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— 132 —

tions sont généralement visitées par la même
foule. En second lieu, cette deuxième et cette
troisième exhibition décèlent trop le désir de
l'artiste de vendre son produit. S'il est néces-
saire de vendre il est plus nécessaire de ne
pas trop montrer qu'on a du mal à vendre.
Question de dignité et question d'adresse.
Sans compter que ces mêmes oeuvres repa-
raissent jusque dix à douze fois dans les
expositions communales de Liège, Spa, Ma-
lines, Courtrai, Bruges, Mons, etc.

Il y aurait donc lieu d'exiger que les objets
d'art déjà exhibés à l'une de nos trois expo-
sitions officielles,ne pourraient plus être admis
dans les deux autres. Cette mesure d'une adop-
tion facile, rendrait à nos expositions le cachet
d'originalité qu'elles doivent avoir. Evidem-
ment elle contrariera l'artiste qui ne voit dans
son œuvre qu'une marchandise, mais évidem-
ment aussi c'est à l'autorité de veiller à ce que
nos expositions ne dégénèrent pas en foire;
c'est à elle qu'il importe d'assurer au public
une garantie contre les sortes de surprises que
lui réserve l'esprit mercantile de certains. Il
restera toujours pour les chances de vente les
expositions libres secondaires, dont il est parlé
plus haut.

Voilà du même coup deux résultats remar-
quables obtenus; d'abord des expositions vé-
ritables et non cet étalage commercial indigne
de l'institution; en second lieu, une place
excellente donnée à des produits nouveaux
frustrés très souvent d'une bonne place don-
née à un fruit sec.

On se plaint toujours du peu de place que
renferment nos locaux (quand nous en avons);
à qui la faute? au règlement. Que l'on décide
une bonne fois pour toutes que le contingent
d'un artiste ne pourra s'élever à plus de
deux tableaux. A partir de ce moment il ne
s'en faudra pas de beaucoup que tout le monde
soit à la rampe.

On criera peut-être à l'arbitraire. Soit;
sans despotisme comme sans luxe, pas d'art
possible. Quelle est donc la république ou la
démocratie moderne pauvre, par essence, qui
ait été avantageuse aux beaux-arts? Ceux qui
veulent contenter tout le monde rendent le
plus mauvais service possible aux arts. Il
faut dans cette matière, quand on est animé
du désir de bien faire, imposer sa volonté ou
nefaire absolument rien. Toute la question du
salut dans les arts est dans une force intelli-
gente , dans un absolutisme élevé qui s'occupe
uniquement du but sans donner aux moyens
cette importance ridicule qui entrave et
arrête toujours les plus nobles aspirations.
Du moment qu'une protection officielle existe,
sa condition d'existence et de durée n'est que
là et quiconque la cherche ailleurs se trompe.

Mais nous nous égarons sur un terrain

auquel nous reviendrons un jour dans un livre
que nous terminons sur Y Histoire critique et
anecdoclique de fart belge contemporain, de
Herreyns à Wiertz, précédée d'un Essai sur
l'administration des Beaux-Arts en Belgique de
1850 à l'heure présente. Nous aurons, dans
ce livre qui forme actuellement l'objet de
nos chères et dernières études, l'occasion
d'examiner les diverses théories préconisées
dans la question de la protection accordée
aux Beaux-Arts. Revenons au Salon d'Anvers.

Le paysage domine puis vient le genre. La
peinture d'histoire est presque nulle.Elle s'ef-
face, elle s'éteint. La pensée se meurt, la
pensée est morte. Nos artistes continuent à
s'endormir dans cette paresse de l'esprit qui
conduit tout droit à l'hébétement. Tenez,
afin qu'on ne dise pas que nous calomnions
les artistes belges, lisez ce que disait, il y a
quelques jours, Maxime Du Camp dans la
Revue des Deux-Mondes aux artistes français.

« Que les artistes me permettent de le leur
dire, au moment où je prends congé d'eux
pour toujours : ils croient trop que l'art ré-
side dans l'adresse de la main, et que l'étude
des maîtres, c'est-à-dire l'étude de leur ma-
nière, peut les conduire à faire des œuvres
importantes. C'est là une erreur. Le procédé
n'est pas plus l'art que la calligraphie n'est la
poésie. Michel-Ange disait qu'il était l'élève
du torse, cela est vrai, mais il était avant
tout et par-dessus tout l'élève des poètes, des
philosophes et des historiens; il résumait en
lui la science de son temps, et c'est pour cela
qu'il fut un homme exceptionnel. Vivant dans
des camaraderies complaisantes, dédaignant
toute critique et amoureux de tout éloge, les
artistes s'étiolent à l'école de l'admiration mu-
tuelle. Quand ils ont trouvé ce qu'ils appellent
« une petite lumière » ou « un ton corsé, » ils
s'imaginent avoir créé une œuvre. Ils n'ont
rien créé du tout. Rien n'est plus douloureux,
plus irritant que de voir de belles et précieu-
ses facultés rester stériles parce que nul élé-
ment élevé ne vient les féconder. J'hésite à
dire le mot, car il est bien dur, mais ce qui
paralyse la plupart des artistes, c'est l'igno-
rance; leurs compositions le démontrent et le
prouvent avec une inéluctable clarté; c'est à
cela qu'il faut attribuer la stérilité de leur
imagination, et je ne parle pas ici du choix du
sujet, mais seulement de son ordonnance,
qui est une des formes de l'art. La façon dont
M. Maisiat a peint récemment un Bouquet de
roses prouve qu'il a un esprit cultivé. La main a
beauêtrehabile, rapide, ingénieuse, lorsqu'elle
n'a rien à reproduire, elle Hotte dans le vide et
s'atrophie à représenter toujours le même pay-
san, toujours le même Bédouin, toujours le mê-
me Bas-Breton. Si l'habileté d'exécution suffit
seule à faire un artiste, M. Blaize Desgoffes

est le plus grand artiste qui ait jamais existé.
Non, cela ne suffit pas, il faut autre chose ; il
faut que le cerveau commande à la main con-
trainte d'obéir, et le cerveau ne peut comman-
der que lorsqu'il est incessamment développé.
Que serait donc M. Kaulbach sans instruction?
La meilleure partie de son talent est faite de
ses lectures. MM. Gustave Moreau et Bida
prouvent par leurs œuvres qu'ils sont des let-
trés, et c'est ce qui constitue peut-être leur
valeur. L'adresse de la main fait les ouvriers
habiles, la culture intellectuelle fait les artis-
tes, surtout de nos jours, où la méthode ex-
périmentale est appliquée à tout. J'insiste en
terminant : le savoir et le caractère forment
seuls les vrais artistes. Ces deux forces indis-
pensables de l'esprit, il est facile de les ac-
quériravecde la persistance et de la volonté. »
(La suite au prochain n°).

(Correspondance particulière).

Bruxelles.

Le Journal des Beaux-Arts disait l'autre
jour, dans un entrefilet inséré dans sa chro-
nique, qu'il règne dans le monde des artistes
une certaine inquiétude touchant la prochaine
exposition de Bruxelles.

L'on a vu disparaître avec assez de plaisir
la construction delà place du Trône, sa démo-
lition devant être envisagée comme le présage
de la naissance d'un local définitif, mais le
court espace de temps qui nous sépare du
prochain Salon de Bruxelles donne naturelle-
ment lieu à des commentaires sur l'emplace-
ment de celui-ci et l'on est logiquement amené
à se dire que les locaux manquant, il se pour-
rait qu'il n'y eut point d'exposition en 1869.
Fondée où non, cette opinion est assez géné-
ralement répandue, et, pour ce qui me con-
cerne, j'avoue que je ne suis pas en mesure
de rien dire qui l'infirme.

Mais en présence de l'incertitude où nous
voici sur le sort de la prochaine exposition
de Bruxelles, il peut n'être pas hors de pro-
i pos d'examiner, si la suppression exception-
nelle de celle-ci serait, comme certains sem-
blent, le croire, une calamité artistique.

Sans doute, au point de vue des intérêts
immédiats de quelques artistes, il pourrait
\ être fâcheux que l'exposition de 1869 fût sup-
j primée. Sans parler des occasions de vente
; que fournit nécessairement un Salon, il y a
| quantité de satisfactions accessoires dont se-
raient privés bien des gens; des médailles,
des décorations, des subsides et des comman-
des, choses toujours bonnes à prendre et
d'ailleurs non moins appréciées du vrai mé-
i rite que de l'intrigue, qui malheureusement
! en a trop souvent une part considérable.
I Mais, si fort à cœur que l'on puisse prendre
j. les intérêts de MM. les artistes, il ne manque
i point de personnes qui trouvent que l'intérêt
et la dignité de l'art méritent bien aussi d'être
pris en considération et que ces derniers sont
à l'heure qu'il est assez compromis et cela
par la fréquence même des expositions.

Pour peu que l'on ait suivi le mouvement
artistique belge des dernières années, l'on
 
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