher André, c’est que
si j’avais eu un fils et que ce fils se fût trouvé sauvé
par ta mère, ta mère en eût été heureuse, tout
comme je le suis en ce moment,'où je t’embrasse
de bon cœur !
— Et vous me direz ce que je peux faire pour
vous prouver ma reconnaissance à toutes les deux?
— Il n’y a qu’une façon, c’est en devenant un
grand artiste et en faisant honneur à tes parentes,
Je ne vois que cela, car je ne suppose pas que tu
aies la prétention d’offrir de l’argent à Denise!
— Si j’étais son frère, elle accepterait de partager
le peu que j’ai.
— Oui, ditMmeHémon avec une nuance d’impa-
tience ; seulement, elle n’est pas ta sœur.
— Mais vous me permettrez de la toujours con-
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souffrais moins de toutes nos atroces misères, de
nos défaites, lorsque je vous regardais; j’étais ras-
suré sur le sort de mon pays en songeant qu’il pos-
sède des femmes comme vous, si simplement hé-
roïques, si charmantes, si bonnes. Et moi-même je
devenais meilleur, je prenais des résolutions pour
l'avenir, je me refaisais au moral comme au phy-
sique en vous observant. Et cependant je me disais
vaguement que je prenais beaucoup de place dans
votre étroit logement, que je mangeais plus que
ma part de vos petites économies. Mais je me refu-
sais à regarder la vérité en face, je ne l’osais pas. Ma
tante, que devez-vous donc penser de moi?
— Ce que je pense, mon cher André, c’est que
si j’avais eu un fils et que ce fils se fût trouvé sauvé
par ta mère, ta mère en eût été heureuse, tout
comme je le suis en ce moment,'où je t’embrasse
de bon cœur !
— Et vous me direz ce que je peux faire pour
vous prouver ma reconnaissance à toutes les deux?
— Il n’y a qu’une façon, c’est en devenant un
grand artiste et en faisant honneur à tes parentes,
Je ne vois que cela, car je ne suppose pas que tu
aies la prétention d’offrir de l’argent à Denise!
— Si j’étais son frère, elle accepterait de partager
le peu que j’ai.
— Oui, ditMmeHémon avec une nuance d’impa-
tience ; seulement, elle n’est pas ta sœur.
— Mais vous me permettrez de la toujours con-
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