LES ORIGINES ET LE DÉVELOPPEMENT DU TEMPLE GREC 201
de façon à correspondre respectivement aux antes des murs laté-
raux et aux deux colonnes du prodomos, constituait une décoration
en harmonie avec le reste de l’édifice. Mais ces quatre colonnes,
ainsi jetées en avant, semblaient être en l’air, ne se rattacher à
rien ; elles durent suggérer aussitôt l’idée de la péristasis entière.
Je ne crois pas qu'il soit à propos de distinguer ici deux étapes :
l’idée de planter quatre colonnes nouvelles en avant de la façade a
dû précéder l’idée d’en planter six et de continuer la colonnade
autour du naos ; mais la seconde complétait la première, et elles ont
fort bien pu être réalisées en même temps. Le temple est devenu à
la fois hexastyle et périptère, mais il n’a pas encore d'opisthodomos ;
c’est la forme du temple d’Assos en Troade (vers 600 avant J.-C.) et
de plusieurs autres, anciens ou récents.
3° La présence d’une colonnade tout autour de l’édifice était
comme une invitation à en faire effectivement le tour. On trouvait
alors l’enveloppe extérieure toujours pareille sur les quatre côtés,
pareils aussi les deux longs murs; seule, la face postérieure, avec
son unique muraille nue, ne correspondait pas à la face antérieure.
On finit par la doter d’un prodomos : faux prodomos, puisqu’il ne
conduisait à aucune porte et n’avait pas d’usage pratique ; mais, du
moins, il assurait la symétrie des deux façades et le parfait équilibre
de l’édifice. Peut-être le premier exemple de cette innovation fut-il
Y opisthodomos de l’Héræon d’Olympie.
En somme, malgré l’incertitude qui subsiste dans l’histoire des
premiers temps, l’origine du temple dorique n’est pas douteuse.
Directement, ainsi que l’affirme M. Perrot, ou par des étapes inter-
médiaires, ainsi que j’incline à le croire, l’Héraon d'Olympie est
issu du mégaron mycénien ; ou plutôt, c’est encore le mégaron lui-
même, non modifié, mais agrandi, doté d’une façade supplémentaire
et enveloppé de hautes colonnes qui font front de toutes parts,
comme un carré de gardes immobiles autour de la demeure sacrée.
La péristasis est visiblement une enveloppe ajoutée après coup
autour du mégaron primitif; jusque dans les temples en pierre, elle
garde ce caractère. Car elle est construite détachée du naos, elle n’en
est pas solidaire; le naos peut se passer d’elle, et elle peut survivre
àia ruine du naos*. L’état actuel du temple de Ségeste en fournit
un exemple frappant : la péristasis est demeurée debout tout entière,
1. Cf. les justes observations de M. Perrot à ce sujet (op. cit., t. VII, p. 359-361
et p. 404, explication de la planche V).
XXV. — 3· PÉRIODE
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de façon à correspondre respectivement aux antes des murs laté-
raux et aux deux colonnes du prodomos, constituait une décoration
en harmonie avec le reste de l’édifice. Mais ces quatre colonnes,
ainsi jetées en avant, semblaient être en l’air, ne se rattacher à
rien ; elles durent suggérer aussitôt l’idée de la péristasis entière.
Je ne crois pas qu'il soit à propos de distinguer ici deux étapes :
l’idée de planter quatre colonnes nouvelles en avant de la façade a
dû précéder l’idée d’en planter six et de continuer la colonnade
autour du naos ; mais la seconde complétait la première, et elles ont
fort bien pu être réalisées en même temps. Le temple est devenu à
la fois hexastyle et périptère, mais il n’a pas encore d'opisthodomos ;
c’est la forme du temple d’Assos en Troade (vers 600 avant J.-C.) et
de plusieurs autres, anciens ou récents.
3° La présence d’une colonnade tout autour de l’édifice était
comme une invitation à en faire effectivement le tour. On trouvait
alors l’enveloppe extérieure toujours pareille sur les quatre côtés,
pareils aussi les deux longs murs; seule, la face postérieure, avec
son unique muraille nue, ne correspondait pas à la face antérieure.
On finit par la doter d’un prodomos : faux prodomos, puisqu’il ne
conduisait à aucune porte et n’avait pas d’usage pratique ; mais, du
moins, il assurait la symétrie des deux façades et le parfait équilibre
de l’édifice. Peut-être le premier exemple de cette innovation fut-il
Y opisthodomos de l’Héræon d’Olympie.
En somme, malgré l’incertitude qui subsiste dans l’histoire des
premiers temps, l’origine du temple dorique n’est pas douteuse.
Directement, ainsi que l’affirme M. Perrot, ou par des étapes inter-
médiaires, ainsi que j’incline à le croire, l’Héraon d'Olympie est
issu du mégaron mycénien ; ou plutôt, c’est encore le mégaron lui-
même, non modifié, mais agrandi, doté d’une façade supplémentaire
et enveloppé de hautes colonnes qui font front de toutes parts,
comme un carré de gardes immobiles autour de la demeure sacrée.
La péristasis est visiblement une enveloppe ajoutée après coup
autour du mégaron primitif; jusque dans les temples en pierre, elle
garde ce caractère. Car elle est construite détachée du naos, elle n’en
est pas solidaire; le naos peut se passer d’elle, et elle peut survivre
àia ruine du naos*. L’état actuel du temple de Ségeste en fournit
un exemple frappant : la péristasis est demeurée debout tout entière,
1. Cf. les justes observations de M. Perrot à ce sujet (op. cit., t. VII, p. 359-361
et p. 404, explication de la planche V).
XXV. — 3· PÉRIODE
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