Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 24.1900

DOI issue:
Nr. 4
DOI article:
Michel, André: L' exposition centennale - La peinture française, 4: les arts à l'exposition universelle de 1900
DOI Page / Citation link:
https://doi.org/10.11588/diglit.24721#0324

DWork-Logo
Overview
Facsimile
0.5
1 cm
facsimile
Scroll
OCR fulltext
2'J8

GAZETTE DES BEAUX-ARTS

cette illusion cesse dès que vous approchez, ripostait à son tour
1’ « Artiste ». Cela est peint comme un décor qu’il faut regarder de
loin. La facture est d’une monotonie fatigante ; tout est touché de la
môme sorte; les ciels sont lourds, cahotés. Point de « style »
d’ailleurs, point de dessin. Ces compositions réduites au trait seraient
ultra-mesquines. — Réduites au trait ! Est-ce qu’on peut réduire
un paysage au trait, s’écriait le « Philosophe », sans se douter
qu’il se rencontrait avec Delacroix, écrivant un peu plus tard sur
une page de ses albums : «... Je suis à une fenêtre et je vois le plus
beau paysage. L’idée d’une ligne ne me vient pas à l’esprit. » Ce
n’est pas le trait, c’est la couleur qui exprime un paysage. — C’est
comme si vous disiez, répliquait P « Artiste », qu’il n’y a point de
lignes dans la nature, point de formes dans un tronc d’arbre, dans
les profils des rochers, les mouvements des terrains_

La discussion — si souvent reprise depuis et sous tant de
formes — continuait et les deux interlocuteurs en arrivaient, à
propos des envois de MM. Turpin de Crissé, de feu Michallon, de
Rémond, de Wattelet, de Bidault, de Victor Bertin, à opposer les
diverses théories du paysage qui entraient alors en conflit et dont
on retrouve les thèses et principes controversés dans les nombreux
traités qui se succédèrent depuis la célèbre préface du Traité de
perspective de Valenciennes, mort en 1819. « Ce sont encore les
homéristes et les shakespeariens, écrivait gravement Delécluze, qui
sous la forme de Tityres ou de pêcheurs de morue se disputent la
gloire de plaire. Les uns s’appellent ennuyeux, les autres dégoû-
tants. » Il aimait d’ailleurs « la franchise, vivacité et vérité de
couleur » de Constable ; mais il ne pouvait prendre son parti de
sa « négligence affectée». Quant à Bonington, « l’exactitude et la
finesse des effets blafards » du ciel et de la mer n’étaient pas chez
lui sans charme ; mais « un ciel triste, une mer huileuse et des
pêcheurs sales ont peu d’attraits ».

L’occasion serait bonne ici pour esquisser l’histoire des origines
du paysage moderne ; mais au point où nous sommes de cette
étude, il est trop tard pour s’y arrêter et il faut nous hâter1. On
a réuni au Grand Palais une série de documents particulièrement
instructifs, et rien qu’à regarder les petits morceaux exposés de
Pillement, Louis Moreau, Bidault, Valenciennes, Leprince, Dunouy,
Bruandet, Jolivard, Demarne, Dagnan, Georges Michel, on peut

1. Voir Notes sur l’art moderne-, particulièrement une étude sur Corot. Paris,
A. Colin, 1896.
 
Annotationen