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qui l’appuient, des dômes qui la dominent, des forteresses qùi la couronnent et
l’entourent, le touriste contemple Naples , mollement livrée au doux nonclialoir
qu’elle aime, baignant ses pieds dans la mer, et la tète paresseusement appuyée
sur les hautes collines, antiques cratères, éteints désormais, du Vomero, de
SanCElmo > de Capo-di-Monte , etc.
Mais ce qui attire irrésistiblement son regard, c’est la montagne qui se mon-
tre à l’orient de la ville, et dont le vaste sommet pourfendu , effondré , déchiré
comme par l’explosion d’une mine formidable, a dispersé ses décombres sur ses
larges talus. Ce qui absorbe sa curiosité , c’est, tout à côté, cette même monta-
gne, élargie des décombres de sa tête tombée, qui élève et qui porte avec or-
gueil vers le ciel un cône de cendres et de scories, d’où s’échappe une énorme
aigrette de fumée , en forme de pin colossal , dont les entrailles mugissent et
tonnent, et qui, par ses cratères vomit d’horribles traînées de laves incandescen-
tes qui forment ses flancs. Ce qui fait battre son cœur, c’est le nom de Vésuve
qu’il a tant de fois prononcé et qu’il peut à celte heure appliquer au géant de
feu qu’il a devant lui, et dont dix-huit siècles de durée n’ont pas encore amoin-
dri les fureurs. Mais alors il se demande comment il est au monde des créa-
tures assez indifférentes pour leur vie, assez peu désireuses du repos, assez con-
fiantes dans l’avenir , pour oser planter leurs tentes au pied même de ce volcan,
si redoutable et si fantasque. Il ne peut sans un étonnement, joint à une profonde
mélancolie, suivre de l’œil cette longue caravane de maisons de plaisance, de
délicieuses villas, de demeures princières, qui, sur les déclivités de l’abîme
pouvant d’un moment à l'autre lancer le feu, la torture et la mort, semble s’a¬
vancer philosophiquement à la ruine sous le nom fleuri de Portici, de Résina,
de Torre del Grœco , etc.
Tels sont les aspects magiques qui charment le touriste en même temps qu’ils
l’étonnent... Donc, j’étais en extase devant Naples,comme tu le vois,et,des beautés
de nature, passant aux œuvres de l’homme, de notre navire qui stopait en face
du môle , je regardais, dans le port militaire, ses frégates, ses goélettes, et un
ou deux navires de guerre dont les matelots étaient à la manœuvre -, dans le port
marchand, j’examinais les gabares, les chaloupes, les péniches et les vaisseaux
de toutes les nations qu’entouraient des centaines de barques venues de terre,
comme des bandes d’oiseaux affamés, pour en recevoir ou y porter les marchan-
dises ; enfin, je contemplais les balancelles et les paquebots à vapeur arrivant ou
partant, lorsque j’avisai la longue flamme jaune, tombant de notre grand
mat, qui me rappelait la triste vérité , à savoir notre condamnation au Lazaret !
Déjà la vie , une vie fébrile s’était emparée de tous les habitants riverains de
qui l’appuient, des dômes qui la dominent, des forteresses qùi la couronnent et
l’entourent, le touriste contemple Naples , mollement livrée au doux nonclialoir
qu’elle aime, baignant ses pieds dans la mer, et la tète paresseusement appuyée
sur les hautes collines, antiques cratères, éteints désormais, du Vomero, de
SanCElmo > de Capo-di-Monte , etc.
Mais ce qui attire irrésistiblement son regard, c’est la montagne qui se mon-
tre à l’orient de la ville, et dont le vaste sommet pourfendu , effondré , déchiré
comme par l’explosion d’une mine formidable, a dispersé ses décombres sur ses
larges talus. Ce qui absorbe sa curiosité , c’est, tout à côté, cette même monta-
gne, élargie des décombres de sa tête tombée, qui élève et qui porte avec or-
gueil vers le ciel un cône de cendres et de scories, d’où s’échappe une énorme
aigrette de fumée , en forme de pin colossal , dont les entrailles mugissent et
tonnent, et qui, par ses cratères vomit d’horribles traînées de laves incandescen-
tes qui forment ses flancs. Ce qui fait battre son cœur, c’est le nom de Vésuve
qu’il a tant de fois prononcé et qu’il peut à celte heure appliquer au géant de
feu qu’il a devant lui, et dont dix-huit siècles de durée n’ont pas encore amoin-
dri les fureurs. Mais alors il se demande comment il est au monde des créa-
tures assez indifférentes pour leur vie, assez peu désireuses du repos, assez con-
fiantes dans l’avenir , pour oser planter leurs tentes au pied même de ce volcan,
si redoutable et si fantasque. Il ne peut sans un étonnement, joint à une profonde
mélancolie, suivre de l’œil cette longue caravane de maisons de plaisance, de
délicieuses villas, de demeures princières, qui, sur les déclivités de l’abîme
pouvant d’un moment à l'autre lancer le feu, la torture et la mort, semble s’a¬
vancer philosophiquement à la ruine sous le nom fleuri de Portici, de Résina,
de Torre del Grœco , etc.
Tels sont les aspects magiques qui charment le touriste en même temps qu’ils
l’étonnent... Donc, j’étais en extase devant Naples,comme tu le vois,et,des beautés
de nature, passant aux œuvres de l’homme, de notre navire qui stopait en face
du môle , je regardais, dans le port militaire, ses frégates, ses goélettes, et un
ou deux navires de guerre dont les matelots étaient à la manœuvre -, dans le port
marchand, j’examinais les gabares, les chaloupes, les péniches et les vaisseaux
de toutes les nations qu’entouraient des centaines de barques venues de terre,
comme des bandes d’oiseaux affamés, pour en recevoir ou y porter les marchan-
dises ; enfin, je contemplais les balancelles et les paquebots à vapeur arrivant ou
partant, lorsque j’avisai la longue flamme jaune, tombant de notre grand
mat, qui me rappelait la triste vérité , à savoir notre condamnation au Lazaret !
Déjà la vie , une vie fébrile s’était emparée de tous les habitants riverains de