HISTOIRE. - PARIS ANCIEN. 35
Grand-Châtelet, où l’on continua de s’assembler jusqu’aux dernières années du règne du roi Jean. Ce fut pendant la captivité de
ce prince que Marcel et les échevins firent l’acquisition d’une maison située sur la place de Grève et appelée la Maison aux Piliers.
Ce bâtiment avait anciennement appartenu aux Dauphins de Viennois. Le prix de cet achat fut de 2,400 florins d’or (environ
32,3 00 fr.). Cet édifice fut démoli sous le règne de François Ier, qui fit jeter sur le même emplacement les fondations de
l’Hôtel—de—Ville, achevé sous le règne de Henri ÏV et considérablement agrandi de nos jours.
Charles V avait renoncé à résider à Paris dans sa demeure royale du Louvre, et avait fait construire l’hôtel Saint-Pol sur un
emplacement dans le voisinage duquel se trouve aujourd’hui l’église Saint-Paul-Saint-Louis; il avait donné à cette résidence le
nom d’hôtel solennel des Grands Esb atterrants. Dans les lettres patentes par lesquelles il réunissait ce domaine irrévocablement
au domaine de la Couronne, il-déclara qu’il le faisait « pour la singulière affection qu’il portait audit hôtel, auquel, en plusieurs
plaisirs, il avait acquis et recouvré, à l’aide de Dieu, santé de plusieurs grandes maladies. » Quoique ce palais fût somptueux
pour le temps, c’était moins la magnificence des bâtiments que l’aspect riant de ses jardins étendus le long des bords de la Seine,
qui faisait de ce séjour un lieu de délices. ’ • , ‘ •
Christine de Pisan, en dénombrant les édifices construits par ce roi, n’oublie pas de mentionner « l’église Saint-Paul, auprès
son hostel, que moult fîst amender et accroistre. » Jusqu’à Charles V, la grosse tour du Louvre et son enceinte, élevées par
Philippe-Auguste, avaient servi de résidence aux Valois. C’est là que depuis deux siècles les hauts barons, les grands feudataires
étaient venus, l’un après l’autre, prêter aux rois serment et hommage. Alors, on ne disait pas que telles terres, telles seigneuries
étaient soumises à l’autorité du prince, mais, suivant la formule féodale, on disait qu’elles relevaient de la grosse. Tour du luruvre.
Charles V répara et accrut ce palais. « Le chastel du Louvre, dit Christine de Pisan, fist édifier à neuf moult notable et bel
édifice. » La grosse tour, nommée tour Neuve, tour Ferrand, tour Philippine, était ronde et entourée d’un fossé large et.profond;
ses murs avaient 13 pieds d’épaisseur près du sol, et 12 aux étages supérieurs; elle communiquait au reste du château par
un pont et une galerie de pierre ; une porte de fer en interdisait l’entrée. Par quatre autres portes fortifiées, appelées porteaux,
on pénétrait dans les bâtiments du Louvre, mais la principale entrée donnait sur le bord de la Seine. L’intérieur du château
renfermait une chapelle, un arsenal, des jardins et un grand nombre de cours closes de murailles. Toujours dominé par le
souvenir des épreuves qu’il avait endurées sous sa régence et durant la,captivité du roi Jean, Charles V crut devoir élever, en
avant de la porte Saint-Antoine et à l’extrémité de la rue de ce nom, une sorte de forteresse destinée à tenir le peuple en
respect et à servir de prison aux criminels d’État : nous voulons parler de la trop fameuse Bastille, dont la première pierre avait
été posée en 1369, et qui fut construite sous Hugues Aubriot, prévôt des marchands. Ce n’était, dans l’origine, qu’une porte
fortifiée s’ouvrant sur la rue Saint-Antoine et se rattachant à la nouvelle enceinte élevée par Étienne Marcel. Aux deux tours qui
défendaient cette porte, Charles V en fit ajouter deux nouvelles, et plus tard Charles VI compléta cette forteresse qui se composa
de huit grosses tours reliées par de hautes murailles et entourées d’un fossé. Beaucoup plus tard, sous le règne de Henri II, de
1333 à 1339, on y ajouta les grandes fortifications, consistant en une courtine flanquée de bastions et bordée de larges fossés
à fond de cuve.
Au milieu de ces travaux, et en menant à fin tant de vastes entreprises, mourut Charles V, laissant à la postérité le souvenir
d’un roi sage, intelligent et politique, d’autant plus regretté, qu’après lui, par la permission de Dieu, la France fut éprouvée
par une longue série d’invasions et de calamités. - .
Elles commencèrent avec le règne de Charles VI (1380-1422). Ce roi, bien jeune encore à son avènement, était incapable
de gouverner par lui-même; ses oncles, hommes ambitieux et avides, prirent en main l’autorité, et ne s’en servirent que pour
piller les trésors amassés par Charles V, et pour faire peser sur le peuple des exactions odieuses. Accablés sous le poids des taxes,
les Parisiens se soulevèrent, le 13 novembre 1380, et, ayant en tête Jean Culdoc, prévôt des marchands, ils se portèrent en
armes à l’hôtel du duc d’Anjou, et firent entendre des menaces. Le Gouvernement, saisi de peur, céda tout ce qu’on exigeait de
lui, et fit proclamer l’abolition des aides, subsides, impositions et gabelles qui avaient été établis depuis Philippe-le-Bel. Le peuple
n’en voulut pas moins se livrer à des actes de violence, il pilla les maisons des Juifs et incendia les bureaux de recettes fiscales.
Quatre mois plus tard (1381), on convoqua les États généraux, qui persistèrent à réclamer des économies et des réformes; on ne
tint pas compte de leurs doléances, et le duc d’Anjou fit établir une nouvelle taxe, laquelle consistait en une redevance du
douzième, exigible sur toute marchandise vendue. On était au 28 février 1381. Le lendemain 1er mars, la population parisienne
se souleva, attaqua les agents du fisc, s’empara de l’Hôtel-de-Ville et se livra à des désordres. Les rebelles avaient pris pour
armes des maillets amassés dans un arsenal; on les désigna sous le nom de Maillotins: une fois maîtres de l’Évêché, du Châtelet
et de l’abbaye gaint-Germain, ils ne surent que faire de leur victoire, et le Gouvernement ayant fait arriver des troupes, ils
demandèrent à entrer en composition. Il en coûta la vie aux factieux les plus compromis.
Le 18 juin 1389, la guerre avec les Anglais fut interrompue par une trêve, et le peuple respira un moment. A Paris, on
donna des fêtes; mais aucune n’égala en splendeur celle qui eut lieu à l’occasion de l’entrée solennelle et du couronnement
Grand-Châtelet, où l’on continua de s’assembler jusqu’aux dernières années du règne du roi Jean. Ce fut pendant la captivité de
ce prince que Marcel et les échevins firent l’acquisition d’une maison située sur la place de Grève et appelée la Maison aux Piliers.
Ce bâtiment avait anciennement appartenu aux Dauphins de Viennois. Le prix de cet achat fut de 2,400 florins d’or (environ
32,3 00 fr.). Cet édifice fut démoli sous le règne de François Ier, qui fit jeter sur le même emplacement les fondations de
l’Hôtel—de—Ville, achevé sous le règne de Henri ÏV et considérablement agrandi de nos jours.
Charles V avait renoncé à résider à Paris dans sa demeure royale du Louvre, et avait fait construire l’hôtel Saint-Pol sur un
emplacement dans le voisinage duquel se trouve aujourd’hui l’église Saint-Paul-Saint-Louis; il avait donné à cette résidence le
nom d’hôtel solennel des Grands Esb atterrants. Dans les lettres patentes par lesquelles il réunissait ce domaine irrévocablement
au domaine de la Couronne, il-déclara qu’il le faisait « pour la singulière affection qu’il portait audit hôtel, auquel, en plusieurs
plaisirs, il avait acquis et recouvré, à l’aide de Dieu, santé de plusieurs grandes maladies. » Quoique ce palais fût somptueux
pour le temps, c’était moins la magnificence des bâtiments que l’aspect riant de ses jardins étendus le long des bords de la Seine,
qui faisait de ce séjour un lieu de délices. ’ • , ‘ •
Christine de Pisan, en dénombrant les édifices construits par ce roi, n’oublie pas de mentionner « l’église Saint-Paul, auprès
son hostel, que moult fîst amender et accroistre. » Jusqu’à Charles V, la grosse tour du Louvre et son enceinte, élevées par
Philippe-Auguste, avaient servi de résidence aux Valois. C’est là que depuis deux siècles les hauts barons, les grands feudataires
étaient venus, l’un après l’autre, prêter aux rois serment et hommage. Alors, on ne disait pas que telles terres, telles seigneuries
étaient soumises à l’autorité du prince, mais, suivant la formule féodale, on disait qu’elles relevaient de la grosse. Tour du luruvre.
Charles V répara et accrut ce palais. « Le chastel du Louvre, dit Christine de Pisan, fist édifier à neuf moult notable et bel
édifice. » La grosse tour, nommée tour Neuve, tour Ferrand, tour Philippine, était ronde et entourée d’un fossé large et.profond;
ses murs avaient 13 pieds d’épaisseur près du sol, et 12 aux étages supérieurs; elle communiquait au reste du château par
un pont et une galerie de pierre ; une porte de fer en interdisait l’entrée. Par quatre autres portes fortifiées, appelées porteaux,
on pénétrait dans les bâtiments du Louvre, mais la principale entrée donnait sur le bord de la Seine. L’intérieur du château
renfermait une chapelle, un arsenal, des jardins et un grand nombre de cours closes de murailles. Toujours dominé par le
souvenir des épreuves qu’il avait endurées sous sa régence et durant la,captivité du roi Jean, Charles V crut devoir élever, en
avant de la porte Saint-Antoine et à l’extrémité de la rue de ce nom, une sorte de forteresse destinée à tenir le peuple en
respect et à servir de prison aux criminels d’État : nous voulons parler de la trop fameuse Bastille, dont la première pierre avait
été posée en 1369, et qui fut construite sous Hugues Aubriot, prévôt des marchands. Ce n’était, dans l’origine, qu’une porte
fortifiée s’ouvrant sur la rue Saint-Antoine et se rattachant à la nouvelle enceinte élevée par Étienne Marcel. Aux deux tours qui
défendaient cette porte, Charles V en fit ajouter deux nouvelles, et plus tard Charles VI compléta cette forteresse qui se composa
de huit grosses tours reliées par de hautes murailles et entourées d’un fossé. Beaucoup plus tard, sous le règne de Henri II, de
1333 à 1339, on y ajouta les grandes fortifications, consistant en une courtine flanquée de bastions et bordée de larges fossés
à fond de cuve.
Au milieu de ces travaux, et en menant à fin tant de vastes entreprises, mourut Charles V, laissant à la postérité le souvenir
d’un roi sage, intelligent et politique, d’autant plus regretté, qu’après lui, par la permission de Dieu, la France fut éprouvée
par une longue série d’invasions et de calamités. - .
Elles commencèrent avec le règne de Charles VI (1380-1422). Ce roi, bien jeune encore à son avènement, était incapable
de gouverner par lui-même; ses oncles, hommes ambitieux et avides, prirent en main l’autorité, et ne s’en servirent que pour
piller les trésors amassés par Charles V, et pour faire peser sur le peuple des exactions odieuses. Accablés sous le poids des taxes,
les Parisiens se soulevèrent, le 13 novembre 1380, et, ayant en tête Jean Culdoc, prévôt des marchands, ils se portèrent en
armes à l’hôtel du duc d’Anjou, et firent entendre des menaces. Le Gouvernement, saisi de peur, céda tout ce qu’on exigeait de
lui, et fit proclamer l’abolition des aides, subsides, impositions et gabelles qui avaient été établis depuis Philippe-le-Bel. Le peuple
n’en voulut pas moins se livrer à des actes de violence, il pilla les maisons des Juifs et incendia les bureaux de recettes fiscales.
Quatre mois plus tard (1381), on convoqua les États généraux, qui persistèrent à réclamer des économies et des réformes; on ne
tint pas compte de leurs doléances, et le duc d’Anjou fit établir une nouvelle taxe, laquelle consistait en une redevance du
douzième, exigible sur toute marchandise vendue. On était au 28 février 1381. Le lendemain 1er mars, la population parisienne
se souleva, attaqua les agents du fisc, s’empara de l’Hôtel-de-Ville et se livra à des désordres. Les rebelles avaient pris pour
armes des maillets amassés dans un arsenal; on les désigna sous le nom de Maillotins: une fois maîtres de l’Évêché, du Châtelet
et de l’abbaye gaint-Germain, ils ne surent que faire de leur victoire, et le Gouvernement ayant fait arriver des troupes, ils
demandèrent à entrer en composition. Il en coûta la vie aux factieux les plus compromis.
Le 18 juin 1389, la guerre avec les Anglais fut interrompue par une trêve, et le peuple respira un moment. A Paris, on
donna des fêtes; mais aucune n’égala en splendeur celle qui eut lieu à l’occasion de l’entrée solennelle et du couronnement