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— 76 —

cordant une si vaste place à un sujet insigni-
fiant par lui-même. Il faut le prestige d'une
exécution magistrale pour donner de l'intérêt
à un panneau de cette taille, et il est impru-
dent peut-être ou présomptueux de risquer
pareille aventure. M. Kuytenbrouwer ne man-
que pas d'habileté et il le prouve de reste
dans d'autres tableaux plus modestes.

Le paysage et les sujets familiers sont en-
core, maintenant comme autrefois, les deux
genres préférés des Hollandais. C'est naturel,
car ils possèdent le don de l'observation et un
goût prononcé pour la nature. Si, en dehors
des artistes que nous venons de nommer, nous
ne trouvons plus de ces originalités éminentes
qui se détachent de la foule au premier coup
d'œil, nousavonsenMM.Verveer, Roelots, Ma-
ris, Mateu et Stortenbeker des paysagistes fort
recommandables ; il manque peut-être à leurs
tableaux un accent un peu plus personnel, un
caractère plus prononcé, ce qui constitue en-
fin l'originalité. Cette qualité nous la trou-
vons dans l'unique paysage, un peu sec peut-
être, mais plein de vérité, tout baigné d'air,
tout illuminé d'une lumière froide et cepen-
dant éclatante, de M. Weissenbruch. Cette
petite toile, bien inférieure peut-être comme
importance et comme habileté d'exécution
aux envois de MM. Verveer et Roelofs, mon-
tre tant de sincérité et une étude si attentive
de la nature, que nous n'hésitons pas à la sig-
naler comme un des meilleurs paysages de
l'envoi Hollandais.

Les peintres de genre vous sont presque
tous connus; M. Van Schendel habite Bruxel-
les et a presque changé sa patrie d'origine
pour la Belgique. M. Bakkerkorff a déjà
fait une certaine sensation aux expositions,
avec ses vieilles femmes si bien observées et
d'une finesse d'exécution qui rappelle M. Meis-
sonier. M. Blés, M. Scheltema ont aussi des
œuvres remarquables; nous aimons beaucoup
la jolie figure en costume national, de gran-
deur naturelle, de M. Bisschop; il y a là des
qualités de peinture très sérieuses. Avec Louis
Meyer, la Hollande a perdu son meilleur et pres-
que son seul peintre de marines. Le Clair de
lune nous paraît le meilleurdes trois tableaux
de cet artiste; nous leur préférons toutefois
l'envoi de M. Clays dont nous avons parlé
plus haut. Quelques artistes cultivent encore
fidèlement le genre qui a valu des succès à
plusieurs des maîtres de XVIIe siècle. MM.
Springer et Van Elven sont assez connus pour
qu'ils n'aient pas besoin d'être présentés à
nos lecteurs. Les intérieurs de ville qu'ils ex-
posent les représentent fort convenablement.

Nous allions rentrer dans les galeries circu-
laires qui sont au centre de l'Exposition,
croyant en avoir fini avec les pavillons que
l'exiguité de la place a forcé les nations étran-

gères de se construire dehors, quand le ha-
sard nous conduisit dans la direction d'un
châlet où la Suisse a placé son Exposition des
Beaux-Arts. Ne croyez pas que ce châlet soit
tout petit ; la Suisse est fière de ses artistes et
elle a voulu leur taire une large place dans le
pavillon spécial qu'elle a édifié. Il est bien
heureux que l'Angleterre, l'Autriche et la
Prusse n'aient pas suivi cet exemple donné
par quatre nations étrangères; car alors nos
artistes restaient seuls soumis aux funestes
conditions que la Commission Impériale a fai-
tes aux œuvres d'art.

La Suisse a perdu, il y a quelques années,
son artiste le plus populaire; elle n'a admis
sans doute que les œuvres de peintres vivants;
car Calame ne figure pas au catalogue. Toute-
fois il a créé une nombreuse école et nous
avons sous les yeux les résultats de son en-
seignement et de son exemple. L'étude du
paysage domine donc en Suisse, et, il faut l'a-
vouer, il est rare que les peintres parviennent
à bien rendre la majesté grandiose des mon-
tagnes. Certains sites sont presque insaisis-
sables pour l'art ; aussi voyons-nous plusieurs
artistes suisses, et ce ne sont pas les plus mé-
diocres, abandonner leur pays et ne pas con-
sumer leur talent dans une lutte sans résultat
avec une nature écrasante. Ainsi a fait M.
Karl Bodmer qui vint s'établir à Barbisou et
M.Baudil, devenu, lui aussi, presque français
d'adoption. Leurs paysages obtiennent tou-
jours du succès au Salon annuel de Paris où
nous avons vu , il y a deux ans, la Bande de
Sangliers sous une haute futaie, de M. Bodmer.
M. Castan n'a pas quitté sa patrie et pour-
tant il ne se passe guère d'années où il ne fi-
gure au Salon de Paris. On a peine à croire,
en voyant les cinq bons paysages que M. Cas-
tan a réunis, qu'il n'a jamais obtenu de Mé-
daille à nos Expositions. Je cherche la raison
de cet oubli et je ne puis la trouver. M. Cas-
tau excelle à dorer le ciel et les feuillages des
derniers reflets d'un soleil mourant; il répand
sur la nature une poésie délicieuse et il
préfère les effets de lumière doux et calmes
aux oppositions heurtées et aux colorations
violentes. La première neige dans les montag-
nes, de M. Humbert, nous intéresse à une
pauvre enfant qui ramène un troupeau de
vaches et de chèvres dans la vallée. L'oura-
gan est déchaîné, le vent fouette la neige à
travers le chemin étroit et la pauvre petite
bergère se hâte, la ligure gelée, et pouvant
à peine suivre son chemin. M. Humbert a re-
présenté cette scène des montagnes avec beau-
coup de sentiment et de naturel. La réputa-
tion de Calame était un souvenir dangereux
pour les artistes qui voulaient s'attacher à
rendre les sites de leur pays. Quelques-uns
cependant sont parvenus à éviter cet écueil.

M. Veillon, M. Bocion et M. Loppé nous pa-
raissent dignes surtout d'être signalés. Ce
n'est pas sans un certain étonnement que
nous voyons le même artiste quitter les as-
pects grandioses et terribles de la mer de gla-
ce pour allersurprendreles colorations chau-
des de la Provence ou de l'Italie. M. Loppé
a peint les formidables crevasses du glacier
de Chainounix et en même temps il expose
une ruelle à Villefranche, près de Nice,
toute ensoleillée, toute ruisselante de lumiè-
re et de rayons. M. Simon a su également re-
produire la vigueur et la coloration du soleil
italien, dans son Osteria. Ces murailles cal-
cinées, celte terre brûlante des baisers du
soleil, font une singulière opposition à ces gla-
ciers, à ces vallées froides et verdoyantes, à
ces torrents qui roulent des sapins au pied
des pics sourcilleux. M. Karl Girardet est
depuis nombre d'années le peintre le plus ac-
crédité des rivages riants et animés des lacs
de Suisse. Tous ses tableaux se ressemblent
un peu; mais chacun d'eux a tant de charme
et de grâce qu'on oublie presque la facilité un
peu banale de l'exécution. M. Meuron se rap-
proche parfois de M. K. Girardet; mais il
élargit ses sujets et la vache des montagnes
en est souvent le principal sujet. M. Meuron
est un des meilleurs peintres d'animaux de
l'exposition suisse. Dans les cinq ou six ta-
bleaux de M. Koller, les animaux ont des for-
mes lourdes, une couleurgriseet terne. J'aime
mieux le parti-pris très-accusé de M. Jacot-
Guillarmot qui me semble se rapprocher bien
plus de la nature. Notons surtout le Départ du
cortège d'une noce Valaque, d'un effet étrange
et bizarre, qui pourtant paraît très juste. Un
des talents les plus vraiment originaux que
nous révèle l'envoi de la Suisse, est celui de
M. A. Berthoud. M. Berthoud est un réaliste,
c'estpresque le seul réaliste de l'école et je ne
serais pas étonné que M. Berthoud eût bien-
tôt des imitateurs; car cet artiste a un vrai
tempérament de peintre et il le montre dans
les travaux les plus variés; il expose à la fois
une nature morte, une scène de chasse , des
paysages, un portrait. C'est dans le paysage
surtout que M. Berthoud excelle; il rend avec
une rare justesse les effets de lumière, la per-
spective aérienne, la transparence de l'eau
et les coups de soleil rehaussés par des par-
ties plongées dans l'ombre. Nous n'insisterons
pas davantage; qu'il nous suffise d'avoir
indiqué les qualités exceptionnelles de M. A.
Berthoud et la place distinguée qu'il mérite
d'occuper parmi ses compatriotes.

M. Vautier s'est fait connaître au Salon de
Paris par deux envois récompensés par deux
succès. Le genre de M. Vautier rappelle les
scènes familières de l'école de Dusseldorf et
a beaucoup d'analogie avec le talent de M.
 
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