Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Laborde, Léon Emmanuel Simon Joseph de [Hrsg.]; Laborde, Alexandre Louis Joseph de [Hrsg.]
Voyage de la Syrie — Paris, 1837

DOI Seite / Zitierlink:
https://doi.org/10.11588/diglit.6093#0170
Überblick
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
— 87 —

fort jolie, et, ce qui est exceptionnel, on y trouve un orgue en très-bon état. A dix minutes de distance
du village est la grotte de la Visitation de Marie à Elisabeth. En allant de Saint-Jean à Jérusalem, on passe
près d'un couvent grec bâti à la place où fut coupé l'arbre dont a été faite la croix de la Passion. Ne riez
pas de cette tradition, il y aurait trop à rire si on les prenait toutes au sérieux; à vrai dire, ce ne sont
pas des traditions, c'est un mémento créé par les moines-cicérone à l'usage du pèlerin, et dont l'habitant du
pays n'a jamais entendu parler et serait le premier a rire.

SAINT-SABA (Planche LXXVI, i63).

Vue du cornent de Saint-Saba et du torrent de Cédron.

Avant de rentrer à Jérusalem, nous allons au couvent de Saint-Saba, qui est dans une position tout à
fait différente de celle du couvent de Saint-Jean; ses constructions, bizarrement disposées en espalier
contre un aride rocher, ont pour cadre la désolation de la désolation. Le Cédron, en descendant bruyam-
ment vers la mer Morte, a creusé un lit profond, et c'est dans la partie la plus resserrée, contré les rochers
les plus escarpés, qu'on a élevé les murailles du couvent, ainsi plaquées pour ainsi dire contre une autre
muraille de rochers. Une belle source, qui surgit à quelques pas au dehors et qui ne tarit jamais, explique
le choix de cette position; les autres raisons sont secondaires.

Les moines nous reçoivent avec une gaieté d'aubergiste qui est le caractère de l'hospitalité monacale. La
visite des pèlerins est pour les religieux une ressource pécuniaire et, mieux encore, une distraction. On
ne comprend nulle part, aussi bien qu'à Saint-Saba, la satisfaction que procurent de nouvelles figures et
une conversation renouvelée. L'arrivée des voyageurs est un événement dans ce lieu, où il n'y a pas d'évé-
nement.

Le couvent se compose de terrasses et de bâtiments échelonnés les uns au-dessus des autres, auxquels
on parvient par un dédale de couloirs. 11 n'y a rien, ou du moins on ne nous a rien montré, qui mérite
une mention particulière. C'est le couvent grec, c'est l'église grecque, c'est la cloche remplacée par une
barre de métal vibrante; c'est aussi, et malheureusement, l'ordinaire grec pour la nourriture, et l'ordi-
naire de vulgarités et d'absurdités pour la conversation. Je n'oublierai jamais, cependant, les charmants
oiseaux qui sont la société des moines quand ils n'en ont pas d'aulre, et qui viennent, du fond du désert,
sur les terrasses du couvent, becqueter dans la main du voyageur le pain qu'il leur donne. Au milieu de
ce grand vide de la nature et de l'esprit, un détail insignifiant prend une grande place; cette familiarité
d'êtres vivants a un grand charme.

Nous rentrons à Jérusalem. La ville a repris son calme, les fêtes de Pâques ont atteint leur terme.
Notre curiosité s'est satisfaite à l'intérieur et à l'extérieur ; il ne nous reste plus qu'cà parfaire le voyage de
la Décapole, en visitant les anciennes villes de Philadelphie et de Gerasa, brillantes autrefois au milieu
d'une contrée bien administrée et prospère, ruinées aujourd'hui en plein désert. Cette excursion nous
mène à Jéricho et à la mer Morte. Les difficultés du voyage semblent moindres que nous ne l'avons
craint : mais aucun habitant de Jérusalem, aucune autorité de celte ville ne peut les résoudre. On nous
renvoie à l'aga de Jéricho, qui , lui-même, nous dit de nous adresser au cheik de la grande tribu des
Adouan , et, comme ce chef ne veut venir à Jérusalem à aucun prix , force nous est de lui donner
rendez-vous à Jéricho.

Le dimanche matin, à 9 heures 1/2, après avoir entendu la messe au Saint-Sépulcre, nous nous met-
tons en route. Notre caravane reprend ses vieilles habitudes; mais elle s'est augmentée de M. l'abbé
Desmasures et de l'un des drogmans du couvent de Terre-Sainte qui vient de faire ce même voyage avec
M. le duc de Richelieu. Nous sommes en tout dix personnes, montées sur des mules de louage et sui-
vies de trois muletiers à pied qui conduisent en laisse une mule chargée de quelques provisions, comme
riz, café, tabac et médicaments. Le musselim avait mandé à Jérusalem l'aga de Jéricho et lui a faitdevant
nous la leçon en métaphores orientales qui peuvent se traduire ainsi: Protégez ces voyageurs contre les
brigands et ne les volez pas vous-même, autrement vous aurez à faire à moi. L'aga est accompagné de
huit cavaliers qui nous servent d'escorte. Nous marchons avec ce brillant cortège. A trois quarts de lieue
de Jérusalem, nous traversons le village de Béthanie, que les gens du pays appellent El Asarie, du nom de
Lazare. Le tombeau du bienheureux ressuscité ressemble à tous les tombeaux de cette contrée: ce sont
deux salles sépulcrales encavées dans le rocher, et qui, depuis la venue du Christ, n'ont pas cessé d'être
désignées fidèlement à la piété des chrétiens. Elles répondent mal, dans leur étal de transformation, de
 
Annotationen