Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Toutain, Jules
Les cités romaines de la Tunisie: essai sur l'histoire de la colonisation romaine dans l'Afrique du Nord — Paris, 1895

DOI Seite / Zitierlink: 
https://doi.org/10.11588/diglit.16856#0390

DWork-Logo
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
376

LES CITÉS ROMAINES DE LA TUNISIE,

Les ouvriers de cette œuvre admirable ne vinrent pas de Rome
ni d'Italie; mais il est permis de croire que, sans la paix ro-
maine, l'Afrique serait restée ce qu'elle avait été pendant de
longs siècles sous l'égoïste et stérile domination de Cartilage.

Pas plus que la nature, la population ne fut traitée en enne-
mie et violentée. Rome exigea de ses sujets un loyalisme ab-
solu; mais ce loyalisme était purement politique. La province
devait fournir au peuple romain du blé pour son alimentation,
de l'huile pour ses thermes, ses palestres, ses gymnases ; chaque
ville devait régulièrement payer les impôts dont elle était rede-
vable ; le culte du couple divinisé de Rome et d'Auguste devait
être officiellement célébré dans les cités par les flammes per-
pétuels, à Carthage par l'assemblée provinciale. Ce que Ton
demandait par là aux provinciaux, c'était uniquement de recon-
naître sous trois formes diverses la suprématie de la Cité maî-
tresse du monde et de l'Empereur, qui commandait et gouver-
nait au nom de cette Cité. Quant à la vie privée et intime ; quant
aux sentiments, aux habitudes, aux traditions que tous les peu-
ples aiment parce qu'ils les ont reçus de leurs ancêtres ; quant
à la religion et aux coutumes funéraires, Rome ne s'en préoc-
cupa nullement. Les Africains restèrent absolument libres
d'adopter ou.de dédaigner la civilisation gréco-romaine, à con-
dition que leur attitude ne prît point le caractère d'une révolte
ni d'une protestation contre la domination romaine. Le pro-
consul et ses légats, les procurateurs impériaux, les agents du
gouvernement central n'étaient que des fonctionnaires et des
administrateurs ; ils n'avaient point mission de civiliser, comme
on dirait aujourd'hui, les peuples assujettis, de pénétrer au delà
de la vie publique.

Rome et les empereurs agissaient-ils ainsi par indifférence
ou par dédain? Ou bien, au contraire, appliquaient-ils une mé-
thode, un système préconçu? Il serait difficile de se prononcer.
Du moins, si l'intention nous échappe, les résultats de cette po-
litique sont frappants. Quoi qu'on ait affirmé, il n'y eut pas de
haine entre les vaincus et les vainqueurs ; aucun abîme ne
fut creusé entre eux par le fanatisme religieux ou national ;
l'âme des sujets ne fut envahie par aucun de ces sentiments
profonds d'hostilité et de rancune, que provoque toujours une
guerre faite par des étrangers à des traditions populaires. Au
contraire, les Africains accueillirent avec faveur la civilisation
gréco-romaine, parce qu'on n'avait pas voulu la leur imposer,
 
Annotationen