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Le charivari — 14.1845

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Avril (No. 91-120)
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https://doi.org/10.11588/diglit.17624#0476
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EiE CHARIVARI,

Il était déjà nuit quand la chaise de poste qui por-
tait le maestro approcha de la barrière. Le maestro
dormait. Tout à coup, un douanier se présente et
demande à faire l'inspecti m des bagages : « Faites,
dit Meyerbeer.—Il faut descendre, reprend le doua-
nier. » Meyerbeer descend. « Ouvrez vos malles. »
Meyerbeer donne les clés à sou domestique. Le doua-
nier se précipite sur les manuscrits, et les brandit
fièrement au dessus de sa tête, en poussant des cris
de triomphe.

Est-il besoin d'ajouter que ce douanier n'élait au-
tre que le vieux et vénérable doyen des abonnés de
l'Opéra ?

A ses cris, les dilettanti embusqués dans les envi-
rons accourent en foule. Les manuscrits sont placés

sur un brancard en bois de cèdre, incrusté d'or et
recouvert de velours. Vingt-quatre violons ouvrent
la marche, vingt»quatre autres la ferment ; les trom-
bonnes, les ophicléides et les bassons s'éparpillent
sur les ailes. Le postillon pleurait, les chevaux de
poste pleuraient, M. Meyerbeer pleurait aussi ; mais
une garde d'honneur composée de virtuoses distin-
gués l'empêchait, avec tous les égards dus à son ta-
lent, de trop se rapprocher des manuscrits.

Mais, dit-on, faut-il lâcher la bride à toutes les
inventions de cultes nouveaux qui peuvent se pro-
duire concurremment avec les inventions de mou-
tarde blanche, de pommade du chameau et de taffe-
tas pour les cors? Chacun se posera en dieu, promul-
guera un petit culte, et ce culte, sous l'abri de la
liberté constitutionnelle, pourra être professé publi-
ment, au profond scandale ou à la grande risée de la
population. On arriverait à voir, dans les annonces,
nouveau système,

En ce cas, dites dans la charte que les cultes sont
tolérés et ne dites plus qu'ils sont libres.

TAM PflllfC v'sible a la sa"e Vivienne, de 10 M heure*.
lUnl rUultC Prix : 1 fr. Les personnes qui voudront l'em-
brasser ajouteront cinq sous de plus.

I E r>Di||ii E^DBIT sera adoré, dimanche prochain, à
LE WnABU EOrHii io heures, à la salle Valenlino.
Tarlempion officiera.

Personne n'aime et nous n'aimons pas plus que
d'autres les cultes qui naissent comme des champi-
gnons, après les grands orages religieux et politi-
ques. Il est évident que la charte a fait et qu'il faut
faire une distinction entre les cultes établis, recon-
nus, adoptés, et les cultes fœtus ou les cultes à naî-
tre. Les uns ont la sanction du temps et de la rai-
son humaine qui les adopte ou les tolère; ils rallient
un plus ou moins grand nombre de suffrages; en un
mot ils sont. Les autres se présentent et demandent
à se faire juger; or, qui pourrait trouver mauvais
qu'expliqués dans un livre, ils soient soumis à la loi
commune qui régit la presse, — qu'étalés dans un
local, ils soient soumis à la loi commune qui régit
les exhibitions de toute nature, intellectuelles ou in-
dustrielles ?

Mais comment peut-on dire que les cultes sont li-
bres dans un pays où cent protestans ou cent Israé-
lites qui se trouvent réunis ne peuvent pas prier
Dieu en commun, à leur manière, sans une permis-
sion de la police?—Si la police permet toujours, à
quoi bon imposer une formalité gênante, sans portée
et restrictive en apparence? Autant vaut avoir en
droit la liberté qu'on possède en fait. — Si la police
refuse quelquefois, les cent israélites ou les cent pro

Dans toutes les rues où passait le cortège, la foule testans ne pourront plus prier. Ce qui n'empêche pas
applaudissait comme à une représentation de Ro- ! les cultes de demeurer libres.
bert-le-Diable. Mais, ajoute-t-on, il faut bien que le pouvoir în-

Les manuscrits ont été transportés au domicile
du doyen des abonnés, d'où ils ne sortiront que pour
entrer dans le trou du souffleur de l'Opéra.

Voilà M. Meyerbeer bien empêché, lui qui avait pris
l'habitude de les colporter trois ou quatre fois par an
de Berlin à Paris. On lui donnera en place quelques
Cahiers de papier blanc, ce qui reviendra au même.
Et un beau jour, le maestro, ennuyé de ne traîner
que du papier blanc, prendra une plume et noircira
son papier. Ce sera peut-être un bon opéra de plus.

LES CULTES SONT LIBRES,,,

AVEC LA PERMISSION DE LA POLICE-

La charte déclare que
tous les cultes sont libres et
que chacun professe son
culte avec la même liberté.

La loi ou la pratique gou-
vernementale exigent que
.tout exercice d'un culte soit
! soumisàl'autorisation préa-
lable de la police.
En d'autres termes, il y
a la liberté dans la charte, c'est-à-dire dans le prin-
cipe,—et le bon plaisir dans la loi ou l'ordonnance,
c'est-à-dire dans l'applieation.

En effet n'est-il pas évident, comme on l'a fort
bien dit à la tribune, que ces mots liberté et autori-
sation préalable hurlent d'être accouplés ensemble?
— Cela a-t-il besoin d'être démontré? Le gouver-
nement, dont l'autorisation préalable est né-
cessaire pour l'exercice du culte, peut refuser cette
autorisation ; donc, en réalité, on ne peut exercer
son culte que sous le bon plaisir du gouvernement.

Il n'y a que M. Martin (du Nord) pour appeler cela
la liberté i des cultes, et que M. Dupin aîné pour
comprendre M. Martin (du Nord).

tervienne pour protéger ou réprimer s'il y a lieu.
Qui dit le contraire ? Mais en quoi la présence du pou-
voir gêne-t-elle la liberté? Ce qui lagune, ce qui la
détruit, c'est la nécessité de l'autorisation préalable.
Faites que tout culte reconnu puisse être pratiqué
partout librement, c'est-à-dire sans autorisation
préalable, et personne ne trouvera mauvais que vous
soyez là, comme vous êtes partout, pour protéger ou
réprimer. Surveillez le lieu où se pratique le culte,
c'est votre droit ; mais laissez le culte se pratiquer
quelque part, c'est votre devoir.

« Les cultes sont libres, dit M. Dupin, et la preu-
ve, c'est qu'on respecte la foi, tant qu'elle ne fran-
chit point le sanctuaire de la conscience. » -- Par-
bleu, la belle raison ! C'est donc pour ce résultat que
la charte garantit la liberté des cultes ? Alors M. Du-
pin s'imagine que, si la charte était muette sur ce
point, on aurait droit d'interroger les conscien-
ces ou de fouiller les domiciles pour rechercher si le
marchand de véritables pastilles du sérail vénère
Mahomet dans son arrière-boutique et si les sauva-
ges des Montagnes rocheuses adorent le Grand esprit
dans leur hôtel garni, rue Chauveau-Lagarde.

Savez-vous à quoi aboutirait le raisonnement de
M. Dupin? à une conséquence absurde, monstrueuse.
Vous êtes seul, un sectaire isolé, et la charte vous
garantit la liberté de votre culte parce que vousl'exer-
cez chez vous. Mais trente corréligionnaires viennent
s'établir dans votre ville ; alors votre dogme veut que
vous priez en commun, et vous réunissez chez vous
vos trente amis... Halte-là! la charte ne garantit plus
rien : il vous faut l'autorisation préalable. Ainsi ce
qu'un homme isolé peut l'aire librement devient im-
possible quand d'rmtres hommes se joignent au pre-
mier. Le nombre est toujourset partout une garantie
en matière d opinions et de croyances, ici c'est un
obstacle. Un individu peut faire une absurdité sans
être inquiété ; mille individus ne peuvent faire une
chose simple et raisonnable.

Tlîéâtre «les Variétés.

Un Conte de Fées, vaudeville en trois actes de
MM. Leuven et Brunswick.

Plus heureuse que Bouffé, MUe Dijazet vient d'ob-
tenir un succès complet dans sa première création
au théâtre des Variétés. —Bouffé, du reste, peut se
consoler , en répétant avec un poète philosophe que
les destins et les vaudevilles sont changeant
Après Boquillon et \cGarde-Forcslicr, il lui arrivera
peut-être un nouveau Gamin de Paris.

Si lesuccèsdu vaudeville nouveau dewlM. Leuven
Brunswick et Alexandre Dumas a été complet
pour être justes nous devons tout d'abord reporter
une bonne part de ce triomphe sur M11* Dejazet et
sur Lafont, qui ont été parfaits, et sur une mise en
scène brillante, enrichie d'airs nouveaux habilement
composés par M. E. Déjazet, et ornée d'un luxe de
costumes supérieur à tout ce qui s'était vu jusqu'à
présent aux Variétés.

Il parait que M. Nestor Boqueplan veut lutter avec
l'Opéra, non seulement en fait de pirouettes et de
polka, mais encore en fait de satin, de velours et de
broderies de tout genre.

La pièce de MM. Leuven et Brunswick est bien pro-
che parente, si vous voulez, de la Vieille et de la
Fiole de Cagliostro. Il s'agit d'une jeune fille qui
s'est vieillie de quarante ans pour aller plaider un
procès aux lieu et place de sa vénérable tante,—qui,
mariée ensuite à un jeune et brillant seigneur, se ra-
jeunit tout-à-coup au moyen d'un prétendu philtre.
Mais grâce aux charmans détails et à tous les
incidens imprévus dont les auteurs ont semé leur
ouvrage, le Conte de Fées aura avec la piè-
ce du Palais-Royal et celle de l'Opéra-Comique un
autre point do ressemblance dont M. Roqueplan sera
le premier à s'applaudir :il arrivera au chilïre caba-
listique et par malheur si souvent fantastique d'une
centaine de représentations.

Mlle Maria Volet est ravissante dans trois ou qua-
tre costumes de bohémienne qui ne peuvent man-
quer d'obtenir le plus grand succès aux bals traves-
tis de l'hiver prochain.

CAE.IL

M. Guizot vient de demander un congé temporai-
re. Espérons que la chambre ne tardera pas à lui
donner à son tour un congé définitif.

— M. Duchâtel a été choisi pour remplacer M.
Guizot. Il était impossible de lui donner un rôle
moins flatteur.

—- Les journaux officiels disent que le ministre
des affaires étrangères est très affaibli. Malheureuse-
ment il est fâcheux qu'il n'ait jamais de faiblesses
que pour l'étranger.

*— M. Decazes a loué la société d'horticulture des
progrès de l'industrie agricole. Il est certain que
l'industrie en France n'a jamais tant végété.

— On a remarqué une diminution notable dans
l'exportation das arbres fruitiers. Il y a longtemps
en effet que l'on n'a envoyé des prunes à l'étranger.

— M. Decazes a vanté la prospérité de l'industrie
jardinière. C'est peut-être le seul genre de commerce
qui puisse se vanter de produire beaucoup de fruits.

— Les troupes casernées à Paris célébreront la
Saint-Philippe comme à l'ordinaire. Demain, jour
de grande réjouissance, la moitié de la garnison
sera consignée.

— On n'a encore pu louer aux Champs-Elysées

(La suite à la 4e paye.)
 
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