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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 25.1901

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Nr. 5
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Bertaux, Émile: Les mosaïques de Daphni: un chef-d'œuvre d'art Byzantin
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https://doi.org/10.11588/diglit.24807#0397

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LES MOSAÏQUES DE DAPHNI

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pour copier directement, non seulement les costumes, mais encore
les visages qu’ils voyaient? Une conjecture au moins peut être
proposée. On sait que la Grande Eglise de Basile Ier fut en quelque
sorte la chapelle d’un merveilleux palais, et que le nouvel art
religieux qui se développe à partir du ixe siècle fut accompagné
d’un art profane. Dans le Cénourgion, qui, par sa magnificence,
fut comme le sanctuaire de la demeure impériale, des mosaïques
qui ornaient, ainsi que dans une basilique, les parois au-dessus des
colonnes et les conques des absides, représentèrent la famille du
Basileus, ses guerriers, « ses travaux herculéens, ses entreprises
pour le bonheur du peuple, ses victoires remportées avec l’aide
de Dieu1 ». Toute cette peinture d’histoire, aussi monumentale que
la peinture d’église, mais plus libre d’anciennes traditions, com-
portait l’imitation des costumes contemporains et le dessin de
nombreux portraits. On comprendrait sans peine qu’en travaillant
dans les palais, miniaturistes et mosaïstes eussent meublé leur
mémoire visuelle de détails et de types purement orientaux et
qu’ils eussent introduit peu à peu dans les églises ces souvenirs
profanes, à côté des formes et des motifs que la tradition avait
rendus vénérables. Les types nouveaux seraient issus, non point des
écoles monastiques, mais de l’école impériale.

Quoi qu'il en soit de cette hypothèse, il faut retenir un fait : c’est
que les artistes byzantins, entre le ix° et le xie siècle, bien loin
d’imaginer, pour la satisfaction d’une piété farouche, des formes
amaigries et des figures attristées, n’ont quitté l’imitation des modèles
antiques que pour faire de véritables portraits2.

A coté de cette tentative «naturaliste», il faut signaler encore
une tentative « coloriste ». Les néologismes les plus modernes ne
sont pas déplacés, quand il s’agit de caractériser une technique
aussi savante et aussi audacieuse que celle des mosaïstes de Daphni.

1. Le Palais impérial à,e Constantinople, 1861, p. 78.

2. Dans les mosaïques de Saint-Luc en Phocide, qui décorent l’église d’un
monastère isolé loin du siècle dans un amphithéâtre de montagnes, les ascètes
sont plus nombreux que dans l’église voisine d’Athènes. Dans la série de ces
figures de caloyers, on peut distinguer deux groupes. L’un est composé de saints
à longue barbe blanche, dont le visage plein et les yeux ronds n’expriment point
l’austérité : c’est le type conventionnel, qu'on dirait simplement obtenu avec une
fausse barbe d’étoupe. Quelques saints, plus graves et plus tristes, se distinguent,
dans ce défilé monotone, par des traits accusés et qui semblent individuels,
Ceux-là ne sont plus des vieillards de théâtre, mais des hommes robustes, dont
le mâle visage est creusé par les macérations. Or, il se trouve que les plus
 
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