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ENCYCLOPEDIE DU SIECLE.
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vasque, mais ce rideau ne devient pas lumineux
par lui-même. Dès 1842, le physicien genevois
Golladon avait remarqué que, lorsque la source
lumineuse est faible, un jet reste opaque et la
lumière n'est visible qu'aux points où la veine
liquide se résout en gouttelettes très ténues.
Pour conférer la luminosité à une nappe en mou-
vement, il faut la diviser par des herses qui la
ramènent à l'aspect d'une pluie fine et drue et la
nappe d'eau ainsi traitée s'illumine sous la
lumière des rampes de lampes à incandescence
électriques logées sous les rebords des vasques.
Les ampoules des lampes sont blanches, jaunes,
bleues ou rouges, alignées, montées par rangées
de couleurs différentes, elles sont commandées
séparément ou ensemble, branchées sur des fils
conducteurs. Des rampes de
certaines nuances, interpo
sées entre d'autres
rampes de nuan-
ces différentes, /
tissent à un clavier d'un appareil à godets de
mercure, dont les touches sont rangées par
groupes de quatre, correspondant aux quatre cou-
leurs, chacune élant peinte de la couleur qui lui
est affectée. Sous le clavier est situé un cylindre
horizontal dont les génératrices sont garnies
de tètes de vis qui, lorsque le cylindre est en
rotation, soulèvent les touches pour plonger
l'extrémité de leur levier dans les godets qui éta-
blissent le contact du circuit électrique. La dis-
position est la même pour les circuits des arcs,
niais ici le clavier agit pour faire passer le courant
dans les bobines qui commandent les leviers des
verres colorés à interposer, comme nous l'avons
vu plus haut. Donc, en tournant lentement le
cylindre, l'eau s'illumine des différentes couleurs
prévues dans les motifs
d'orchestration hy-
draulique. Il con-
vient d'ajouter,
pour être
improprement, l'art nouveau. Assez longtemps,
les arts industriels ont vécu, en France, comme à
l'étranger, de pastiches plus ou moins conscien-
cieux, des styles du passé. Depuis l'époque
médiévale, jusqu'au premier empire, on a copié
successivement tous les genres possibles, au gré
d'une mode qui ne voyait rien en dehors de ce
qui a été fait et refait a satiété. Cette môme
mode a accueilli, avec des sarcasmes, les essais
qui se produisaient dans des voies nouvelles, et,
le plus souvent, elle était servie par l'incohérence
et la bizarrerie de ce que l'on offrait à son juge-
ment. Les novateurs exaspéré* par les formes
rectilignes, les allures compassées des styles, se
jetaient dans le contourné à outrance; c'était
l'effet de l'esprit de réaction. Pour faire accepter
des formes ou des couleurs inusitées, il faut pro-
céder par lente accoutumance; d'autre part, l'œil
et le cerveau humains veulent instinctivement
que tout objet soit d'une stabilité rassurante; si
les supports d'un siège, par exemple, s'éloignent
par trop de la verticale, on ne s'y installe pas
sans méfiance. C'est pour avoir méconnu cette
lai que les tentatives de renouveau ont échoué
misérablement : on rencontre encore des fantai-
sistes irréductibles qui ne veulent assagir leurs
formes, mais à côté d'eux des esprits plus sains
s'efforcent, non pas de rajeunir les vieux styles,
partagent la chute
en tranches verticales
et horizontales. L'éclaire-
ment de la chute des vas-
ques est obtenu en haut
par des rampes disposées
sous le larmier de la mar-
gelle, profilé en arc de pa-
rabole au foyer de laquelle
se trouvent les lampes et en bas par des cordons
de lampes placées dans une position inverse, il en
est de même à peu près au bouillonnement de la
grotte supérieure, la chute des niches de l'exôdre
est éclairée vers le haut de la même manière et
vers le bas par des lampes rangées en dessous
d'une glace-dalle.
L'eau de la cascade se teinte en quatre couleurs
distinctes, il y a à peu près 4000 lampes par cou-
leur, ce qui donne un ensemble de 12 000 lampes.
Les^ spectacles d'eaux colorées sont enregistrés,
notés comme la musique d'une partition. Les
orchestrations aqueuses se développent comme la
musique sur les rouleaux d'une boîte à musique.
Au moyen de rhéostats on peut modérer ou
exalter la vivacité d'éclat de telle ou telle rangée
d'ampoules de même qu'on agit sur le son par la
pédale du forte et du piano. Il y a 2376 circuits
électriques ne comportant pas moins de 2U0 kilo-
mètres de conducteurs. Tous ces circuits abou-
Les derniers beaux jours. — Cidres et gaufres.
tout à fait complet, que toutes les lampes à in-
candescence de la cascade sont commandées par
deux appareils identiques à celui que nous ve-
nons de décrire et juxtaposés ; par interposition
d'une sorte de damier les choses se disposent
dans tel ordre que les effets lumineux se produi-
sent tantôt par tranches verticales, tantôt par
tranches horizontales.
L'énergie électrique absorbée par les conbi-
naisons de tous ces effets fluctuent entre 600 et
800 chevaux.
Emile Dieudonné.
Ingénieur des mines.
Nos gravures. — Se produirait-il une modi-
fication dans le goût général, en ce qui concerne
les arts industriels, et surtout ceux du mobilier
et de la décoration d'intérieur? On peut constater
que le public prend un intérêt particulier à toutes
les manifestations de ce que l'on nomme, assez
mais d'apporter, dans des compositions dégagées
de toute imitation, le bon sens et la raison pra-
tique. Le tempérament français est ami de la
mesure en toutes choses; l'extravagance peut
l'étonner, mais ne le séduit pas longtemps.
C'est dans cette direction que doit, chez nous,
s'orienter l'art nouveau. A cet égard, la salle
à manger, dont nous reproduisons plus haut,
un ensemble et des détails, et qui est exposée
aux Invalides, par la maison Damon et Cfilin,
nous fournit une indication précise ; il est im-
possible de rattacher, même par une lointaine assi-
milation, les formes de ce mobilier à un style
catalogué. Les meubles sont simples et d'un
aspect résistant, sans que cette solidité nuise à
l'élégance. Les lignes sont calmes, et n'inquiètent
pas l'œil; la coloration est claire, gaie, sans tons
tapageurs et violents; c'est un endroit calme, pai-
sible, où l'air et la lumière circulent à l'aise et
qui ne peut inspirer que des sensations agréables.
ENCYCLOPEDIE DU SIECLE.
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vasque, mais ce rideau ne devient pas lumineux
par lui-même. Dès 1842, le physicien genevois
Golladon avait remarqué que, lorsque la source
lumineuse est faible, un jet reste opaque et la
lumière n'est visible qu'aux points où la veine
liquide se résout en gouttelettes très ténues.
Pour conférer la luminosité à une nappe en mou-
vement, il faut la diviser par des herses qui la
ramènent à l'aspect d'une pluie fine et drue et la
nappe d'eau ainsi traitée s'illumine sous la
lumière des rampes de lampes à incandescence
électriques logées sous les rebords des vasques.
Les ampoules des lampes sont blanches, jaunes,
bleues ou rouges, alignées, montées par rangées
de couleurs différentes, elles sont commandées
séparément ou ensemble, branchées sur des fils
conducteurs. Des rampes de
certaines nuances, interpo
sées entre d'autres
rampes de nuan-
ces différentes, /
tissent à un clavier d'un appareil à godets de
mercure, dont les touches sont rangées par
groupes de quatre, correspondant aux quatre cou-
leurs, chacune élant peinte de la couleur qui lui
est affectée. Sous le clavier est situé un cylindre
horizontal dont les génératrices sont garnies
de tètes de vis qui, lorsque le cylindre est en
rotation, soulèvent les touches pour plonger
l'extrémité de leur levier dans les godets qui éta-
blissent le contact du circuit électrique. La dis-
position est la même pour les circuits des arcs,
niais ici le clavier agit pour faire passer le courant
dans les bobines qui commandent les leviers des
verres colorés à interposer, comme nous l'avons
vu plus haut. Donc, en tournant lentement le
cylindre, l'eau s'illumine des différentes couleurs
prévues dans les motifs
d'orchestration hy-
draulique. Il con-
vient d'ajouter,
pour être
improprement, l'art nouveau. Assez longtemps,
les arts industriels ont vécu, en France, comme à
l'étranger, de pastiches plus ou moins conscien-
cieux, des styles du passé. Depuis l'époque
médiévale, jusqu'au premier empire, on a copié
successivement tous les genres possibles, au gré
d'une mode qui ne voyait rien en dehors de ce
qui a été fait et refait a satiété. Cette môme
mode a accueilli, avec des sarcasmes, les essais
qui se produisaient dans des voies nouvelles, et,
le plus souvent, elle était servie par l'incohérence
et la bizarrerie de ce que l'on offrait à son juge-
ment. Les novateurs exaspéré* par les formes
rectilignes, les allures compassées des styles, se
jetaient dans le contourné à outrance; c'était
l'effet de l'esprit de réaction. Pour faire accepter
des formes ou des couleurs inusitées, il faut pro-
céder par lente accoutumance; d'autre part, l'œil
et le cerveau humains veulent instinctivement
que tout objet soit d'une stabilité rassurante; si
les supports d'un siège, par exemple, s'éloignent
par trop de la verticale, on ne s'y installe pas
sans méfiance. C'est pour avoir méconnu cette
lai que les tentatives de renouveau ont échoué
misérablement : on rencontre encore des fantai-
sistes irréductibles qui ne veulent assagir leurs
formes, mais à côté d'eux des esprits plus sains
s'efforcent, non pas de rajeunir les vieux styles,
partagent la chute
en tranches verticales
et horizontales. L'éclaire-
ment de la chute des vas-
ques est obtenu en haut
par des rampes disposées
sous le larmier de la mar-
gelle, profilé en arc de pa-
rabole au foyer de laquelle
se trouvent les lampes et en bas par des cordons
de lampes placées dans une position inverse, il en
est de même à peu près au bouillonnement de la
grotte supérieure, la chute des niches de l'exôdre
est éclairée vers le haut de la même manière et
vers le bas par des lampes rangées en dessous
d'une glace-dalle.
L'eau de la cascade se teinte en quatre couleurs
distinctes, il y a à peu près 4000 lampes par cou-
leur, ce qui donne un ensemble de 12 000 lampes.
Les^ spectacles d'eaux colorées sont enregistrés,
notés comme la musique d'une partition. Les
orchestrations aqueuses se développent comme la
musique sur les rouleaux d'une boîte à musique.
Au moyen de rhéostats on peut modérer ou
exalter la vivacité d'éclat de telle ou telle rangée
d'ampoules de même qu'on agit sur le son par la
pédale du forte et du piano. Il y a 2376 circuits
électriques ne comportant pas moins de 2U0 kilo-
mètres de conducteurs. Tous ces circuits abou-
Les derniers beaux jours. — Cidres et gaufres.
tout à fait complet, que toutes les lampes à in-
candescence de la cascade sont commandées par
deux appareils identiques à celui que nous ve-
nons de décrire et juxtaposés ; par interposition
d'une sorte de damier les choses se disposent
dans tel ordre que les effets lumineux se produi-
sent tantôt par tranches verticales, tantôt par
tranches horizontales.
L'énergie électrique absorbée par les conbi-
naisons de tous ces effets fluctuent entre 600 et
800 chevaux.
Emile Dieudonné.
Ingénieur des mines.
Nos gravures. — Se produirait-il une modi-
fication dans le goût général, en ce qui concerne
les arts industriels, et surtout ceux du mobilier
et de la décoration d'intérieur? On peut constater
que le public prend un intérêt particulier à toutes
les manifestations de ce que l'on nomme, assez
mais d'apporter, dans des compositions dégagées
de toute imitation, le bon sens et la raison pra-
tique. Le tempérament français est ami de la
mesure en toutes choses; l'extravagance peut
l'étonner, mais ne le séduit pas longtemps.
C'est dans cette direction que doit, chez nous,
s'orienter l'art nouveau. A cet égard, la salle
à manger, dont nous reproduisons plus haut,
un ensemble et des détails, et qui est exposée
aux Invalides, par la maison Damon et Cfilin,
nous fournit une indication précise ; il est im-
possible de rattacher, même par une lointaine assi-
milation, les formes de ce mobilier à un style
catalogué. Les meubles sont simples et d'un
aspect résistant, sans que cette solidité nuise à
l'élégance. Les lignes sont calmes, et n'inquiètent
pas l'œil; la coloration est claire, gaie, sans tons
tapageurs et violents; c'est un endroit calme, pai-
sible, où l'air et la lumière circulent à l'aise et
qui ne peut inspirer que des sensations agréables.