QUELQUES OEUVRES INÉDITES DE PHILIPPE ROLAND 183
variété du style y égale la diversité des types et des âges. A tout
seigneur, tout honneur : Roland s’est montré à nous dans sa maturité,
le regard assuré et direct, dévisageant le spectateur, le front légè-
rement relevé, les pommettes fortes, la bouche ferme, retroussée par
la bienveillance, toute la figure s’exhaussant sur un cou svelte,
merveilleusement relié à la ligne fuyante des épaules. La droiture, la
résolution, relevées de bonne humeur, respirent dans cette mâle
tête; on n’imagine rien do plus franc et de plus sain. Quant à l’exé-
cution, elle dépasse pour la précision nerveuse celle du buste de Pajou.
La bibliothèque de l’École des Beaux-
Arts renferme une excellente copie de
cette œuvre, faite d’après la terre origi-
nale par Auguste Dumont.
Les deux morceaux qui viennent
ensuite sont d’un sentiment plus intime :
Mme Potain, femme de l’architecte du
roi et bèlle-mère de Roland, et Thérèse
Potain, sa fille, qui épousa le sculpteur
en 1782, forment un couple bourgeois
avenant et cordial à souhait. La mère,
dont la bouche et le menton replet dé-
notent la plus indulgente bonté, a un
regard profond et pénétrant, où la vie
a mis sa sagesse désabusée; quelle con-
seillère, quelle consolatrice aux heures
sombres elle dut être! La jeune femme,
la tète jetée de côté dans un mouve-
ment plein de grâce mutine, captive par son expression de volupté,
par la langueur invitante d’un sourire dont elle connaît tout le
pouvoir.
Il m’est impossible de contempler ces deux bustes côte à côte,
sans entendre chanter en moi ces deux vers du Booz endormi :
ROLAND, MARBRE, PAR LUI-MEME
(Collection de M. Gabriel de Montigny.)
Et l’on voit de la flamme aux yeux des jeunes gens,
Mais aux yeux des vieillards on voit de la lumière.
Gomment ne pas envier la vie laborieuse et douce du sta-
tuaire entre ces deux femmes, dans l’intérieur que paraient ces
blanches mains maternelles, qu’éclairait ce visage adoré! Ce n’est
pas assez de qualifier les deux portraits qu’il leur consacre d’images
fidèles où l’auteur mit toute sa reconnaissance et tout son cœur ; ce
variété du style y égale la diversité des types et des âges. A tout
seigneur, tout honneur : Roland s’est montré à nous dans sa maturité,
le regard assuré et direct, dévisageant le spectateur, le front légè-
rement relevé, les pommettes fortes, la bouche ferme, retroussée par
la bienveillance, toute la figure s’exhaussant sur un cou svelte,
merveilleusement relié à la ligne fuyante des épaules. La droiture, la
résolution, relevées de bonne humeur, respirent dans cette mâle
tête; on n’imagine rien do plus franc et de plus sain. Quant à l’exé-
cution, elle dépasse pour la précision nerveuse celle du buste de Pajou.
La bibliothèque de l’École des Beaux-
Arts renferme une excellente copie de
cette œuvre, faite d’après la terre origi-
nale par Auguste Dumont.
Les deux morceaux qui viennent
ensuite sont d’un sentiment plus intime :
Mme Potain, femme de l’architecte du
roi et bèlle-mère de Roland, et Thérèse
Potain, sa fille, qui épousa le sculpteur
en 1782, forment un couple bourgeois
avenant et cordial à souhait. La mère,
dont la bouche et le menton replet dé-
notent la plus indulgente bonté, a un
regard profond et pénétrant, où la vie
a mis sa sagesse désabusée; quelle con-
seillère, quelle consolatrice aux heures
sombres elle dut être! La jeune femme,
la tète jetée de côté dans un mouve-
ment plein de grâce mutine, captive par son expression de volupté,
par la langueur invitante d’un sourire dont elle connaît tout le
pouvoir.
Il m’est impossible de contempler ces deux bustes côte à côte,
sans entendre chanter en moi ces deux vers du Booz endormi :
ROLAND, MARBRE, PAR LUI-MEME
(Collection de M. Gabriel de Montigny.)
Et l’on voit de la flamme aux yeux des jeunes gens,
Mais aux yeux des vieillards on voit de la lumière.
Gomment ne pas envier la vie laborieuse et douce du sta-
tuaire entre ces deux femmes, dans l’intérieur que paraient ces
blanches mains maternelles, qu’éclairait ce visage adoré! Ce n’est
pas assez de qualifier les deux portraits qu’il leur consacre d’images
fidèles où l’auteur mit toute sa reconnaissance et tout son cœur ; ce