DE BELLE-ISLE. 61
de tant detalens. Toujours en action , toujours plein
de projets , son corps pliait sous les efforts de son
ame ; on aimait en lui la politesse d’un courtisan
aimable et la franchise apparente d’un soldat. Il per-
suadait sans s’exprimer avec éloquence, parce qu’il
paraissait toujours persuadé.
Son frère le chevalier de Belle-Isle avait la même
ambition , les mêmes vues , mais encore plus appro-
fondies, parce qu’une santé plus robuste lui permettait
un travail plus infatigable. Son air plus sombre
était moins engageant ; mais il subjuguait lorsque
son frère insinuait. Son éloquence ressemblait à son
courage ; on y sentait sous un air froid et profondé-
ment occupé quelque chose de violent ; il était
capable de tout imaginer, de tout arranger et de
tout faire.
Ces deux hommes étroitement unis , plus encore
par la conformité des idées que par le sang, entre-
prirent donc de changer la face de l’Europe, aidés
dans ce grand dessein par une dame alors trop pres-
sante. Le cardinal combattit; il donna même au roi
son avis par écrit : et cet avis était contre l’entreprise.
On croyait qu’il se retirerait alors; sa carrière entière
eut été glorieuse ; mais il n’eut pas la force de
renoncer auministère et de vivre avec lui-même sur
le bord de son tombeau.
Le maréchal de Belle-Isle et son frère arrangèrent
tout, et le vieux cardinal présida à une entreprise qu’il
désapprouvait.
Tout sembla d’abord favorable. Le maréchal de
Belle-Isle fut envoyé à Francfort, au camp du roi de
Prusse, et à Dresde poux concerter ces vastes projets
de tant detalens. Toujours en action , toujours plein
de projets , son corps pliait sous les efforts de son
ame ; on aimait en lui la politesse d’un courtisan
aimable et la franchise apparente d’un soldat. Il per-
suadait sans s’exprimer avec éloquence, parce qu’il
paraissait toujours persuadé.
Son frère le chevalier de Belle-Isle avait la même
ambition , les mêmes vues , mais encore plus appro-
fondies, parce qu’une santé plus robuste lui permettait
un travail plus infatigable. Son air plus sombre
était moins engageant ; mais il subjuguait lorsque
son frère insinuait. Son éloquence ressemblait à son
courage ; on y sentait sous un air froid et profondé-
ment occupé quelque chose de violent ; il était
capable de tout imaginer, de tout arranger et de
tout faire.
Ces deux hommes étroitement unis , plus encore
par la conformité des idées que par le sang, entre-
prirent donc de changer la face de l’Europe, aidés
dans ce grand dessein par une dame alors trop pres-
sante. Le cardinal combattit; il donna même au roi
son avis par écrit : et cet avis était contre l’entreprise.
On croyait qu’il se retirerait alors; sa carrière entière
eut été glorieuse ; mais il n’eut pas la force de
renoncer auministère et de vivre avec lui-même sur
le bord de son tombeau.
Le maréchal de Belle-Isle et son frère arrangèrent
tout, et le vieux cardinal présida à une entreprise qu’il
désapprouvait.
Tout sembla d’abord favorable. Le maréchal de
Belle-Isle fut envoyé à Francfort, au camp du roi de
Prusse, et à Dresde poux concerter ces vastes projets