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La chronique des arts et de la curiosité — 1885

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Nr. 6 (7 Février)
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https://doi.org/10.11588/diglit.18474#0054
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LA CHRONIQUE DES ARTS

Uh

qu'il « m'estime et me connaît de longue date»;
sans cela, quelle volée de bois vert j'eusse re-
çue !

Je lui témoignerai moins vivement l'estime que
je fais de son talent, ainsi que de son savoir, lequel
nous a donné une restitution de Pompeï dans une
féerie; celles d'une des républiques italiennes du
xV siècle dans la Haine, du Directoire dans une
pièce qu'il dut oublier lui-même,et de Byzance dans
Théodora, et duquel je désire quelque autre résur-
rection d'une époque quelconque de notre vieille
France. Les sujets et les prétextes ne manqueront
pas à son imagination.

L'admiration provoquée à Byzance par l'établis-
sement de la coupole sur pendentifs de Sainte-
Sophie, bâtie par deux architectes venus d Asie
Mineure, nous avait semblé une preuve que ce
mode de construction y était nouveau, d'autant
plus que Constantin, dans la création hâtive de
sa nouvelle capitale, manquant de matériaux et
d'ouvriers, avait dû recouvrir en charpente la
plupart de ses édifices.

Aussi avons-nous écrit, à propos de la vaste
salle couverte par une coupole sur pendentifs, où
se passe le lef acte de Théodora, que ce décor se
trouvait en contradiction avec les faits, à prendre
les choses avec rigueur, et que cette voûte avan-
çait de quelques années quant à la forme.

C'est que nous savions bien que la coupole sur
plan carré existait depuis longtemps, mais ail-
leurs, et pour couvrir des surfaces de dimen-
sionsassezrestreintes. Nous avions vu, à Ravenne,
le tombeau de Galla Placidia, qui se place entre
les années 440 et 4S5, et M. Choisy, dans son
beau livre sur Y Art de bâtir chez les Byzantins,
indique, comme voûtées en coupoles sur penden-
tifs, de l'année 313 à l'année 330, les basiliques de
Sardes, d'Ephèse et de Philadelphie, villes de la
région d'où sont venus précisément les deux ar-
chitectes de Sainte-Sophie.

Quant à M. le comte Melchior de Vogué, dont
M. V. Sardou cite l'autor ité, je n'ai point trouvé
qu'il parlât de la date des premières coupoles sur
pendentifs dans son livre sur les Eglises de la
Terre Sainte. Dans celui qu'il a consacré à Y Ar-
chitecture civile et religieuse de la Syrie centrale, il
renvoie précisément à Sainte-Sophie de Constau-
tinople, déclarant que « dans la région et pendant
la période qu'il s'est proposé de décrire, c'est-à-
dire dans la Syrie centrale, du icr au vuc siècle, la
coupole n'apparaît qu'accidentellement, par essais
timides ». (Page 17.)

Je n'ai été nullement surpris de voir sur la table
d'Andréas, au troisième tableau, de la vaisselle
rouge et des verres colorés. C'est un fait que j'ai
constaté afin de donner une idée du soin apporté
à la mise en scène jusque dans ses moindres dé-
tails, et non pour le critiquer. Ma critique porte
sur l'ensemble du décor.

M. Victorien Sardou opposant le caractère d'un
Grec de vieille roche à celui des Byzantins, j'avais
cru qu'il avait eu également l'intention d'opposer
'intérieur d'une maison grecque d'ancien style,
appartenant à la Byzance de Septime-Sévère, à
une salle de palais construite et décorée dans ' le
style nouveau. Or, j'ai écrit que la restitution eût
pu être plus conforme aux renseignements que
nous donne Pompeï.

« Il y a Pompeï ! » s'écrie M. V. Sardou.

Oui, il y a Pompeï. Mais où donc M. V. Sardou

a-t-il pris les renseignements qu'il a donnés à son
décorateur pour représenter le triclinium de la
maison grecque d'Andréas, sinon dans ce que les
cendres du Vésuve nous ont conservé de la colo-
nie grecque qui fut Pompeï?Il a beau dire et plai-
santer, il ne trouvera aucun renseignement ail
leurs, et le décor du troisième tableau est une
reproduction arrangée de telle ou telle maison de
Pompeï, moins le style de sa décoration. J'aurais
voulu des peintures plus pompéiennes. M. V. Sar-
dou a préféré ce qu'il a fait exécuter. — C'est af-
faire de goût.

L'ami Gerspach est plus qu'un savant, il est un
sorcier s'il connaît les colorations exactes des ver-
rières byzantines qui éclairaient le cabinet de Jus-
tinien, car jusqu'ici on ne connaît pas ces verrières.
Il est à peine démontré qu'il y en eût.

La question du vitrage dans l'antiquité est des
plus obscures, soit dit sans vouloir jouer sur les
mots. Nous savons par Prudence qu'il y avait à
Rome, et en Fraace par Grégoire de Tours, des
vitres colorées à peu près à l'époque de Justinien,
et c'est tout. Peut-être quelques renseignements
pourront-ils nous venir de Ja Perse, où des verres
de couleur enchâssés dans le réseau de marbre ou
de stuc des ouvertures éclairent quelques salles
de bains, croyons-nous. Mais de quelle date sont
ces verres et à quelle date l'usage s'en est-il étendu
vers l'Occident? C'est ce que nous ignorons.

Que quelques fenêtres du palais de Constanti-
nople en aient reçu dès le vie siècle, cela est pos-
sible, et les mosaïques de Saint-Apollinaire-in-
Città, avons-nous dit, semblent prouver qu'il en
fut ainsi dans ce même siècle pour Ravenne. Mais
ce que nous croyons pouvoir nier, c'est qu'on y
ait fermé une aussi grande fenêtre que celle qui
éclaire le cabinet de Justinien avec un réseau de
verres colorés sertis dans l'argent doré ou le
plomb — la matière importe peu — de façon à
imiter certains vitraux domestiques à la mode
d'aujourd'hui.

L'Orient contemporain doit nous servir d'indice
en cela pour l'Orient de jadis.

Si le peintre du décor des jardins de Styrax a
voulu représenter des massifs d'arbres de Judée
et de tamaris en fleurs, il aurait dù l'écrire sur
des étiquettes, comme on le fait au jardin des
Plantes pour l'instruction du public. J'ai vécu
autrefois dans un jardin planté de quelques ar-
bres de Judée — un arbre bien démodé aujour-
d'hui — et j'ai sous mes fenêtres, dans mon
jardin des Gobelins, deux tamaris dont les lon-
gues branches flexibles, au vert feuillage si léger,
plient dans l'été sous de longs panaches de
fleurs rosées ; mais rien dans le jardin de Styrax
ne m'a rappelé ces deux arbres, ce qui n'est pas
la faute de M. V. Sardou.

A propos de la loge impériale, M.V. Sardou me
fait une querelle de mots, mais il est d'accord
avec moi sur la chose.

J'ai dit que la loge impériale dominait l'arène
des deux étages de son aire. En avant du trône,
en effet, le sol s'abaissait et recevait une partie
des gardes... M. Sardou me reprend en préten-
dant « qu'il n'est pas permis de désigner plus
inexactement la terrasse inférieure qui recevait les
gardes de l'empereur ».

Il reconnaît donc qu'il y avait deux étages.
 
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