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— 180 —

point avoir trouvé beaucoup de contradicteurs.
La raison en est simple, car l'on ne tardera
point sans doute à mettre en question les
mérites du dessin dont nous parlons. Chez
nous bien plus que partout ailleurs en rai-
son de la petitesse du pays, le pouvoir, quel
qu'il soit, est soumis à un rude contrôle et
ses moindres actes ont à essuyer parfois de
sévères critiques. En matière de beaux-arts,
chacun ayant son goût particulier, il est ma-
tériellement impossible de poser aucun acte
sans ameuter contre soi une foule de gens.
Nous avons entendu quantité de personnes
se plaindre de l'acquisition de la toile de
Teuiers sous prétexte que notre musée était
trop pauvre en œuvres étrangères pour se
payer le luxe d'une toile flamande d'un tel
prix. Lors de l'acquisition de l'esquisse de De-
lacroix, dont nous avons critiqué tout d'a-
bord le haut prix, l'on ne se plaignit guère
moins de voir donner à une œuvre étrangère
la préférence sur une œuvre nationale. Au-
jourd'hui que peu de personnes encore ont vu le
dessin de Decamps, on dit déjà qu'il n'est pas
digne d'un musée. Nous pensons le contraire,
tout en faisant nos réserves, non pas sur la
qualité de l'œuvre mais sur sa nature. Notre
musée n'a pas, jusqu'à ce jour, de collection
de dessins, et, s'il y a lieu d'en former une, ce
que tout le monde verrait avec grand plaisir,
nous croyons que la voie la plus rationnelle à
suivre serait d'acquérir, commenoyau, un ca-
binet tout formé et de le compléter par des
acquisitions successives. Il est des dessins de
maîtres qui valent des tableaux, de même que
les aquarelles de certains peintres modernes
se paient non moins cher que leurs toiles.
Decamps, nous le savons, doit être côté en
tête de ceux-là, mais il y aurait lieu, selon
nous , d'adopter, dans l'intérêt même de nos
collections, une règle invariable. N'acheter
que des peintures ou former franchement
un cabinet d'œuvres dessinées. Au point de
vue marchand, Decamps est un des maîtres
les plus chers, et l'on a gardé le souvenir de
certaines enchères où ses œuvres atteignirent
des prix relativement fabuleux. Une faut donc
point s'étonner si La défaite des Cimbres ait
coûté au gouvernement une somme assez im-
portante. Cette somme nous avouons ne la
point connaître, mais, ce que nous savons,
c'est qu'à la vente Fau qui eut lieu à Paris
en 18S4, si nous ne nous trompons, le dessin
qui appartient aujourd'hui à l'Etat belge, fut
adjugé à la comtesse Le Hon au prix de vingt-
cinq mille francs.

Nous venons de dire que, jusqu'à ce jour, il
n'y a point, dans nos galeries publiques, de
collection de dessins. Nous ne savons s'il entre
dans les vues du gouvernement d'en former
une, mais, en attendant, il vient d'être fait ac-

quisition, pour le musée, delà suite splendide
de reproductions des dessins de grands maî-
tres du musée de Bâle et du Louvre, exécutées
parle photographe Braun, de Dornach. Il est
difficile de se faire une idée de la perfection
de ces fac-similé qui ne donnent pas seule-
ment la ligne de l'œuvre originale, mais sa
couleur et toute sa pureté. Bien des fois, de-
puis Prestel l'inventeur du genre, on a fait
des reproductions de dessins par la gravure
et la lithographie avec plus ou moins de bon-
heur. La photographie a naturellement mieux
réussi, mais la couleur du papier a été un
grand obstacle au succès complet. Comment
s'y est pris M. Braun, nous n'en savons rien,
mais nous croyons qu'il serait difficile d'aller
plus loin qu'il ne l'a été. Toutes les épreuves
de la suite sont montées sur de beaux cartons
gris fabriqués tout exprès, bref, c'est un vrai
monument que celle collection de reproduc-
tions qui pourraient supporter le parallèle avec
les originaux et qui coûte un prix relativement
minime. Nous conseillons aux artistesd'avoir
recours à l'obligeance de la maison Goupil
de Bruxelles, pour faire l'inspection des por-
tefeuilles de la collection Braun. Il y a là de
quoi les transporter d'admiration et—loin de
nous l'idée de faire une réclame à qui que
ce soit—toutes les pièces se vendant en détail
à fort bon compte, ils auront la satisfaction de
pouvoir orner leur atelier d'études splendides
de Holbein, Léonard de Vinci ou Michel-
Ange pour quelques francs. Du reste, les des-
sins dont nous parlons seront exposés au
musée dans une salle spéciale à ce que l'on
nous assure. Tandis que nous en sommes à
parler du musée, disons que l'on ne tardera
pas à exposer une suite intéressante de ba-
tailles dues au pinceau de Pierre Snayers,
peintre du roi d'Espagne, Philippe IV. M.
Félis a publié, tout récemment, dans le bul-
letin des commissions d'art et d'archéologie,
une étude approfondie de ces œuvres, acqui-
ses à la vente Salamanca.

Nous avons parlé, il y a quelques mois, à
cette même place, d'une œuvre remarquable
de M. Van Moer, exécutée pour décorer le
grand escalier du Palais du Boi. On se sou-
vient qu'il s'agissait d'une vue de Venise lar-
ge de sept à huit mètres. Cette décoration
vient d'être complétée par deux vues nouvel-
les, dues au pinceau du même artiste, l'une
représentant la vue extérieure de St. Marc,
l'autre la cour intérieure du palais avec l'es-
calier des Géants. Il est sans doute inutile
d'insister sur les qualités d'exécution des toi-
les de M. Van Moer; on connaît l'adresse de
l'artiste, sa science approfondie de la perspec-
tive et le goût qui préside à la composition de
ses œuvres. Nous croyons cependant qu'il se-
rait injuste de ne pas insister tout particuliè-

ment sur le mérite des toiles nouvelles qu'il
vient de terminer pour le palais. Il a su, tout
en traitant dans des proportions exception-
nelles un genre qui nécessite rarement de
tels développements, rester simple, harmo-
nieux et pittoresque. L'intérêt des vues de
M. Van Moer, s'accroît de nombreux épisodes
dont il a semé ses places publiques et dont
les acteurs sont enlevés avec une adresse qui
ferait envie à plus d'un peintre de figures.

Tout le monde partagera notre satisfaction
en voyant le Boi faire appel au talent de nos
meilleurs artistes pour la décoration du pa-
lais. Quand l'exemple part de si haut il ne
saurait manquer d'être suivi.

Le Comte de Flandre dont la royale habi-
tation avance avec une rapidité que l'on voit
rarement apporter aux constructions dans no-
tre pays, a chargé M. Stallaert de l'exécution
de deux ou trois plafonds. Cette nouvelle
est d'un heureux augure pour l'avenir.

H. H.

{Correspondance particulière).

Anvers.

Monsieur le Directeur,

Vous avez annoncé, dans le dernier numé-
ro du Journal des Beaux-Arts, l'acquisition
que le Musée de Bruxelles a faite ici d'un ta-
bleau capital de David Teniers, le jeune, re-
présentant une Kermesse de village. Vous vous
êtes demandé sans doute, à part vous, com-
ment il a pu se faire qu'on laissât partir une
composition de cette importance, d'une ville
qu'aucuns nomment la métropole artistique
de notre pays?

Laissez-moi vous raconter cette histoire.
La valeur de ce tableau était fort bien appré-
ciée à Anvers, où bien des gens auraient dé-
siré le voir figurer au Musée. L'administra-
tion de cet établissement le connaissait, et je
sais, de science certaine, qu'il en avait été
offert, de sa part, en 1863, une somme de
cent dix mille francs. Malheureusement les
propriétaires en exigeaient cent cinquante
mille, et l'on recula devant une demande si
exorbitante. J'ignore si les négociations ont
été reprises depuis. Tout ce que je sais, c'est
que notre peintre Jacob Jacobs, qui n'était
pas alors membre du conseil d'administration
de noire Académie, s'écriait plus tard qu'il
nous fallait ce tableau, pour le porter en tri-
omphe au Musée, lors des fêtes du deux cen-
tième anniversaire de la fondation de la célèbre
institution dont nous sommes, en grande par-
lie, redevables à David Teniers.

Quelques-uns disent que si ce chef-d'œuvre
a quitté notre ville, il faut l'attribuer au man-
 
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