DROLERIES VÉGÉTALES.
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— Regarde, continua-t-il, comme ils prennent des attitudes
pittoresques !
Les uns semblent courbés sur des coussins, dans des robes
de chambre de soie écrue, ornées de passementeries et d’ara-
besques ; les autres semblent parés de justaucorps et de soubre-
vestes de damas d’or enjolivées de rayures et de palmes vertes.
En voici qui ouvrent leurs lèvres roses pour aspirer la brise
de la nuit; remarque avec moi comme ils étendent tous gra-
cieusement leurs membres couverts de fleurs safranées !
Il s’arrêta un moment comme ravi en extase, puis sa figure
prit une teinte de mélancolie.
— Par malheur, reprit-il, ils ne vivent pas vieux ; ils usent
trop vite de l’existence.
Il est vrai que mon aipitié aveugle leur passe toutes leurs fan-
taisies ; aussi, les plus sensuels d’entre eux contractent-ils de
bonne heure des difformités qui m’avertissent de leur fin.
—Tiens, me dit-il en se baissant sur l’un d’eux, regarde!
celui-ci, par exemple, est couvert ae bosses et de loupes : c’est
un débauché vieilli avant l’âge par l’abus de tous les plaisirs.
Peut-être n’en serait-il pas ainsi, si j’avais usé envers lui de
plus de contrainte, mais je ne puis m’y résoudre.
Seulement, pour consoler leur vieillesse hâtive, j’établis des
apanages et des majorais en faveur de leurs descendants, je
m’engage à conserver à leurs fils les couches sur lesquelles ils
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— Regarde, continua-t-il, comme ils prennent des attitudes
pittoresques !
Les uns semblent courbés sur des coussins, dans des robes
de chambre de soie écrue, ornées de passementeries et d’ara-
besques ; les autres semblent parés de justaucorps et de soubre-
vestes de damas d’or enjolivées de rayures et de palmes vertes.
En voici qui ouvrent leurs lèvres roses pour aspirer la brise
de la nuit; remarque avec moi comme ils étendent tous gra-
cieusement leurs membres couverts de fleurs safranées !
Il s’arrêta un moment comme ravi en extase, puis sa figure
prit une teinte de mélancolie.
— Par malheur, reprit-il, ils ne vivent pas vieux ; ils usent
trop vite de l’existence.
Il est vrai que mon aipitié aveugle leur passe toutes leurs fan-
taisies ; aussi, les plus sensuels d’entre eux contractent-ils de
bonne heure des difformités qui m’avertissent de leur fin.
—Tiens, me dit-il en se baissant sur l’un d’eux, regarde!
celui-ci, par exemple, est couvert ae bosses et de loupes : c’est
un débauché vieilli avant l’âge par l’abus de tous les plaisirs.
Peut-être n’en serait-il pas ainsi, si j’avais usé envers lui de
plus de contrainte, mais je ne puis m’y résoudre.
Seulement, pour consoler leur vieillesse hâtive, j’établis des
apanages et des majorais en faveur de leurs descendants, je
m’engage à conserver à leurs fils les couches sur lesquelles ils