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inwrmpnin irwi'»iiirfWi''''i'iMiwriviB3?fiWKfigi
Pour tout os qui concerne VAdministration et
la Rédaction, s’adresser à M. Michel Anézo, 7,
rue Rochechouart.
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NOS CANDIDATS
Sans politiquer et sans vous dire : votez pour celui-ci,
ne votez pas pour celui-là, comme le font depuis plus de
quinze jours tous nos confrères du grand format (ne
bâillez pas, je vous prie), nous allons nous permettre de
vous offrir quelques candidats de notre choix.
Vous en ferez ce que vous voudrez ; je le répète, je ne
veux pas du tout vous dire que l’un est meilleur que
l’autre : ce n’est pas mon affaire, c’est à vous de savoir
s’il y en a qui \ aient quelque chose.
Les grands formats (ne bâillez pas, je vous prie) ont
moins de concurrents que nous, ils adoptent un mon-
sieur en disant : Le meilleur chocolat, non, le meilleur
candidat est celui qui n’est pas au coin du quai, c’est-à-
dire le nôtre. Il rend l'argent quand il a cessé de
plaire... Les autres,c’est de la contrefaçon, du retapage,
de vieux rosignols sans valeur que vous devez dédai-
gner.
Eh bien ! non, nous ne voulons pas employer des pro-
cédés semblables ; nous disons franchement qu’il nous
est absolument indifférent que vous votiez pour l’un ou
pour l’autre, nous ne recevons de gratifications de per-
sonne.
Ah ! si nous recevions des gratifications de quelqu’un,
peut-être bien que nous pourrions dire aussi que notre
chocolat, non, notre candidat est le meilleur..., maison
n’est pas venu nous proposer de gratifications.
Donc, nous ne patronnons personne et si nous offrons
quelques candidats de notre choix, c’est tout simplement
parce que nous ne voulons pas qu’on vienne nous dire
que nous quittons l’actualité ; un journal ne doit pas
quitter l’actualité.
Voici les noms que nous recommandons, mais vous
pouvez parfaitement ne pas voter pour eux. Non, nous ne
vous dirons jamais, comme les grands formats (ne bâillez
pas, je vous prie), que vous serez des crétins si vous votez
pour d’autres.
Maintenant, choisissez dans le tas... Il y en a pour tous
les goûts. C’est une vraie occasion.
75 OpO DE RABAIS.
Gagne. Citoyen du peuple universel, archi-grand
prêtre du temple de Salomon, inventeur des bassi-
noires.
Siégerait de tous les côtés.
Touroude. Dit le bel Alfred, démolisseur en chambre,
copie dramatique de jour et de nuit; grand appétit
mais rien dans le ventre.
Siégerait à gauche.
Commerson. Directeur du Tamtam, fondateur du Tim-
tamarre, ami de M. Billion, père de Touchatout n’a
ni chien ni enfants..
Siégerait à l’extrême gauche.
Làssouche. Excellent orateur, organe délicieux, pro-
fond politique, a des mouchoirs de toutes les couleurs.
Siégerait en avant.
Brêbant. N’est pas espagnol, se rase lui-même, sait
faire sauter les lapins, a du nez.
Siégerait devant le buffet.
Billion. Très savant, parle toutes les langues, a le
génie dramatique, mène la vie à grandes guides, politi-
que profond.
Siégerait à la questure.
Albert Wolff. Carré des épaules, très amusant dans
l’intimité des dames, pourrait chanter les basses-
tailles à la chapelle Sixtine, indifférent au poivre et
aux épices.
Siégerait à côté.
Le duc d’en face. Homme du monde, habite hôtel...
meublé de la rue Maubuée, dîne tous les jours à
90 centimes au café anglais de la rue Brisemiche,
porte des chaussettes cachou, fait mettre des fonds à
ses pantalons.
Siégerait à l’extrême droite.
Le Guillois. Descend des croisées comme un peintre
en bâtiments, joue du trombone dans toutes les posi-
tions, n’aime pas le cervelas à l’ail, est rouge après
le pousse-café.
Siégerait de tous les côtés.
Coppée. N’a pas d’opinion, fait des vers de toutes les
couleurs, pas méchant du tout, boit de l’eau de gou-
dron.
Siégerait aux deux extrémités.
Hittemans. Tragédien de grand mérite, nez... de
parents pauvres, croit à la vertu des vierges des Varié»
tés, vénère son concierge, a une montre Breguet à
remontoir.
Siégerait partout,
Frantz Beauvallte. Peut devenir ministre un jour
comme vous ou moi, est vertueux comme la rosière
d’ici, fait des drames et tout ce qui concerne son état
au plus juste prix, aime son papa et sa maman.
Siégerait au x deux centres.
Alexandre Du val. Connu avantageusement par les
bouillons... que lui a fait boire la Cruch... pas fort au
LrE BXFFLET
pistolet, ne peut se toucher à bout portant ni abattre
une poupée à quinze pas, boit de la gomme.
Siégerait aux avant-scènes.
Oswald. Dit le beau François, n’a pas d’ennemis, respecte
les femmes, écrit comme Voltaire, n’a jamais de taba-
tière sur lui.
Siégerait à droite.
Hyacinthe. Grand prédicateur marié, joue les comiques
d’une façon remarquable, se cache dans sonnez quand
il veut se dissimuler, théologien très fort, a eu un prix
de tragédie dans sa jeunesse.
Siégerait où l’on voudra.
Michel Anézo.
L'ART DE VIVRE A L'OEIL
On s’imagine en général que la vie coûte cher à Pa-
ris; on a tort. Rien n’est plus facile que de s’y procurer
divers moyens d’existence aussi infaillibles qu’ingé-
nieux.
Pour vous en convaincre, suivez exactement mon petit
programme..
Vous venez de débarquer dans l’ex-capitale de la
civilisation. Vos bagages, votre femme et votre porte-
monnaie ont été broyés dans le trajet.
Vous voilà, c’est déjà quelque chose ; mais il ne vous
reste plus un centime.
Bah! avec un peu d’intelligence et beaucoup d’aplomb,
on a vite suppléé au défaut d’argent; il ne s’agit que de
savoir mettre en pratique mes préceptes :
1° Déjeuner.
De l’air du temps ; c’est très sain, quand il fait beau.
Si cette nourriture paraissait insuffisante, aller visi-
ter l’atelier de M.Puvis de Ghavannes; comme les croû-
tes n’y manquent pas, on est vite rassasié.
2° Plaisirs gratuits.
Visiter la Morgue et retenir plusieurs dalles pour ses
créanciers.
Se faire arracher une dent, n’importe laquelle, de pré-
férence celle de sagesse.
Contempler le nez d’Hyacinthe et l’écumoire de L.
Veuillot.
3° Rafraîchissements.
Déguster le vin de l’Entrepôt, sous le fallacieux pré-
texte que l’on veut monter sa cave.
Piquer une tête dans le bassin du Palais-Royal.
Embrasser les jolies femmes que l’on a la veine de ren-
contrer ; il n’y a rien de tel pour se rafraîchir les idées.
4° Argent de poche.
Pour s’en procurer, l’emprunter dans celle du voisin.
Si l’on est surpris en flagrant délit, prétendre que l’on
croyait prendre son mouchoir.
5° Blanchissage.
Se jeter au milieu d’une querelle de ménage et laver
son linge sale,.. dans la famille des autres.
6° Tabac.
Aviser le premier passant qui fume un londrés, et le
lui cueillir entre les lèvres, en lui disant :
— Vous savez bien que votre femme vous défend de
fumer.
Il se fâche, vous jette au visage la carte de son
chapelier; vous ripostez par celle de votre cordonnier.
Vous avez une affaire sur les bras, mais un excellent ci-
gare à la bouche.
7° Habillement.
Choisir un de ses amis les mieux vêtus, l’inviter à
prendre un bain de Seine, et dès qu’il s’est mis à l’eau,
s’emparer rapidement de ses habits, en lui criant ; au re-
voir !
8" Café.
Entrer dans un tripot distingué, jouer gros jeu, faire
sauter la coupe, et si l’on vous traite de grec, répondre
qu’on est Auvergnat.
9° Dîner.
Séjourner pendant quelque temps aux halles, devant
les arlequins, et humer l’odeur exquise qui s’en exhale.
10° Coucher.
Se présenter chez un fabricant de sommiers élasti-
ques, marchander un lit complet, demander à l'essayer
pour une nuit.
Se retirer, après avoir fait le tour du cadran, en di-
sant au marchand : Décidément, mon vieux, votre lit
ne fait pas mon affaire ; il y a des punaises ! 1 !
Raoul Faüvel.
ALBERT GLATIGNY
Glatigny vient d’achever son rêve.
Il a beaucoup aimé, beaucoup souffert, beaucoup
chanté ; c’était un véritable poète, — le seul peut-être
de toute cette pléiade rabougrie qu’on appelle les Par-
nassiens.
Enfant de la nature, il doit tout à lui-même.
C’est lui qui s’est fait lettré, érudit même en littéra-
ture. A coup sûr, ce n’est pas son père, gendarme nor-
mand, qui lui a inculqué le sentiment de la poésie.
Bien au contraire, les premiers déboires du jeune nour-
risson des Muses lui sont venus de la pression pater-
nelle.
S’il eût été doué, du côté de la fortune, aussi bien
qu’Edouard Pailleron, par exemple, il serait resté au
foyer paternel et n’aurait jamais été bohème et vaga-
bond ; il n’aurait jamais su ce que c’était que la dou-
leur ; il n’aurait pas passé des jours et des jours sans
manger... mais...
Il n’aurait pas été poète plus que Pailleron.
Il faut avoir vécu de la vie amère pour être homme
et surtout pour être poète.
Albert Glatigny n’avait que trente-quatre ans, et il
laisse plus de vers que n’en laissera jamais Auguste
Barbier, le poète d’un jour.
Il en laisse qui, comme ceux de Piron, ne se vendront
jamais au grand jour, tels que, par exemple, le Vidame
de la Braguette ; mais là, comme La Fontaine dans
ses contes, il a semé le meilleur et le plus pur de son
esprit.
Ce qu’il lui. fallait, c’ét'ait surtout la liberté.
Malgré sa misère, il l’a toujours conservée dans ses
allures, préférant être comédien nomade que de séjour-
ner trop longtemps dans le même endroit.
Un journal sympathique qui l’appelle descendant de
Gringoire se trompe dans son rapprochement. Gringoire
était moins fort que Glatigny.
S’il a été acteur, ce n’était pas par passion, mais bien
par nécessité de vivre, et s’il a vanté son rôle de deuxiè-
me sénateur dans Y Othello d’Alfred de Vigny, c’était
pour se plaisanter lui-même, comme cela lui est arrivé
souvent.
Vous dites que Banville était son maître !
Banville est froid, correct, méthodique, mosaïste, sans
souffle, sans inspiration ; tandis que Glatigny est vrai-
ment lyrique et vivant, dans le comique aussi bien que
dans le côté sombre.
Banville n’a jamais fait que du métier.
Glatigny a toujours fait de la poésie.
Aussi habiles l’un que l’autre à manier le rhythme,
la nature a arrêté là la ressemblance. Banville est un
diminutif microscopique de Gautier. Glatigny est lui-
même.
C’est dur pour les Parnassiens, mais il est temps d’en
prendre son parti. La poésie n’est ni dans les mots, ni
dans le rhythme, elle est dans l’âme.
C est parce que je sais cela que je crie haro sur Pail-
leron et sur Coppée, sans parler du menu fretin, — des
mülimes de la monnaie de 1830.
Allez donc voir si Victor Hugo se pique autant qu’eux
de correction !
Il est vrai que son génie perce partout.
Glatigny était plus complet que Musset, quoique son
œuvre soit plus heurtée et moins homogène.
Il avait une mémoire prodigieuse et aurait récité Mus-
set, Hugo même presque en entier. Il lui suffisait de lire
ou d’entendre une fois un morceau pour le retenir. Il
savait plus de 60,000 vers.
De là la richesse de ses expressions.
De là aussi sa facilité à improviser.
Depuis Eugène de Pradel, jamais poète n’avait été
mieux doué sous ce rapport.
C’est, du reste, en l’écoutant que je me suis aperçu
que je pouvais improviser moi-même.
Il improvisait sans écrire, comme d’autres parlent, —
comme M. Jourdain faisait de la prose, •— comme cela
m’arrive souvent endormant.
Il improvisait avec toutes les difficultés requises, en
présence d’un public qui le sifflait comme acteur et l’âp-
plaudissait comme poète.
Mais, presque tous ses derniers morceaux publiés dans
le Rappel étaient de véritables improvisations écrites au
courant de la plume.
Il lui était aussi facile, plus facile peut-être d’écrire
en vers qu en prose. Après cela, comparez les rimaille-
ries de certains, et jugez.
Jamais il ne lui est arrivé d’être banal ; il n’a sacri-
fié ni le fond, ni la forme ; c’est ce qui fait sa supériorité.
On relira souvent les Vignes folles et les Flèches
d or ; on ne lira pas moins la Presse nouvelle, le Fer
rouge, Fifres et Sifflets, ces satires verveuses du
poète souffrant.
Récemment, le théâtre Gluny a repris Sous les Sau-
les ; espérons qu’il donnera au plus vite l'illustre BrP
zacier, le dernier ouvrage de notre ami.
Avec cette facilité prodigieuse qui le caractérise, il
est naturel qu il se soit amusé à toutes sortes d’excentrR
cités et de tours de force, comme par exemple, dans
Gilles et Pasquins.
Comme homme, ce bon camarade avait un physique
impossible, à force de maigreur.
Grand, sec, gêné dans ses moindres mouvements, il
ne savait que faire ni de ses bras, ni de sa tête, ni de
ses jambes; — ces dernières ne le servaient bien que
dans ses fantastiques voyages.
Mais, ainsi bâti, comment pouvait-il réussir au théâ-
tre?
Et dire qu’un jour... on lui a fait jouer PORTHOS
dans la Jeunesse des Mousquetaires !
Il s était mis un faux ventre, mais sa tète !
Il y en a trop long à dire pour une fois ; nous y reviens
drons.
Le GuilLois.
inwrmpnin irwi'»iiirfWi''''i'iMiwriviB3?fiWKfigi
Pour tout os qui concerne VAdministration et
la Rédaction, s’adresser à M. Michel Anézo, 7,
rue Rochechouart.
iAÆw8PBB5^95iB'iT13Jül^'j^haBaagiiKA^kiE38
NOS CANDIDATS
Sans politiquer et sans vous dire : votez pour celui-ci,
ne votez pas pour celui-là, comme le font depuis plus de
quinze jours tous nos confrères du grand format (ne
bâillez pas, je vous prie), nous allons nous permettre de
vous offrir quelques candidats de notre choix.
Vous en ferez ce que vous voudrez ; je le répète, je ne
veux pas du tout vous dire que l’un est meilleur que
l’autre : ce n’est pas mon affaire, c’est à vous de savoir
s’il y en a qui \ aient quelque chose.
Les grands formats (ne bâillez pas, je vous prie) ont
moins de concurrents que nous, ils adoptent un mon-
sieur en disant : Le meilleur chocolat, non, le meilleur
candidat est celui qui n’est pas au coin du quai, c’est-à-
dire le nôtre. Il rend l'argent quand il a cessé de
plaire... Les autres,c’est de la contrefaçon, du retapage,
de vieux rosignols sans valeur que vous devez dédai-
gner.
Eh bien ! non, nous ne voulons pas employer des pro-
cédés semblables ; nous disons franchement qu’il nous
est absolument indifférent que vous votiez pour l’un ou
pour l’autre, nous ne recevons de gratifications de per-
sonne.
Ah ! si nous recevions des gratifications de quelqu’un,
peut-être bien que nous pourrions dire aussi que notre
chocolat, non, notre candidat est le meilleur..., maison
n’est pas venu nous proposer de gratifications.
Donc, nous ne patronnons personne et si nous offrons
quelques candidats de notre choix, c’est tout simplement
parce que nous ne voulons pas qu’on vienne nous dire
que nous quittons l’actualité ; un journal ne doit pas
quitter l’actualité.
Voici les noms que nous recommandons, mais vous
pouvez parfaitement ne pas voter pour eux. Non, nous ne
vous dirons jamais, comme les grands formats (ne bâillez
pas, je vous prie), que vous serez des crétins si vous votez
pour d’autres.
Maintenant, choisissez dans le tas... Il y en a pour tous
les goûts. C’est une vraie occasion.
75 OpO DE RABAIS.
Gagne. Citoyen du peuple universel, archi-grand
prêtre du temple de Salomon, inventeur des bassi-
noires.
Siégerait de tous les côtés.
Touroude. Dit le bel Alfred, démolisseur en chambre,
copie dramatique de jour et de nuit; grand appétit
mais rien dans le ventre.
Siégerait à gauche.
Commerson. Directeur du Tamtam, fondateur du Tim-
tamarre, ami de M. Billion, père de Touchatout n’a
ni chien ni enfants..
Siégerait à l’extrême gauche.
Làssouche. Excellent orateur, organe délicieux, pro-
fond politique, a des mouchoirs de toutes les couleurs.
Siégerait en avant.
Brêbant. N’est pas espagnol, se rase lui-même, sait
faire sauter les lapins, a du nez.
Siégerait devant le buffet.
Billion. Très savant, parle toutes les langues, a le
génie dramatique, mène la vie à grandes guides, politi-
que profond.
Siégerait à la questure.
Albert Wolff. Carré des épaules, très amusant dans
l’intimité des dames, pourrait chanter les basses-
tailles à la chapelle Sixtine, indifférent au poivre et
aux épices.
Siégerait à côté.
Le duc d’en face. Homme du monde, habite hôtel...
meublé de la rue Maubuée, dîne tous les jours à
90 centimes au café anglais de la rue Brisemiche,
porte des chaussettes cachou, fait mettre des fonds à
ses pantalons.
Siégerait à l’extrême droite.
Le Guillois. Descend des croisées comme un peintre
en bâtiments, joue du trombone dans toutes les posi-
tions, n’aime pas le cervelas à l’ail, est rouge après
le pousse-café.
Siégerait de tous les côtés.
Coppée. N’a pas d’opinion, fait des vers de toutes les
couleurs, pas méchant du tout, boit de l’eau de gou-
dron.
Siégerait aux deux extrémités.
Hittemans. Tragédien de grand mérite, nez... de
parents pauvres, croit à la vertu des vierges des Varié»
tés, vénère son concierge, a une montre Breguet à
remontoir.
Siégerait partout,
Frantz Beauvallte. Peut devenir ministre un jour
comme vous ou moi, est vertueux comme la rosière
d’ici, fait des drames et tout ce qui concerne son état
au plus juste prix, aime son papa et sa maman.
Siégerait au x deux centres.
Alexandre Du val. Connu avantageusement par les
bouillons... que lui a fait boire la Cruch... pas fort au
LrE BXFFLET
pistolet, ne peut se toucher à bout portant ni abattre
une poupée à quinze pas, boit de la gomme.
Siégerait aux avant-scènes.
Oswald. Dit le beau François, n’a pas d’ennemis, respecte
les femmes, écrit comme Voltaire, n’a jamais de taba-
tière sur lui.
Siégerait à droite.
Hyacinthe. Grand prédicateur marié, joue les comiques
d’une façon remarquable, se cache dans sonnez quand
il veut se dissimuler, théologien très fort, a eu un prix
de tragédie dans sa jeunesse.
Siégerait où l’on voudra.
Michel Anézo.
L'ART DE VIVRE A L'OEIL
On s’imagine en général que la vie coûte cher à Pa-
ris; on a tort. Rien n’est plus facile que de s’y procurer
divers moyens d’existence aussi infaillibles qu’ingé-
nieux.
Pour vous en convaincre, suivez exactement mon petit
programme..
Vous venez de débarquer dans l’ex-capitale de la
civilisation. Vos bagages, votre femme et votre porte-
monnaie ont été broyés dans le trajet.
Vous voilà, c’est déjà quelque chose ; mais il ne vous
reste plus un centime.
Bah! avec un peu d’intelligence et beaucoup d’aplomb,
on a vite suppléé au défaut d’argent; il ne s’agit que de
savoir mettre en pratique mes préceptes :
1° Déjeuner.
De l’air du temps ; c’est très sain, quand il fait beau.
Si cette nourriture paraissait insuffisante, aller visi-
ter l’atelier de M.Puvis de Ghavannes; comme les croû-
tes n’y manquent pas, on est vite rassasié.
2° Plaisirs gratuits.
Visiter la Morgue et retenir plusieurs dalles pour ses
créanciers.
Se faire arracher une dent, n’importe laquelle, de pré-
férence celle de sagesse.
Contempler le nez d’Hyacinthe et l’écumoire de L.
Veuillot.
3° Rafraîchissements.
Déguster le vin de l’Entrepôt, sous le fallacieux pré-
texte que l’on veut monter sa cave.
Piquer une tête dans le bassin du Palais-Royal.
Embrasser les jolies femmes que l’on a la veine de ren-
contrer ; il n’y a rien de tel pour se rafraîchir les idées.
4° Argent de poche.
Pour s’en procurer, l’emprunter dans celle du voisin.
Si l’on est surpris en flagrant délit, prétendre que l’on
croyait prendre son mouchoir.
5° Blanchissage.
Se jeter au milieu d’une querelle de ménage et laver
son linge sale,.. dans la famille des autres.
6° Tabac.
Aviser le premier passant qui fume un londrés, et le
lui cueillir entre les lèvres, en lui disant :
— Vous savez bien que votre femme vous défend de
fumer.
Il se fâche, vous jette au visage la carte de son
chapelier; vous ripostez par celle de votre cordonnier.
Vous avez une affaire sur les bras, mais un excellent ci-
gare à la bouche.
7° Habillement.
Choisir un de ses amis les mieux vêtus, l’inviter à
prendre un bain de Seine, et dès qu’il s’est mis à l’eau,
s’emparer rapidement de ses habits, en lui criant ; au re-
voir !
8" Café.
Entrer dans un tripot distingué, jouer gros jeu, faire
sauter la coupe, et si l’on vous traite de grec, répondre
qu’on est Auvergnat.
9° Dîner.
Séjourner pendant quelque temps aux halles, devant
les arlequins, et humer l’odeur exquise qui s’en exhale.
10° Coucher.
Se présenter chez un fabricant de sommiers élasti-
ques, marchander un lit complet, demander à l'essayer
pour une nuit.
Se retirer, après avoir fait le tour du cadran, en di-
sant au marchand : Décidément, mon vieux, votre lit
ne fait pas mon affaire ; il y a des punaises ! 1 !
Raoul Faüvel.
ALBERT GLATIGNY
Glatigny vient d’achever son rêve.
Il a beaucoup aimé, beaucoup souffert, beaucoup
chanté ; c’était un véritable poète, — le seul peut-être
de toute cette pléiade rabougrie qu’on appelle les Par-
nassiens.
Enfant de la nature, il doit tout à lui-même.
C’est lui qui s’est fait lettré, érudit même en littéra-
ture. A coup sûr, ce n’est pas son père, gendarme nor-
mand, qui lui a inculqué le sentiment de la poésie.
Bien au contraire, les premiers déboires du jeune nour-
risson des Muses lui sont venus de la pression pater-
nelle.
S’il eût été doué, du côté de la fortune, aussi bien
qu’Edouard Pailleron, par exemple, il serait resté au
foyer paternel et n’aurait jamais été bohème et vaga-
bond ; il n’aurait jamais su ce que c’était que la dou-
leur ; il n’aurait pas passé des jours et des jours sans
manger... mais...
Il n’aurait pas été poète plus que Pailleron.
Il faut avoir vécu de la vie amère pour être homme
et surtout pour être poète.
Albert Glatigny n’avait que trente-quatre ans, et il
laisse plus de vers que n’en laissera jamais Auguste
Barbier, le poète d’un jour.
Il en laisse qui, comme ceux de Piron, ne se vendront
jamais au grand jour, tels que, par exemple, le Vidame
de la Braguette ; mais là, comme La Fontaine dans
ses contes, il a semé le meilleur et le plus pur de son
esprit.
Ce qu’il lui. fallait, c’ét'ait surtout la liberté.
Malgré sa misère, il l’a toujours conservée dans ses
allures, préférant être comédien nomade que de séjour-
ner trop longtemps dans le même endroit.
Un journal sympathique qui l’appelle descendant de
Gringoire se trompe dans son rapprochement. Gringoire
était moins fort que Glatigny.
S’il a été acteur, ce n’était pas par passion, mais bien
par nécessité de vivre, et s’il a vanté son rôle de deuxiè-
me sénateur dans Y Othello d’Alfred de Vigny, c’était
pour se plaisanter lui-même, comme cela lui est arrivé
souvent.
Vous dites que Banville était son maître !
Banville est froid, correct, méthodique, mosaïste, sans
souffle, sans inspiration ; tandis que Glatigny est vrai-
ment lyrique et vivant, dans le comique aussi bien que
dans le côté sombre.
Banville n’a jamais fait que du métier.
Glatigny a toujours fait de la poésie.
Aussi habiles l’un que l’autre à manier le rhythme,
la nature a arrêté là la ressemblance. Banville est un
diminutif microscopique de Gautier. Glatigny est lui-
même.
C’est dur pour les Parnassiens, mais il est temps d’en
prendre son parti. La poésie n’est ni dans les mots, ni
dans le rhythme, elle est dans l’âme.
C est parce que je sais cela que je crie haro sur Pail-
leron et sur Coppée, sans parler du menu fretin, — des
mülimes de la monnaie de 1830.
Allez donc voir si Victor Hugo se pique autant qu’eux
de correction !
Il est vrai que son génie perce partout.
Glatigny était plus complet que Musset, quoique son
œuvre soit plus heurtée et moins homogène.
Il avait une mémoire prodigieuse et aurait récité Mus-
set, Hugo même presque en entier. Il lui suffisait de lire
ou d’entendre une fois un morceau pour le retenir. Il
savait plus de 60,000 vers.
De là la richesse de ses expressions.
De là aussi sa facilité à improviser.
Depuis Eugène de Pradel, jamais poète n’avait été
mieux doué sous ce rapport.
C’est, du reste, en l’écoutant que je me suis aperçu
que je pouvais improviser moi-même.
Il improvisait sans écrire, comme d’autres parlent, —
comme M. Jourdain faisait de la prose, •— comme cela
m’arrive souvent endormant.
Il improvisait avec toutes les difficultés requises, en
présence d’un public qui le sifflait comme acteur et l’âp-
plaudissait comme poète.
Mais, presque tous ses derniers morceaux publiés dans
le Rappel étaient de véritables improvisations écrites au
courant de la plume.
Il lui était aussi facile, plus facile peut-être d’écrire
en vers qu en prose. Après cela, comparez les rimaille-
ries de certains, et jugez.
Jamais il ne lui est arrivé d’être banal ; il n’a sacri-
fié ni le fond, ni la forme ; c’est ce qui fait sa supériorité.
On relira souvent les Vignes folles et les Flèches
d or ; on ne lira pas moins la Presse nouvelle, le Fer
rouge, Fifres et Sifflets, ces satires verveuses du
poète souffrant.
Récemment, le théâtre Gluny a repris Sous les Sau-
les ; espérons qu’il donnera au plus vite l'illustre BrP
zacier, le dernier ouvrage de notre ami.
Avec cette facilité prodigieuse qui le caractérise, il
est naturel qu il se soit amusé à toutes sortes d’excentrR
cités et de tours de force, comme par exemple, dans
Gilles et Pasquins.
Comme homme, ce bon camarade avait un physique
impossible, à force de maigreur.
Grand, sec, gêné dans ses moindres mouvements, il
ne savait que faire ni de ses bras, ni de sa tête, ni de
ses jambes; — ces dernières ne le servaient bien que
dans ses fantastiques voyages.
Mais, ainsi bâti, comment pouvait-il réussir au théâ-
tre?
Et dire qu’un jour... on lui a fait jouer PORTHOS
dans la Jeunesse des Mousquetaires !
Il s était mis un faux ventre, mais sa tète !
Il y en a trop long à dire pour une fois ; nous y reviens
drons.
Le GuilLois.