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Étude sur les préceptes d'Amenemhat Iee.
sens a été déterminé et un certain nombre de règles relatives au rythme égyptien ont été
posées. Aussi la traduction récente de M. Schack est-elle en avance sur celles qui l'ont pré-
cédée; elle ne me paraît pas toutefois s'être emparée complètement du texte et en avoir
fait sortir tout ce qu'il contient. C'est pourquoi je hasarde une nouvelle traduction. Je
ne prétends pas que mon explication soit de tout point irréfutable, ce serait oublier que le
sens des difficultés d'un texte est la première condition d'une étude sérieuse; je crois seule-
ment que l'explication que je présente est plus conforme à l'histoire, aux mœurs de l'Ègypte
et surtout aux règles de la grammaire et de la poésie égyptienne; car il y a bien une
poésîe égyptienne. La publication récente du beau travail de M. Pu. Veket sur le papyrus
Prisse, tout en m'encourageant, m'a été de la plus grande utilité.
Les préceptes d'Amenembât nous sont parvenus en quintuple exemplaire, au papyrus
Millingen, aux papyrus Sallier Ier et Sallier II, sur les ostraca 5G29 et 5638 au British
Muséum. Quiconque est habitué à l'écriture hiératique ne conservera aucun doute sur la
priorité de l'un de ces exemplaires sur les autres : le papyrus Millingen a évidemment été
écrit longtemps avant les autres. Outre que son écriture le montre clairement, les tournures
archaïques dont il est rempli en sont une nouvelle preuve. Ce papyrus, ou un semblable
qui contenait les préceptes d'Amenemhât tels qu'ils avaient été composés, servit de modèle
pour les copies futures; mais à mesure que l'on s'éloignait de l'époque où l'œuvre avait été
composée, elle devint de plus en plus difficile à comprendre. Les élèves-scribes durent sou-
vent demander à leurs maîtres de leur expliquer le sens de tournures abandonnées et de
mots hors d'usage. L'explication de ces difficultés se transmit sans doute oralement pendant
assez longtemps; mais le moment arriva où, les difficultés devenant de plus en plus grandes
pour les élèves, il fallut changer certaines expressions, ajouter certains mots qui rendaient
le sens plus facile à saisir. De là proviennent toutes les variantes que l'on remarque entre
le papyrus Millingen et les quatre autres exemplaires de notre texte. Si ces variantes diffèrent
entre elles, la raison en est évidente : les scribes ne comprenaient pas tous de la même
manière, ou tout au moins avec les mêmes nuances; de plus l'élève qui copiait les signes
Inératiques d'une écriture bien plus ancienne, ne parvenait pas toujours à reconnaître la
valeur des signes, il confondait parfois ceux qui avaient presque la même forme. Le papyrus
Sallier II en fournit deux exemples remarquables. Ces changements ont fait que le rythme
de l'œuvre a reçu quelques entorses ; mais le sens y a le plus souvent gagné. A lui seul,
le papyrus Millingen est d'une difficulté presque insurmontable, tellement le laconisme est
grand et la pensée serrée; avec les variantes, il se comprend très bien, comme on le verra.
Il semble donc que j'eusse dû prendre le papyrus Millingen comme type de l'œuvre que j'ai
étudiée; malheureusement je n'ai pu le faire, parce qu'il n'est pas complet et parce que
souvent l'orthographe y est par trop rudimentaire. Il m'a semblé plus commode de prendre
pour base de mon étude le papyrus Sallier II dont l'orthographe est de la bonne époque,
et qui est le seul exemplaire complet. Toutefois l'élève qui copia le papyrus Sallier II
fut sans doute le moins intelligent de ceux dont les copies nous sont parvenues : le
papyrus Sallier II contient, en effet, des fautes nombreuses, surtout des omissions. Aussi, il
en résulte que dans les dernières strophes de l'œuvre, le traducteur se trouve en face
de difficultés bien plus grandes que dans les premières. Sont-elles insurmontables? On en
jugera.
Étude sur les préceptes d'Amenemhat Iee.
sens a été déterminé et un certain nombre de règles relatives au rythme égyptien ont été
posées. Aussi la traduction récente de M. Schack est-elle en avance sur celles qui l'ont pré-
cédée; elle ne me paraît pas toutefois s'être emparée complètement du texte et en avoir
fait sortir tout ce qu'il contient. C'est pourquoi je hasarde une nouvelle traduction. Je
ne prétends pas que mon explication soit de tout point irréfutable, ce serait oublier que le
sens des difficultés d'un texte est la première condition d'une étude sérieuse; je crois seule-
ment que l'explication que je présente est plus conforme à l'histoire, aux mœurs de l'Ègypte
et surtout aux règles de la grammaire et de la poésie égyptienne; car il y a bien une
poésîe égyptienne. La publication récente du beau travail de M. Pu. Veket sur le papyrus
Prisse, tout en m'encourageant, m'a été de la plus grande utilité.
Les préceptes d'Amenembât nous sont parvenus en quintuple exemplaire, au papyrus
Millingen, aux papyrus Sallier Ier et Sallier II, sur les ostraca 5G29 et 5638 au British
Muséum. Quiconque est habitué à l'écriture hiératique ne conservera aucun doute sur la
priorité de l'un de ces exemplaires sur les autres : le papyrus Millingen a évidemment été
écrit longtemps avant les autres. Outre que son écriture le montre clairement, les tournures
archaïques dont il est rempli en sont une nouvelle preuve. Ce papyrus, ou un semblable
qui contenait les préceptes d'Amenemhât tels qu'ils avaient été composés, servit de modèle
pour les copies futures; mais à mesure que l'on s'éloignait de l'époque où l'œuvre avait été
composée, elle devint de plus en plus difficile à comprendre. Les élèves-scribes durent sou-
vent demander à leurs maîtres de leur expliquer le sens de tournures abandonnées et de
mots hors d'usage. L'explication de ces difficultés se transmit sans doute oralement pendant
assez longtemps; mais le moment arriva où, les difficultés devenant de plus en plus grandes
pour les élèves, il fallut changer certaines expressions, ajouter certains mots qui rendaient
le sens plus facile à saisir. De là proviennent toutes les variantes que l'on remarque entre
le papyrus Millingen et les quatre autres exemplaires de notre texte. Si ces variantes diffèrent
entre elles, la raison en est évidente : les scribes ne comprenaient pas tous de la même
manière, ou tout au moins avec les mêmes nuances; de plus l'élève qui copiait les signes
Inératiques d'une écriture bien plus ancienne, ne parvenait pas toujours à reconnaître la
valeur des signes, il confondait parfois ceux qui avaient presque la même forme. Le papyrus
Sallier II en fournit deux exemples remarquables. Ces changements ont fait que le rythme
de l'œuvre a reçu quelques entorses ; mais le sens y a le plus souvent gagné. A lui seul,
le papyrus Millingen est d'une difficulté presque insurmontable, tellement le laconisme est
grand et la pensée serrée; avec les variantes, il se comprend très bien, comme on le verra.
Il semble donc que j'eusse dû prendre le papyrus Millingen comme type de l'œuvre que j'ai
étudiée; malheureusement je n'ai pu le faire, parce qu'il n'est pas complet et parce que
souvent l'orthographe y est par trop rudimentaire. Il m'a semblé plus commode de prendre
pour base de mon étude le papyrus Sallier II dont l'orthographe est de la bonne époque,
et qui est le seul exemplaire complet. Toutefois l'élève qui copia le papyrus Sallier II
fut sans doute le moins intelligent de ceux dont les copies nous sont parvenues : le
papyrus Sallier II contient, en effet, des fautes nombreuses, surtout des omissions. Aussi, il
en résulte que dans les dernières strophes de l'œuvre, le traducteur se trouve en face
de difficultés bien plus grandes que dans les premières. Sont-elles insurmontables? On en
jugera.