Grelot, Guillaume Joseph: Relation Nouvelle D'Un Voyage De Constantinople (Paris, 1680)

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ou autre yvrogne Turc veut sé divertir , il s'en va
aux lues pour avoir le plaisir de s'y en yvrer avec plus
de liberté , car si les Turcs boivent rarement du
vin , on peut dire qu'ils ne laiiTent pas d'avoir le
deiTein de s'en souler quand ils le peuvent ; aussi ne
croyent-ils point en avoir goûté s'ils ne s'en ressen-
tent trois jours après. Ils vont donc a ces Mes, qui
ne sont guère habitées que par des Chrétiens Grecs,
pour y boire à toute outrance, ôc y font en siiitte
les desordres que peut causer le vin. Ils menacent
les pauvres Grecs, les frappent alTez souvent, &;
leur prennent tout ce qui les accommode • il est
bien vray qu'il ne leur arrive jamais guère de les
tuer , parce que le meurtre est extrêmement défen-
du dans toute la Turquie , ôc que l'on y pend la
bouteille au lieu mesme où elle a causé quelque
desordre , mais ils ravagent tellement tous leurs
jardins, vignes, vergers, ôc tout ce qu'ils cultivent
à la campagne, qu'ils n'ont pas le cœur d'y rien
entretenir ny semer. Et ainsi ces Mes aussi fécon-
des que charmantes sont presque toutes en friche,
il n'y a que quelques Caloïers qui cultivent autour
de leurs Convents quelques herbages, legumes, rai-
sins ôc autres fruits pour l'usage de leurs maisons5
Ôc pour régaler avec le poiiTon qu'ils pèchent sans
s'éloigner de ces Mes les francs ôc autres honnê-
tes pasTagers qui les vont visiter. Ils n'empêchent
point de manger de la viande chez eux quand on
l'y porte , quoy-qu'ils soient tous du nombre des
Ichtiophages volontaires qui s'en sont interdits
l'usage pour toujours»

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