DOI Seite / Zitierlink:
https://doi.org/10.11588/diglit.70662#0031
DONATELLO
25
Planté d’aplomb .sur ses deux semelles de fer et
appuyé sur son bouclier fiché en terre, le guer-
rier se tient debout comme un trépied de métal.
L’armure de plates et le plastron de cuir sont moulés
sur le corps; le paludamentum à l’antique, noué
sur la poitrine, est rejeté derrière les épaules et
retombe jusqu’à terre. La draperie est reléguée
dans l’ombre, tandis que le corps se dresse libre
et fier (PI. 2).
Les marbriers florentins imitateurs de la sta-
tuaire romaine sont distancés : la silhouette du
saint Georges ne peut faire penser qu’à l’art grec.
L’athlète des grands jeux helléniques gardait dans
le bronze ou le marbre les signes de sa force victo-
rieuse, même s’il n’avait en main aucun accessoire
de gymnastique; de même ce jeune homme, qui
ne porte ni le casque au front, ni l’épée au côté,
et qui n’a qu’une arme défensive, est si bien
campé, le corps tout entier rejeté de côté, comme
prêt à se mettre en garde, le visage et le regard
droits, comme pour un défi, qu’il est devenu, dans
le monde moderne, le type accompli du combat-
tant. Mais le calme des héros antiques et du David
aux yeux sans pupilles n’est plus dans les yeux de
ce Florentin. Hardiment troués, comme les yeux
du saint Marc, ils dardent, sous les sourcils fron-
cés, un regard d’une acuité presque douloureuse.
La vie qui brille en eux est ardente, nerveuse, mo-
derne. En face de ce jeune homme, les hommes
25
Planté d’aplomb .sur ses deux semelles de fer et
appuyé sur son bouclier fiché en terre, le guer-
rier se tient debout comme un trépied de métal.
L’armure de plates et le plastron de cuir sont moulés
sur le corps; le paludamentum à l’antique, noué
sur la poitrine, est rejeté derrière les épaules et
retombe jusqu’à terre. La draperie est reléguée
dans l’ombre, tandis que le corps se dresse libre
et fier (PI. 2).
Les marbriers florentins imitateurs de la sta-
tuaire romaine sont distancés : la silhouette du
saint Georges ne peut faire penser qu’à l’art grec.
L’athlète des grands jeux helléniques gardait dans
le bronze ou le marbre les signes de sa force victo-
rieuse, même s’il n’avait en main aucun accessoire
de gymnastique; de même ce jeune homme, qui
ne porte ni le casque au front, ni l’épée au côté,
et qui n’a qu’une arme défensive, est si bien
campé, le corps tout entier rejeté de côté, comme
prêt à se mettre en garde, le visage et le regard
droits, comme pour un défi, qu’il est devenu, dans
le monde moderne, le type accompli du combat-
tant. Mais le calme des héros antiques et du David
aux yeux sans pupilles n’est plus dans les yeux de
ce Florentin. Hardiment troués, comme les yeux
du saint Marc, ils dardent, sous les sourcils fron-
cés, un regard d’une acuité presque douloureuse.
La vie qui brille en eux est ardente, nerveuse, mo-
derne. En face de ce jeune homme, les hommes