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Ziętkiewicz-Kotz, Joanna: Un psautier-livre d'heures enluminé franc̨ais du XIII siècle dans la Bibliothèque Czartoryski de Cracovie (ms. 3466)
DOI Seite / Zitierlink: https://doi.org/10.11588/diglit.20619#0025
3- Arbre des vertus, Psautier de Robert de Lisie.
Londres, British Library, Arundel 83 II, fol. 129
(copyright British Library)
a son caractere exceptionnel17, mais aussi parce que son
emploi met un accent particulier sur Pidee de la Redemp-
tion dans la scene de PAnnonciation qui n’invoquait jus-
qu’alors que la question de la mission angelique. Le
Moyen Age tardif developpera cette conception en in-
troduisant dans PAnnonciation une toute petite figurę
du Cfirist descendant des cieux, dont la presence physi-
que pendant ce mystere suggerera non seulement la part
de Marie dans Poeuvre de la Redemption, mais egale-
ment sa chastete au moment de la Conception.
LaNativite, fol. 8 (le premier peintre; ill. 4).
La scene de la Nativite dans le manuscrit de Craco-
vie est une representation conęue d’une maniere habi-
tuelle dans Part franęais des XIIe et XIIIe siecles, et en
meme temps, c’est parmi toutes les scenes de PEnfance
du Christ, celle qui est la plus riche en significations sym-
boliques.
Au premier plan est representee Marie qui, epuisee
par les couches, se repose sur un lit, la tete appuyee sur
la main. Cette conception du personnage de Marie, fati-
guee et souffrante, apparut deja au VIe siecle en Pales-
tine (cf. les representations sur les ampouies de Monza)18
et prit vite racine dans la tradition iconographique tant
de POrient que de POccident, en remplaęant la concep-
tion grecque de ce theme selon laquelle Marie aurait ac-
couche sans douleur.
Au-dessus de la couche de Marie est represente le
Christ dans la creche, accompagne d’un ane et d’un boeuf
qui rechauffent le Nouveau-ne avec leur respiration. La
creche ou repose PEnfant, placee sur une haute cons-
truction en briques, formę une reference evidente
a Pautel19, ce qui met en relief Paspect sacramentel de la
scene de la Nativite. Le rideau blanc suspenclu a la barre
laisse voir Pevenement qui se deroule et evoque le
mystere de PEucharistie. L’usage medieval de suspendre
des rideaux a des barres situees des deux cótes de Pautel
est mentionne dans les inventaires d’eglises, et docu-
mente par un grand nombre d’oeuvres d’art20. Guillaume
Durand ecrit qu’ils «cachent le mystere de la transsubs-
tantiation» (Rationale divinomm officiorum, I, 3, 35). En
effet, ces rideaux etaient ecartes au moment de l’Eleva-
17 Le motif de ce type est rare, en effet. 11 apparatt notamment
dans le Psautier de Guy de Dampierre (Bruxelles, BR, ms. 10607, fol.
7v°; ill. 2) exócutó a la fin du XIIIe siecle et originaire ógalement du
Nord-Est de la France (je remercie Mme Katarzyna Płonka-Bałus pour
avoir attire mon attention sur cette miniaturę). Nous retrouvons une
solution similaire dans le Psautier de Robert De Lisie du XIVe siecle
(Londres, BL, Arundel 83 II, fol. 129, ill. 3), bien qu’il s’agisse la de
1’arbre des vertus qui pousse dans 1’amphore et a la base duquel fut
figuree la scene de 1 'Annonciation, pourtant, en comparaison avec
cette miniaturę, le parallele entre la colonne et 1’arbre dans VAnnon-
ciation de Cracovie devient encore plus comprehensible. Au sujet du
Psautier de Guy de Dampierre cf. C. G a s p a r, F. Łyna, Pńncipaux
manuscrits a peintures de la Bibliotheąue Royale de Belgiąue, Paris 1937,
n° 95, p. 219-228, aussi: L. M. J. D e 1 a i s s ć, MittelalterlicheMiniaturen
von der burgundischen Bibliothek zum Handschriftenkabinett der
Kóniglich Belgiscben Bibliothek, Koln 1934, s. 50-53- Au sujet du Psau-
tier de Robert De Lisie: L. Freeman Sandler, The Psalter oj Ro-
bert De Lisie in the British Library, Oxford-New York 1983-
18 S c h i 11 e r, op. cit., vol. 1, p. 72.
19 Une telle conception peut avoir sa source dans Pautel qui fut
órige dans la basilique de la Nativite de Bethleem au-dessus de Pen-
tree de la grotte dans laquelle le Christ serait venu au monde selon la
tradition. Cet autel aurait ete situe sur une construction surćlevee dans
laquelle se trouvait une ouverture permettant aux pelerins de regarder
a 1’interieur de la grotte (Schiller, op. cit., vol. 1, p. 74). 11 est proba-
ble que c’est a ce motif que faisaient reference plus tard les petites
fenetres des autels en Occident a travers lesquelles l’on pouvait voir
les reliques des saints martyrs placees a 1’intdrieur. 11 semble aussi que
1’association de la creche du Christ avec Pautel fut communement pre-
sente dans la conscience des hommes du Moyen Age. V. Wylie, en
decrivant cet aspect de la scene de la Nativite sur un polyptyque fla-
mand du troisieme quart du XIIIe siecle (aujourd’hui au Museo Sacro
du Vatican), se sert a ce propos de Paffirmation de Walafrid Strabo:
«Ponitur Christus in praesepio, id est corpus Christi super altare>. (Cf.
V. Wy 1 i e, A Coppergilt Shrine in the Museo Sacro of the Vatican Library,
The Art Bulletin, 27: 1945, p. 65-66; Z. Kliś, Temat Bożego Narodzenia
w polskiej sztuce średniowiecznej, Kraków 1994, p. 144-158).
20 Par exemple: le vitrail du XIF siecle avec le cycle de 1'Incarna-
tion dans la cathedrale de Chartres, le tympan droit du portail occi-
21
Londres, British Library, Arundel 83 II, fol. 129
(copyright British Library)
a son caractere exceptionnel17, mais aussi parce que son
emploi met un accent particulier sur Pidee de la Redemp-
tion dans la scene de PAnnonciation qui n’invoquait jus-
qu’alors que la question de la mission angelique. Le
Moyen Age tardif developpera cette conception en in-
troduisant dans PAnnonciation une toute petite figurę
du Cfirist descendant des cieux, dont la presence physi-
que pendant ce mystere suggerera non seulement la part
de Marie dans Poeuvre de la Redemption, mais egale-
ment sa chastete au moment de la Conception.
LaNativite, fol. 8 (le premier peintre; ill. 4).
La scene de la Nativite dans le manuscrit de Craco-
vie est une representation conęue d’une maniere habi-
tuelle dans Part franęais des XIIe et XIIIe siecles, et en
meme temps, c’est parmi toutes les scenes de PEnfance
du Christ, celle qui est la plus riche en significations sym-
boliques.
Au premier plan est representee Marie qui, epuisee
par les couches, se repose sur un lit, la tete appuyee sur
la main. Cette conception du personnage de Marie, fati-
guee et souffrante, apparut deja au VIe siecle en Pales-
tine (cf. les representations sur les ampouies de Monza)18
et prit vite racine dans la tradition iconographique tant
de POrient que de POccident, en remplaęant la concep-
tion grecque de ce theme selon laquelle Marie aurait ac-
couche sans douleur.
Au-dessus de la couche de Marie est represente le
Christ dans la creche, accompagne d’un ane et d’un boeuf
qui rechauffent le Nouveau-ne avec leur respiration. La
creche ou repose PEnfant, placee sur une haute cons-
truction en briques, formę une reference evidente
a Pautel19, ce qui met en relief Paspect sacramentel de la
scene de la Nativite. Le rideau blanc suspenclu a la barre
laisse voir Pevenement qui se deroule et evoque le
mystere de PEucharistie. L’usage medieval de suspendre
des rideaux a des barres situees des deux cótes de Pautel
est mentionne dans les inventaires d’eglises, et docu-
mente par un grand nombre d’oeuvres d’art20. Guillaume
Durand ecrit qu’ils «cachent le mystere de la transsubs-
tantiation» (Rationale divinomm officiorum, I, 3, 35). En
effet, ces rideaux etaient ecartes au moment de l’Eleva-
17 Le motif de ce type est rare, en effet. 11 apparatt notamment
dans le Psautier de Guy de Dampierre (Bruxelles, BR, ms. 10607, fol.
7v°; ill. 2) exócutó a la fin du XIIIe siecle et originaire ógalement du
Nord-Est de la France (je remercie Mme Katarzyna Płonka-Bałus pour
avoir attire mon attention sur cette miniaturę). Nous retrouvons une
solution similaire dans le Psautier de Robert De Lisie du XIVe siecle
(Londres, BL, Arundel 83 II, fol. 129, ill. 3), bien qu’il s’agisse la de
1’arbre des vertus qui pousse dans 1’amphore et a la base duquel fut
figuree la scene de 1 'Annonciation, pourtant, en comparaison avec
cette miniaturę, le parallele entre la colonne et 1’arbre dans VAnnon-
ciation de Cracovie devient encore plus comprehensible. Au sujet du
Psautier de Guy de Dampierre cf. C. G a s p a r, F. Łyna, Pńncipaux
manuscrits a peintures de la Bibliotheąue Royale de Belgiąue, Paris 1937,
n° 95, p. 219-228, aussi: L. M. J. D e 1 a i s s ć, MittelalterlicheMiniaturen
von der burgundischen Bibliothek zum Handschriftenkabinett der
Kóniglich Belgiscben Bibliothek, Koln 1934, s. 50-53- Au sujet du Psau-
tier de Robert De Lisie: L. Freeman Sandler, The Psalter oj Ro-
bert De Lisie in the British Library, Oxford-New York 1983-
18 S c h i 11 e r, op. cit., vol. 1, p. 72.
19 Une telle conception peut avoir sa source dans Pautel qui fut
órige dans la basilique de la Nativite de Bethleem au-dessus de Pen-
tree de la grotte dans laquelle le Christ serait venu au monde selon la
tradition. Cet autel aurait ete situe sur une construction surćlevee dans
laquelle se trouvait une ouverture permettant aux pelerins de regarder
a 1’interieur de la grotte (Schiller, op. cit., vol. 1, p. 74). 11 est proba-
ble que c’est a ce motif que faisaient reference plus tard les petites
fenetres des autels en Occident a travers lesquelles l’on pouvait voir
les reliques des saints martyrs placees a 1’intdrieur. 11 semble aussi que
1’association de la creche du Christ avec Pautel fut communement pre-
sente dans la conscience des hommes du Moyen Age. V. Wylie, en
decrivant cet aspect de la scene de la Nativite sur un polyptyque fla-
mand du troisieme quart du XIIIe siecle (aujourd’hui au Museo Sacro
du Vatican), se sert a ce propos de Paffirmation de Walafrid Strabo:
«Ponitur Christus in praesepio, id est corpus Christi super altare>. (Cf.
V. Wy 1 i e, A Coppergilt Shrine in the Museo Sacro of the Vatican Library,
The Art Bulletin, 27: 1945, p. 65-66; Z. Kliś, Temat Bożego Narodzenia
w polskiej sztuce średniowiecznej, Kraków 1994, p. 144-158).
20 Par exemple: le vitrail du XIF siecle avec le cycle de 1'Incarna-
tion dans la cathedrale de Chartres, le tympan droit du portail occi-
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