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Ducuing, François [Hrsg.]
L' Exposition Universelle de ... illustrée (Band 2) — Paris, 1867

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https://doi.org/10.11588/diglit.1336#0326
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326

L'EXPOSITION UNIVERSELLE DE 1867 ILLUSTREE.

menacent; nous ne penchons pas de ce côté-
là, en peinture plus qu'en littérature, et
quand parfois nous rencontrerions sur notre
chemin un chercheur trop subtil, ou un raf-
finé trop exquis, ce ne serait pas un cas pen-
dable.

L'originalité de Hamon, la couleur toute
spéciale de ses tableaux, le séparent et l'iso-
lent complètement des œuvres au milieu des-
quelles on l'expose. 11 fait un trou, ou, pour
mieux dire, une tache de lumière dans la pa-
roi sur laquelle on le place avec d'autres
tableaux aux gammes plus sombres.

Ce n'est pas ainsi qu'il jaut le voir. J'ai
parfois rêvé d'être riche. Qui ne fait de temps
en temps ce rêve-là? Je me réservais alors le
plaisir de me faire un petit musée Hamon. Je
le meublaisdans un style néo-grec, ou, tenez!
sans aller si loin, dans ce style Louis XVI,
avec lequel son amour un peu conventionnel
de la nature, d'une nature arrangée à sa
guise, n'est certes pas sans affinité : là, en-
touré de ses plus aimables toiles, j'oublierais
volontiers tout ce dont j'aime à ne me point
souvenir.

On n'a pu exposer les œuvres de Hamon,
au Champ de Mars, dans les conditions ex-
ceptionnelles et peut-être un peu fantaisistes
que je semble exiger; mais on a réuni un
assez grand nombre de tableaux du même
maître, et en les groupant, et les rapprochant
très-habilement, on les a fait valoir les uns
par les autres. Hamon est un de ceux qui ga-
gneront le plus dans l'opinion publique au
grand concours de l'Art en 1867.

L'œil ravi se promène à travers ses toiles.
Il parcourt les actes divers de la comédie hu-
maine, interprétée par cette muse souriante,
et entre tant de figures aimables, il choisit,
pour y revenir et s'y arrêter, celle qui lui
plaira davantage.

Ce n'est pas la moins jolie que nous offrons
aujourd'hui à nos lecteurs, et elle a l'incon-
testable avantage d'être éminemment carac-
téristique de la manière de l'auteur.

C'est une jeune fille, une Hébé, une Aube,
une Aurore, tout ce que l'on voudra de plus
frais et de plus suave, de plus blond, de
de plus rose, de plus vraiment jeune. Elle a
soif, cette mignonne, et plutôt que d'aller
boire au cabaret du coin, — comme ferait une
demoiselle d'Ornans, ou de quelque autre vil-
lage situé sur les terres de M. Courbet, — elle
s'approche d'un convolvulus, et déguste la
rosée dans son calice, plus fin que la mousse-
line d'un verre de Venise, son calice aux
bords enroulés, aux teintes argentées, que
rehausse un vermillon léger.

Vous voyez le tableau, que la pointe de
notre graveur a rendu avec une fidélité pho-
tographique. Le motif était ingénieusement
trouvé, et il a été rendu avec une véritable
habileté de main, et un charme très-réel. Tout
en conservant le flou ravissant et l'exquise
morbidesse qui est l'apanage reconnu des
types caressés par son pinceau, Hamon a su

donner à son personnage une remarquable
correction de lignes. La tête est d'une grâce
adorable, et c'est un trait d'une pureté en-
chanteresse qui dessine le contour de ce beau
corps d'une jeunesse toute virginale. S'il me
fallait, bien malgré moi, signaler quelque
desideratum dans cette œuvre aimable, psut-
être trouverais-je un peu de lourdeur dans les
pieds et dans leurs attaches. Cette jolie bu-
veuse fera ployer la feuille qui la supporte ;
elle défoncera le cellier. Une créature si
aérienne, qui vit de si peu, n'a pas besoin d'une
base aussi large; elle doit voltiger parmi les
fleurs sur lesquelles, tempérante et sobre,
elle butine sa vie. Le pied est la partie la plus
infime de notre être, celle qui nous rattache
à la terre et nous plante au sol ; donnez-en
donc le moins possible à cette idéalité, — tout
juste ce qu'il faut, pour qu'on ne s'aperçoive
pas qu'elle en manque.

Louis Enault.

- IV

L'Artillerie espagnole de montagnes.

En regardant les remarquables modèles
envoyés par les arsenaux espagnols, ces ca-
nons si courts et si légers pesant à peine cent
kilogrammes, ces équipages aux formes sin-
gulières, ces petites roues et ces affûts que
des mulets portent sur leurs dos, bien des
gens se sont demandé si ce matériel de
guerre était vraiment destiné aux combats et
ne représentait pas un matériel qui ne devait
être employé que pour les amusements d'une
parade militaire.

Ceux-là n'ont jamais entendu les soldats
d'Afrique raconter les longues courses de nos
régiments dans les montagnes de l'Algérie, et
ces rudes combats où parfois la journée en-
tière se passait à disputer l'étroit sentier aux
agressions des Kabyles se précipitant sur nos
bataillons d'arrière-garde; ils sauraient que
bien souvent la mitraille des petits canons
avait refoulé l'ennemi et permis d'enlever
les blessés ■—■ que, plus d'une fois, les obus
fouillant au loin les épais buissons de lentis-
ques qui le dérobaient à tous les regards, l'a-
vaient délogé de positions dangereuses et as-
suré le passage de la colonne qui poursuivait
péniblement sa marche ; et, parmi ces vieux
routiers, il n'en est pas un qui n'ait gardé
souvenir de l'un de ces moments terribles où
les secondes paraissent aussi longues que les
heures, et qui ne se rappelle le soulagement
ressenti quand on apercevait les artilleurs
accourant avec leurs mulets, et qu'on les
voyait saisissant leur canon, déchargeant
les roues et l'affût, remontant la pièce en quel-
ques secondes, commençant aussitôt le feu.

Quand j'examinais ces modèles espagnols, la
pensée d'un chasseur de Vincennes nous re-
disant comment, dans une de ces journées
que les Arabes nomment les journées noires,
les petits canons du lieutenant de Berckheim
qui maintenant, je crois, est devenu général,
leur avaient à tous sauvé la vie, me revenait
à l'tesprit. A bout de 'orces, ayant épuisé
leurs munitions, acculés devant un espace
découvert qu'il fallait traverser, ils allaient
être débordés par la multitude des Kabyles,
quand, sans s'inquiéter des balles tombant
comme la grêle autour d'eux, les artilleurs
accourent avec leurs mulets , placent leurs
pièces en batterie, et permettent, par la jus-
tesse et la rapidité de leur tir, à la compagnie
qui, quelques instants plus tard, aurait peut-
être été détruite, de franchir la clairière et de
venir se reformer auprès d'eux.

Les- intéressants récits de notre ami Du-
cuingdans la Revue des Deux-Mondes nous ont
fait connaître les curieuses péripéties de ces
luttes soutenues en Navarre et en Kabylie par
Zumalacarregui et le maréchal Bugeaud, et en
lisant ces pages émouvantes, l'on comprend
les difficultés terribles de ces guerres de
montagne et la nécessité de créer dans les
deux armées un matériel à peu près sem-
blable, unissant la légèreté et la mobilité à
une solidité à toute épreuve, matériel à
l'aide duquel on peut toujours atteindre l'en-
nemi sans jamais être arrêté dans les difficul-
tés du terrain.

L'Espagne, au reste, est bien la terre clas-
sique de la guerre de montagne, et sans re-
monter aux temps héroïques delà lutte contre
l'islamisme, qui de nous pourrait oublier les
guérillas de la grande guerre d'Espagne? Plein
de bravoure et d'énergie, actif et infatigable,
remarquable par sa sobriété et sa constance,
le soldat espagnol est un des meilleurs soldats
du monde, et il possède des aptitudes mer-
veilleuses pour cette guerre difficile et rude
entre toutes; mais l'armée espagnole, très-
instruite et renfermant un grandnombre d'of-
ficiers de mérite, ne nous a pas seulement
envoyé les spécimens de ses canons de mon-
tagnes; les autres pièces d'artillerie, que
l'un de nos dessins représente, sont également
dignes d'attention, et en général les hommes
spéciaux ont été frappés du discernement
qui a présidé au choix des modèles adopté
pour l'équipement et pour le matériel. Il y a
là un élément de force incontestable, et,
puisqu'au Palais du Champ de Mars les
progrès accomplis dans les choses de guerre
paraissent tenir autant de place dans la
curiosité publique que les progrès de l'indus-
trie, nous devions signaler d'une façon toute
particulière les spécimens et les modèles de
matériel de guerre qui font partie de l'expo-
sition espagnole.

Comte de Castellane.
 
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