La chronique des arts et de la curiosité (1891)

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LA CHRONIQUE DES ARTS

d'un chiton court en peau d'agneau. Il jouait
d'un instrument de musique, probablement
d'une cornemuse, et son masque, très fine-
■ ment exécuté, est d'un comique extraordinaire.
C'est un type très exact des acteurs des pièces
d'Aristophane.

Un petit groupe trouvé en Egypte représente
un nain jouant de la trompette à côté d'un
orgue. De la fabrique de Mégare viennent
deux Cérès dont les coiffures énormes et com-
pliquées rappellent plutôt celles de certaines
peuplades polynésiennes que l'arrangement
simple des cheveux dans les statuettes de
Tanagra ou dans la Vénus de Milo.

Ce sont là surtout des curiosités archéologi-
ques ; mais il y a aussi parmi les pièces acqui-
ses des ouvrages d'une rare beauté comme le
petit groupe dit d'Œdipe et d'Antigone venant
de Platées, des figures de femme de la Cyré-
naïque, des moules trouvés à Tarente qui ont
permis de reCaire, deux mille ans après les
artistes grecs, de merveilleux ouvrages; il y
a surtout des fragments de grandes dimen-
sions trouvés près do Smyrne, dont le mode-
lage savant est plein d'élégance évoque le
souvenir des plus belles œuvres do la sta-
tuaire grecque.

**# Le peintre Jean Gigoux vient de faire
présent, au Musée du Luxembourg, du portrait
du général polonais Dwernicki peint par lui,
et qui a figuré à l'Exposition centenale de l'art
français, au Champ-de-Mars, en 1889 ; il a été
reproduit dans la Gazette des Beaux-Arts.

#** M. Jules Toutain, membre de l'École
française de Rome, actuellement on mission
archéologique en Tunisie, a été autorisé à ré-
server pour le Musée du Louvre un certain
nombre de stèles, bas-reliefs et inscriptions
trouvés par lui dans les fouilles de Bou-
Kornein.

Dimanche dernier a eu lieu, au Rane-
lagh, l'inauguration, par le ministre de l'In-
struction publique et des Beaux-Arts, du mo-
nument consacré à La Fontaine dû au ciseau
du sculpteur Dumilàtre. L'architecture du mo-
nument, qui appartient dans le style Louis XV,
a été fournie par M. Franz-Jourdain.

*** La statue en bronze de Méhul, par le
sculpteur Croisy (Salon de 1890), destinée à la
ville de Givet, pays natal de l'illustre musi-
cien, qui devait être élevée par souscription,
n'a pu être encore inaugurée faute de fonds
suffisants. Par les soins du maire de Givet la
souscription est de nouveau ouverte.

*** Dimanche 19 juillet a eu lieu l'inaugu-
ration officielle, place de l'Horloge, à Avignon,
du monument commémoratif de la réunion du
Comtat-Venaissin à la France, en 1791. Ce
monument, élevé par souscription et avec le
concours de l'Etat et de la Ville, est l'œuvre
de deux sculpteurs vauclusiens, MM. Félix
Charpentier et Férigoule. La statue de la
France se dresse sur une colonne de 15 mè-
tres de hauteur ; cette colonne sera accompa-
gnée de quatre groupes symbolisant le Ser-
ment de Fidélité à la France, le Commerce et
la Navigation, la Fontaine de Vaucluse et le
Comtat. Au-dessus du soubassement, un Lion,

symbole de force et de paix, presse à terre-
une épée immobilisée sous sa griffe.

Les modèles qui posent chez les pein-
tres et les sculpteurs, écrit le Temps, ont été
gagnés à leur tour par la fièvre syndicale. Ce
n'est pas qu'ils projettent de faire une révolu-
tion dans la profession qui consiste à fournir
des dieux, des guerriers, des prophètes, etc.,
aux artistes. Ils ne réclament ni augmenta-
tion de salaire ni diminution des heures de
travail. Cela viendra peut-être; mais, pour
l'instant, il se bornent à se liguer contre les
Italiens, maîtres, paraît-il, du marché. C'est
l'Italie qui fournit toujours les Apollons, les
Madones, les Dianes, au détriment des modè-
les français, qui ont la prétention de répon-
dre, comme leurs concurrents, n.ws.desiterata
de l'esthétique la plus scrupuleuse.

Le but du syndicat est, actuellement, de
former une Société de modèles connus, pré-
sentant toutes les garanties d'honorabilité dé-
sirables. Une caisse serait formée pour sub-
venir, en cas de maladie ou de chômage, aux
besoins des syndiqués. En outre, des albums
contenant les photographies des adhérents
seraient mis à la disposition des artistes qui
voudraient se procurer des modèles. On évi-
terait ainsi les pertes de temps que nécessitent
les recherches ordinaires de modèles ; à cet
égard le syndicat croit qu'il remplirait un rôle
d'intermédiaire utile.

#*# Le Congrès international d'anthropolo-
gie et d'archéologie préhistorique fondé en
1866, sur l'initiative de M. G. de Mortillet,
tiendra sa onzième session, à Moscou, du 13
au 20 août 1893. La dixième session a eu lieu
à Paris, pendant l'Exposition Universelle,
sous la présidence de M. de Quatrefages. On
y a émis le vœu d'une réunion en Russie
sous la direction de Mme la comtesse Ouwarow,
présidente de la Société archéologique russe.
Ce vœu vient de recevoir la sanction officielle.
M. Bogdanow, recteur de l'Université de Mos-
cou, est chargé de l'organisation pour laquelle
un généreux ami des sciences, M. Kœhler, a
offert 5.000 roubles. Immédiatement après le
Congrès d'anthropologie et d'archéologie, aura
lieu un second Congrès consacré à la zoologie.
Il s'ouvrira le 22 août et durera aussi huit
jours. Une exposition spéciale d'ethnographie,
d'anthropologie, de préhistoire et de zoolo-
gie sera organisée pour les deux Congrès.

Une statuette archaïque, d'une grande
valeur artistique, vient d'être découverte à
Athènes, en creusant les fondations d'une
maison près d'une vieille église.

Le gouvernement grec vient d'approuver
le projet de la commission technique relatif
au déplacement du village de Delphes, où la
France doit opérer les fouilles archéologiques
dont nous avons parlé il y a six mois. Ces ex-
propriations commenceront prochainement.

Le peintre Giovanni Ximenez, auteur
du tableau colossal : Les Derniers moments
de Victor-Emmanuel, est devenu subitement
fou à la suite d'une déception : l'artiste avait
espéré que le roi d'Italie achèterait son ceuvre>
et cet espoir ne s'est pas réalisé.